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Billet de blog 30 juillet 2023

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Le nouveau « comeback politique » de Ségolène Royal

Hier, des journalistes de Libération revenaient sur une rencontre entre Ségolène Royal et le député de l’Essonne Jérome Guedj. Après un long débat sur le grand âge, certaines rumeurs laissent entendre que l’ancienne femme de François Hollande aurait abordé ses ambitions pour les européennes. Le royalisme serait-il encore vivant?

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Qu’est-ce que le royalisme ? 

Dès 2007, Ségolène Royal s'appuie sur l'idée d'un discrédit profond des figures et des discours politiques, et construit sa proposition programmatique sur la relation "personnelle" qu'elle a établie avec les Français. Son identité, façonnée comme unique (surabondance du "je" dans ses discours, mise en valeur constante de sa "liberté") et basée sur une nouvelle façon de "faire de la politique", impliquant les citoyens "ordinaires", demeure très actuelle. Ce style, destiné à restaurer la confiance, sert presque de programme, à l'heure où elle se prépare à rejoindre TPMP, l'émission de Cyril Hanouna, à partir de la rentrée de septembre. À 69 ans, l'ancienne socialiste commencera à travailler comme chroniqueuse sur le plateau de l'émission tapageuse de Cyril Hanouna, comme l'ont indiqué les journalistes de Libération. Ce choix suscite des interrogations. "Les gens qui la connaissent bien, avançaient-ils, proposent diverses explications : elle aime toujours surprendre en se mettant en danger, elle ne se soucie guère du politiquement correct, elle voit l'opportunité de toucher un public éloigné de la politique et de faire passer ses idées à une audience de deux millions de personnes.". D'autres spécialistes de la vie politique française voient dans ce choix une grande continuité avec ses discours sur la "démocratie participative", au cœur de la stratégie politique de Ségolène Royal en 2007.

Pouvoir et démocratie 

Ségolène Royal - Désirs d'Avenir - Strasbourg - Participatif © Matthieu Giroux

Dans un ouvrage paru en 2019 aux éditions du CNRS, le politologue Arnaud Mercier affirme que Ségolène Royal fait de la démocratie participative le "troisième pilier" de l'exercice du pouvoir. « Ce thème, très adaptable, lui permet de se distinguer du personnel politique traditionnel. Il lui offre une certaine modernité et met en valeur son action de "proximité" et les atouts de son ancrage local. », soulignait-il. La candidate et son équipe ont mesuré, dix ans avant Jean-Luc Mélenchon et les rédacteurs du programme L’Avenir En Commun, l'ampleur du discrédit politique et de "la dissociation entre légitimité et confiance", sur laquelle avait travaillé Pierre Rosanvallon. En 2019, Arnaud Mercier affirmait : « La position que Ségolène Royal élabore vise à surmonter cette défiance, à rétablir cette confiance perdue, d'où un style (linguistique, corporel...) fondé sur la proximité, l'interactivité, l'intersubjectivité, la prise en compte des savoirs ordinaires et profanes. » De plus, ces diverses visions remettent en cause certaines croyances inhérentes au champ politique qui sont au cœur de la symbolique présidentielle de la Ve République : l'idée que l'homme politique est omniscient, omnipotent, qu'il "décide", qu'il a le pouvoir à lui seul d'influer sur le cours des choses, qu'il doit tracer la route et montrer la voie, continue d'influencer les partis de gauche, notamment La France Insoumise. Ce matin, Marcelo Wesfried révélait dans les colonnes du Parisien que, chez les élus de La France Insoumise, Royal a la cote. « C'est elle qui avait déclaré, en février 2022, "le vote utile à gauche, c'est le vote Mélenchon". » rappelaient-ils. Les Insoumis n'ont pas oublié ce coup de pouce. « Moi, je l'aime bien, affirme le député LFI Antoine Léaument. Dans ses prises de position à notre sujet, elle ne se trompe pas sur les limites de l'arc républicain. Elle a toujours défendu Mélenchon sans rien demander, confirme un Insoumis. Elle nous défend. » Ainsi, le "royalisme" mérite d'être sérieusement envisagé car il résonne avec de nouvelles légitimités de l'action politique et de la démocratie participative, valorisant la concertation, la proximité, la participation, le débat, la discussion, à une époque où la France traverse une crise démocratique majeure. 

