Le 1er janvier 2014 s'est ouvert à Lima une nième conférence sur le climat.
Il est maintenant acquis pour tout le monde, même pour les plus sceptiques, que le dérèglement climatique est une réalité et qu’il a pour cause l’activité humaine. (voir les rapports du GIEC)
Mais nos décideurs de tout bord, conseillés par les plus fins analystes économiques n’en démordent pas: il faut relancer la croissance, coûte que coûte .pour redynamiser l’activité, l’investissement, diminuer le chômage, etc.
Or, plus de croissance signifie globalement plus de gaz à effet de serre. (Pour ceux qui défendraient une croissance des services, en apparence plus « verts », rappelons l’empreinte carbone monstrueuse des data centers…)
Pourquoi un tel jusqu’auboutisme, un tel aveuglement?
Passons sur les intérêts des élites à freiner des quatre fers quand il s’agit de changer un système profitable.
Passons sur le conditionnement généralisé, depuis les années 80 et la chute du modèle antagoniste communiste, qui décrète qu’il n’y a plus d’alternative au capitalisme libéral ; la soi-disante disparition des idéologies.
Passons sur le court-termisme imposé par les mass-médias, qui est devenu celui des hommes politiques et des consommateurs.
Passons, pas trop vite, sur la concurrence mondialisée où chaque économie nationale est liée au reste du monde, dans leur succès ou dans leur chute, mais aussi où les défaillances des uns font les réussites des autres.
Nous croyons qu’une des simples raisons à cette course à la croissance est peut-être à chercher dans la dure réalité de la vie. Expliquons vite avant de faire venir les sarcasmes ou les sanglots: C’est maintenant que les chômeurs ont besoin de travailler, pour manger, se vêtir, se loger… pas dans un futur plus ou moins lointain. C’est maintenant qu’il faut approvisionner les stations services, les supermarchés, les centrales, les usines…pas demain. Sinon tout s‘arrête.
Donc, il est urgent d’attendre? Et pendant ce temps, la température moyenne du globe augmente.
Alors face aux bons soldats économistes, responsables et pragmatiques, se souciant davantage d’aujourd’hui que de demain, les doux rêveurs utopistes ont leur rôle à jouer. Vous riez?
Dans un système dont les rouages sont tellement complexes parce que mondialisé (il n’y a qu’a voir les algorithmes des produits financiers), dans un système finalement fragile parce que géré « à flux tendus » (l’autonomie alimentaire des grandes métropoles ne dépassent pas quelques jours…), dans un système tellement absurde (des jeans qui parcourent une fois et demi le tour de la terre avant d’être porté …), et si inégalitaire (1% qui détient 99% des richesses), écoutons les poètes qui chantent le nous, le vieux, le lent, le silence, la sobriété, la nature …
Exemple de proposition utopique opposée à cette course folle, qui mène l’humanité à sa perte: la formidable explosion de la productivité de la 2ème moitié du XXème siècle n’aurait-elle pas pu servir à une diminution conséquente du temps de travail?
Produire, produire, produire ou consacrer plus de temps à vivre ensemble, se cultiver, s’éduquer, se nourrir sainement et localement, recycler des vieux objets… A côté de la frénésie permanente et destructrice de la surconsommation, cette proposition apparaît plutôt sage. Non?
Face à l’orthodoxie bien pensante, pensée unique libérale « économiquement correcte », ces chantres de l’utopie font figure de désobéisseurs civiques qui opposent à la raison économique une raison supérieure, à la hauteur des enjeux environnementales et climatiques.
« le cynisme consiste à voir les choses telles qu’elles sont et non telles qu’elles devraient être. » Oscar Wilde.
Thierry moulun.