
"Il est inadmissible de pénaliser les voitures thermiques tant que les alternatives technologiques ne sont pas prêtes; un consensus existe sur ce point."
En avançant une telle position, Jean-Philippe Tanguy, député de la Somme, flirte avec le déni sur la question des voitures thermiques. Le rapport du GIEC d'avril 2022, renforcé par les mots de l'économiste Céline Guivarch, est sans équivoque sur cette question : « les infrastructures gourmandes en énergies fossiles doivent être mises hors service avant la fin de leur durée de vie théorique –voitures thermiques, navires de commerce, et autres. »
Ignorant cet avertissement scientifique, Tanguy justifie sa posture au micro de France Info, puisque son parti veut soutenir les français ayant des problèmes de pouvoir d'achat et leurs voitures comme seul moyen de moyen de locomotion. "Ne stigmatisons pas les usagers de voitures thermiques tant que les alternatives technologiques restent en développement ; un accord général se dégage sur ce sujet.", affirme le numéro deux du Rassemblement national à l'Assemblée, ajoutant en substance : "Le RN ne se cantonne pas à l'option électrique ; l'hydrogène est également envisageable." Ainsi, en maniant l'art de la rhétorique, Jean-Philippe Tanguy camoufle subtilement que son parti, le RN, reste fidèle à son opposition contre les interdictions visant les infrastructures fortement émettrices de CO2 (usines à charbon, véhicules thermiques, etc.).
"Tant qu'on n'a pas la solution on va garder les voitures un mixte voiture thermique et tant qu'on n’a pas la solution ben on va garder le gaz."
S'exprimant sur France Info, Jean-Philippe Tanguy a exposé la vision du RN sur la mobilité durable, un mélange de voitures thermiques et électriques, complété par le gaz. Ce faisant, il semble ignorer la trajectoire fixée par le Pacte vert européen qui, depuis juillet 2021, édicte des règles intransigeantes pour la réduction des émissions, dont le remaniement des directives sur l'efficacité énergétique et les normes d'émissions. Olivier*, expert en politiques de transition énergétique, note que Tanguy a omis d'aborder un élément crucial : le mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF). "Cette initiative, affirme l'analyste, est foncièrement souverainiste. Elle vise à appliquer des tarifs douaniers sur les produits importés de pays aux normes environnementales plus laxistes que l'UE."
Europhobie nationaliste et ultralibéralisme
Écoutant Jean-Philippe Tanguy sur France Info, Olivier en déduit que le RN évite délibérément toute référence au mécanisme d'ajustement carbone aux frontières (MACF), preuve d'une posture davantage ultralibérale que souverainiste, et peu alignée sur les objectifs de neutralité carbone de 2050. « À l'heure actuelle, explique Olivier, les députés européens envisagent de réajuster le système d'échange de quotas d'émission (SEQE), un outil qui imposerait la tarification carbone européenne sur les produits importés à forte empreinte carbone. » Créé pour endiguer les fuites de carbone plus efficacement que les dispositifs actuels, ce mécanisme, compatible avec les règles de l'OMC, présente des ambitions doubles que Jordan Bardella et les eurodéputés RN semblent avoir sous-estimées. « Ce mécanisme vise à prévenir les 'fuites de carbone', c'est-à-dire le déplacement de la production industrielle vers des zones moins réglementées. » Ainsi, cette mesure du pacte vert européen, destinée à annuler les bénéfices de telles délocalisations pour inciter au retour des industries en France, n'est jamais abordée par les cadres du RN. Cela laisse sous-entendre, à l'instar de Jean-Philippe Tanguy, que les cadres du RN n’ont pas les connaissances pour mettre en place une réelle alternative aux écocides et au capitalisme ultralibéral.