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Billet de blog 15 décembre 2023

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Une cmp en dernier recours pour faire passer la loi immigration

Lundi, l'examen de la loi immigration se tiendra en commission mixte paritaire (CMP), un dispositif clé pour Gérald Darmanin après plusieurs échecs lors de la navette parlementaire.

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La CMP : Un Processus Clé 

Peu connue du public, la CMP est cruciale dans les procédures parlementaires françaises. Activée quand les deux chambres parlementaires ne s'accordent pas, comme après le rejet récent du projet de loi immigration par l'Assemblée nationale, cette procédure, dite "du dernier mot", privilégie l'Assemblée dans le texte final de la loi. L'Assemblée peut adopter le texte de la CMP ou sa dernière version, modifiée par les amendements du Sénat. Pour Gilles Marchand*, expert en droit public, il est vital de reconnaître que cette prérogative de l'Assemblée, bien qu'autonome, est initiée par le Gouvernement. "Cela reflète le bicamérisme inégal de la France, où l'Assemblée a souvent l'avantage sur le Sénat, surtout avec des majorités politiques divergentes," dit-il. Elisabeth Borne peut aussi accélérer le processus législatif en engageant la procédure accélérée, limitant la navette à une seule lecture. Cette méthode, appliquée à presque 85 % des textes depuis 2017, cherche à légiférer plus efficacement sur l'immigration, malgré les possibles divergences entre les versions du ministre, du Sénat, et celle approuvée par la CMP. Elle vise à rationaliser le processus législatif, en s'adaptant aux exigences contemporaines de prise de décision rapide, tout en respectant l'esprit de la démocratie parlementaire. 

« Avec une composition équilibrée, la CMP respecte la pluralité politique.»

Selon Gilles Marchand*, la CMP, composée de sept députés et sénateurs titulaires et leurs suppléants, reflète le pluralisme de l'Assemblée nationale et du Sénat. « Bien actuellement favorable à la droite, qui domine le Sénat, elle veille à l'équilibre entre majorité et opposition. » Il admet la complexité du processus. « Selon l'article 45 de la constitution, si la CMP conçoit un texte commun, le gouvernement peut le soumettre aux deux chambres sans amendements sauf approbation gouvernementale, accentuant la prééminence gouvernementale et de l'Assemblée dans l'élaboration législative. » Si la CMP échoue à s'accorder, ou si le texte n'est pas satisfaisant pour le gouvernement, Elisabeth Borne n'engagera pas une nouvelle navette, laissant ainsi le texte en suspens et nécessitant potentiellement de nouvelles négociations ou une révision complète de la proposition.

Loi immigration : Dupond-Moretti espère trouver une "voie de passage" en Commission mixte paritaire © France Inter

Dans l'arène des divergences politiques

Dans cette commission sur la loi immigration, la CMP doit considérer la position de la droite sénatoriale, ouverte à des concessions sur l'aide médicale d'État, bien qu'opposée à une loi fragmentée de Matignon. Des divergences persistent sur des sujets délicats comme les prestations sociales pour étrangers, le droit du sol, le séjour irrégulier, et la régularisation des sans-papiers. Élisabeth Borne, confrontée à ces défis, tente d'harmoniser les points de vue divergents entre droite et gauche. Les lignes rouges des parlementaires rendent difficile de trouver un consensus. Si la CMP ne trouve pas d'accord, Emmanuel Macron pourrait renoncer au projet, modifiant ainsi les dynamiques institutionnelles. Actuellement, le rapport de force au sein de la CMP favorise la droite et le centre, poussant les députés Les Républicains à voter pour la motion de rejet avec La Nupes et L’Extrême-droite, forçant le gouvernement à négocier sur un texte durci par le Sénat. Un membre écologiste témoigne. « Sous Éric Ciotti, la droite insiste pour adopter la version du Sénat et a même demandé à Macron, via une lettre, de considérer une révision constitutionnelle sur l'immigration. Ils restent fermes, surtout sur l’article 3 concernant le droit du sol. »

Cette dynamique complexe au sein de la CMP et entre les différentes factions politiques souligne les défis auxquels fait face le Gouvernement pour faire passer le projet de loi sur l'immigration. Avec des enjeux élevés et des opinions divergentes, l'issue de la CMP sera décisive pour l'avenir de la législation sur l'immigration en France. La tâche de la CMP, composée de manière à refléter l'équilibre politique actuel, est donc cruciale. Elle doit non seulement trouver un terrain d'entente entre les différentes visions du Sénat et de l'Assemblée nationale, mais aussi satisfaire les exigences du Gouvernement. Cela met en lumière l'importance du rôle de la CMP dans le processus législatif français, servant de pont entre les différentes chambres et facilitant la recherche d'un consensus. Enfin, le travail de la CMP sur le projet de loi immigration est un exemple frappant de la complexité du processus législatif en France, illustrant les subtilités du bicamérisme et la nécessité d'une négociation constante entre les différentes forces politiques. Le résultat de leurs délibérations sera un indicateur clé de la direction future de la politique d'immigration française.

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