Ségo et la controverse des jurys citoyens

Ségolène Royal - Désirs d'Avenir - Débats - 5100 © Matthieu Giroux

En 2007, Ségolène Royal promouvait l'idée des jurys citoyens, ce qui était symbolique de son point de vue. Comme le révélait Arnaud Mercier dans un article paru en 2019, elle était largement influencée par l'opinion publique, répondant presque instantanément à un sondage du Cevipof en 2006 qui montrait que 60 % des Français considéraient les leaders politiques comme « plutôt corrompus ». C'est ce qui a alimenté le discours accusant la candidate de « démagogie anti-élitiste », même si elle avait défendu cette proposition bien avant la campagne présidentielle. La candidate justifiait cette « surveillance populaire » des actions des élus en disant : « Il n'y a pas d'évaluation à long terme" . Ainsi, son projet de démocratie participative demeurait vague malgré les détails apportés dans une note de Sophie Bouchet-Petersen transmise à la presse. Il s'agissait surtout, pour l'assistante de la candidate, de « renouveler la démocratie représentative », non pas de créer « un instrument punitif de coercition envers les élus », mais d' « élargir le cercle au-delà des professionnels de la participation (militants, couches moyennes diplômées) et d'incorporer les catégories normalement exclues des dispositifs de participation basés sur le volontariat (classes populaires, précaires, immigrés, femmes, jeunes) ». 

2007, une campagne participative 

Ségolène Royal - Campagne présidentielle 2007 (2ème tour) | Archive INA © INA Politique

Suite à sa désignation pour les présidentielles, Ségolène Royal a initié une campagne participative. Elle a redéfini la relation électorale, ne la présentant plus uniquement comme un échange unilatéral dans lequel l'électeur doit simplement approuver une offre politique prédéfinie. Au lieu de cela, elle a mis en avant l'idée que l'électeur co-produit cette offre et participe à sa définition. Lorsqu'elle lance des débats participatifs sur son programme présidentiel en 2007, la candidate suit un schéma précis : Ségolène Royal ne prend la parole qu'en introduction pendant quelques minutes pour cadrer le débat, puis elle écoute les témoignages et les analyses, tout en prenant des notes. Ces interventions proviennent d'experts, d'élus, de responsables associatifs, et plus marginalement de membres du public. La candidate clôt le débat en répondant aux questions, offrant ainsi l'occasion d'annoncer certaines de ses propositions. Commentant ce dispositif dans un article paru en 2019, Arnaud Mercier affirmait : « Ce mouvement rompt avec la tradition de la relation unilatérale entre les candidats et les électeurs, où ces derniers sont habituellement appelés à se prononcer sur une offre politique préconçue. Au lieu de cela, les électeurs sont maintenant invités à participer activement à la définition de cette offre. » Ainsi, le processus participatif lancé par le Parti Socialiste et sa candidate présidentielle a connu un succès en termes de participation, avec plus de 135 000 contributions provenant de Désirs d'Avenir et des 5 000 débats participatifs organisés à travers la France. Aujourd'hui, la candidate estime qu'environ 300 000 Français ont participé à ces débats sur lesquels des militants des Jeunes Socialistes souhaitent l'interroger. L'un d'entre eux, militant à Paris, souhaite s'exprimer sur le sujet : « J'ai 22 ans. Je suis entré au JS quand j'en avais 19. Donc, j'avais 5 ans en 2007. J'aimerais vraiment profiter des universités de Blois pour l'interroger sur les stratégies qu'elle avait établies pour modifier la vie interne de mon parti. » En effet, les journalistes politiques du Parisien révélaient hier que Ségolène Royal interviendra le 26 août au matin devant les Jeunes socialistes. L'après-midi, elle participera à une table ronde de l'Assemblée des femmes, avec Clémentine Autain et le premier adjoint à la mairie de Paris. Emmanuel Grégoire. Animée par l’ex députée PS Marie le Vern, l’échange porte un titre ironique : « Mais qui va garder les enfants ? Venez pour enfin le savoir. » « Cette formulation, indiquait Marcelo Wesfried, journaliste politique au Parisien, renvoie à la pique de Laurent Fabius, en 2007, quand la Poitevine s’était lancée à la course à l’investiture. Au menu : maternité, féminisme, manque d’accompagnement des jeunes mères. »  

2007 : Ségolène Royal en colère

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