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Billet de blog 30 août 2023

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Referendum : un dispositif peu efficace sous la cinquième république

Sous la 5ème république, le Conseil constitutionnel exerce un contrôle spécifique sur les référendums. Ce contrôle porte à la fois sur les signatures des parlementaires et sur la proposition de loi elle-même, bloquant parfois les initiatives démocratiques qu’Emmanuel Macron souhaite repenser en instaurant un « Prérérendum »

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Illustration 1

Le fonctionnement des referendums

L’article 11 de la Constitution française permet au président de soumettre tout projet législatif à référendum sur des thématiques précises, sans restreindre le nombre de textes débattus durant la consultation. Dans un premier temps, le conseil constitutionnel examine si le texte concerne « l'organisation des pouvoirs publics, des réformes liées à la politique économique, sociale ou environnementale du pays et les services publics y afférents » ou vise « à ratifier un traité ayant des implications sur le fonctionnement des institutions françaises, sans contredire la Constitution » (art. 11, al. 1er et 3). Le Conseil, ensuite, confirme que le projet ne propose pas la suppression d’une loi promulguée il y a moins d’un an (art. 11, al. 3). Il est aussi de son ressort de garantir la clarté de toute question référendaire. Un expert en droit public confie : « Avant le scrutin, le conseil constitutionnel s'assure que le texte est approuvé par un cinquième des parlementaires. Ce ratio est basé sur les sièges réellement occupés lors de l’enregistrement de la demande, arrondi au supérieur en cas de fraction. » Enfin, le conseil vérifie que le sujet du référendum diffère de tout autre rejeté par la population dans les deux années antérieures (art. 11, al. 5). À ce propos, notre expert évoque : « L’introduction des directives européennes refusées lors du référendum de 2005, puis par le traité de Lisbonne en 2007, suscite des interrogations. »

Quelle légitimité théorique pour les référendums ?

Vers plus de consultations citoyennes ? Avec Thierry Beaudet président du CESE © France Inter

Dans un essai intitulé Repoussons les frontières de la démocratie (Éditions De L’Aube, 2022), Thierry Beaudet, le président du CESE, souligne : « La représentation est essentielle à la démocratie, sans quoi elle serait une simple utopie. Le véritable pouvoir populaire nécessite des représentants élus. » Toutefois, une interrogation demeure : comment les citoyens évaluent les implications de cette délégation de pouvoir à des élus ? Vivons-nous une crise démocratique en France ? « Une fois la souveraineté concédée par le vote, rappelle Thierry Beaudet, elle n'est jamais pleinement restituée. » Comment alors remédier à notre crise démocratique et garantir une symbiose entre citoyens et élus, comme l’a envisagé Emmanuel Macron avec le grand débat national ? Par ailleurs, même si les textes législatifs sont essentiellement adoptés au Parlement, pour Thierry Beaudet, leur élaboration s'est déplacée ailleurs. En effet, il mentionne des espaces de débat comme les "Grenelle de l’environnement", les réseaux sociaux et les tribunaux qui influencent les lois et instaurent de nouvelles jurisprudences. Enfin, Thierry Beaudet suggère que « chaque loi devrait être co-conçue par divers acteurs, dont le juge constitutionnel et la société civile, pour être pertinente et efficiente. » « Bien que la démocratisation étatique soit noble, estime-t-il, elle est encore lacunaire. » Plus que renforcer la crédibilité des élus, il prône l'instauration et l'harmonisation de nouvelles formes de légitimités. « Fortifier la démocratisation sociétale est vital, insiste-t-il, pour qu’elle incarne ses intérêts, reflète une cohésion, montre une capacité d'auto-organisation et produise de nouvelles perspectives et accords. »

Deux quinquennats Macron où le peuple délibère peu

Au cours d'un dîner avec les hauts responsables de la majorité présidentielle, Emmanuel Macron a évoqué la perspective d'une nouvelle forme de référendum, distincte de l’article 11 de la constitution : le "préférendum". Le terme suggérerait une variante de consultation citoyenne, comme l'avait proposé l'association Mieux Voter en 2019. Selon leur méthode, le « jugement majoritaire », les citoyens évalueraient les options via des gradations telles que « excellent », « bien », « passable », « insuffisant », « à rejeter ». Cette démarche pourrait métamorphoser le débat pré-référendaire, le rendant moins sujet aux manipulations et à la dichotomie. Comme l'ont rapporté les journalistes du Figaro, Macron a indiqué que cette consultation nouvelle pourrait remédier au défi posé par les dix référendums depuis 1958, focalisés chacun sur un unique sujet. Thierry Beaudet, dans son dernier ouvrage, exposait : « La tension entre démocratie directe et représentative est un dilemme constant en démocratie. C'est ce hiatus qui engendre des critiques fréquentes des représentants, jugés peu légitimes ou non représentatifs, et perçus comme une élite cachée. » Cette dualité est aussi pourquoi des entités comme La France Insoumise envisagent un mandat révocatoire ou un référendum d'initiative citoyenne pour contrebalancer l'autorité des élus. Thierry Beaudet présente deux extrémités possibles : « D'un côté, une oligarchie masquée sous un vernis démocratique où le citoyen se limite à choisir entre élites ; de l'autre, une tyrannie majoritaire ou une autocratie en guise de peuple, à l'image des tragédies des régimes du XXe siècle. » Malgré six ans à la présidence, Macron peine encore à concrétiser un référendum réussi.

Une opposition sceptique face au projet de réfendum

Bien que bon nombre de ces cadres aient désapprouvé cette proposition, Yaël Braun-Pivet, à la tête de l’Assemblée nationale, a exprimé son intérêt pour un référendum concernant le service national universel (SNU) et les questions de fin de vie. Néanmoins, malgré ses multiples évocations du recours au référendum depuis son avènement au pouvoir, Macron n'a jamais transformé cette promesse en acte. Sa convention citoyenne, comprenant 150 citoyens sélectionnés aléatoirement afin de miroiter la pluralité française, n'a pas pu mettre en avant les mesures préférées du public. En juin 2020, 149 suggestions furent déposées, mais seulement un tiers d’entre elles ont trouvé écho en politique. Un expert de la constitution française avance : « Pour revitaliser la démocratie participative en concertation avec les chefs de groupes politiques, Emmanuel Macron doit revoir sa méthode. » Même si la convention citoyenne post Gilets-Jaunes envisageait une participation publique à divers stades de la création législative, en France, le pouvoir de décision, d’un point de vue juridique, reste l'apanage des élus bénéficiant uniquement du vote populaire. Thierry Beaudet note : « Si les élections enregistrent périodiquement les orientations politiques individuelles, elles n’appréhendent pas ce rythme constant de la société civile structurée et ne traduisent pas ces initiatives communes qui, en réalité, dessinent et dynamisent une nation. » Pour conclure, la société civile demeure le porte-parole constant de la communauté. 

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