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Billet de blog 24 août 2020

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LE BLOG DE L’ICONOCLASTE – Épisode n°17

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Pour cet avant-dernier blog de l’été, j’ai imaginé que Karine Lemarchand quitte un moment ses amis agriculteurs et devienne l’interviewée pour nous décrypter l’actualité et nous expliquer si le bonheur est vraiment dans le pré…

KARINE SE LACHE …

Avec le déconfinement, peux-t’on dire que « le bonheur est dans le pré » ?

Sans aucun doute. Nous avons déjà subi au fil des siècles des crises économiques, sociales et mondiales plus de nombreuses pandémies, guerres et le terrorisme … mais le conconvirus fait peur car on ne sait toujours rien sur lui. On est sorti du premier pic mais une rechute pèse sur nous comme une épée de Damoclès. L’épidémie semble repartir dans certains pays y compris en France et, les indicateurs sont inquiétants. Je préfère mes paysans aux scientifiques et politiques qui nous … dirigent !

Avez-vous peur d’une deuxième vague ?

La réponse est « oui ». Je pense que l’on devrait tester les 67 millions de français ! Où sont passés les 700.000 tests hebdomadaires prévus en mai alors que l’on fait actuellement 500.000 tests par semaine pour un résultat à la fois insuffisant et tardif : une semaine d’attente pour les résultats. Ces tests sont-ils fiables ? L’État nous dit que la France sera prête en cas de seconde vague à la rentrée mais on peut en douter : Parole, parole, parole, … Où sont les actes ? Il existe encore de nombreuses incertitudes et une réelle inquiétude de la population !

Comment avez-vous vécu le confinement ?

Avec le confinement, pour pallier la mise en pause des émissions télé, j’ai réalisé des “Live Love“ depuis mon appartement parisien où je donnais des rendez-vous tous les soirs en direct. À la demande d’un internaute, j’ai fait visiter mon “chez moi“. Et à la remarque d’un invité : « Karine vit dans un palace ! » ; je lui ai alors répondu que c'est mon espace de travail car ce grand appartement abrite les bureaux de ma boite de production “Potiche Prod“ fondée en 2000. Le 3 mai dernier, j’ai également participé au live organisé par le compte Instagram du mémorial de la Shoah car il est "très important" d'effectuer ce “devoir de mémoire“.

Êtes-vous d’accord sur le fait que le confinement aurait rendu les femmes malheureuses de ne pouvoir se rendre chez le coiffeur et chez l’éthicienne ?

Pour la plupart mais j’ai lu qu’un collectif féministe baptisé « liberté, pilosité, sororité », veut libérer les poils des femmes : « La pilosité est une partie normale du corps féminin et, le dégoût qu’elle suscite n’est que la manifestation d’une profonde misogynie. » Elles poursuivent : « il faut anticiper, penser à s’épiler ou à se raser avant d’aller à la piscine ou à un rendez-vous amoureux. » Leur définition d’une femme libre serait-il synonyme de poilue, sans maquillage, sans permanente, sans parfum, sans bijou, sans vêtement sexy et … sans homme (?). En tous cas, ce groupe féministe n’a pas dû trop souffrir du confinement et a eu tout le loisir d’entretenir leurs poils et leur toison.

En tant que femme et que noire, avez-vous été victime du racisme ?

J’ai été effectivement victime de discrimination au début de ma carrière. Mon poste d'animatrice dans l'émission "Les Maternelles" avait été mis sur la sellette à cause de ma couleur de peau. J'ai su après que les producteurs s'étaient posés la question de savoir si ce n’était pas “segmentant“ mais ils ont finalement jugé que non et ils m'ont prise … 

Si la France de Vichy était antisémite, je ne crois pas que la France du XXI siècle soit raciste. Tous les français ont les mêmes droits mais pour paraphraser l’écrivain Georges Orwell : « Nous sommes tous égaux mais certains sont plus égaux que d’autres ! » Je me rappelle quand je vivais avec Lillian Thuram ; il me racontait avoir subi des quolibets et des cris de singe de la part de soi-disant supporters de football. Hélas, il y a tellement de cons en France que j’ai l’impression que ceux de l’année prochaine sont déjà là !

Comment jugez-vous les mouvements féministes, apparus depuis l’affaire Weinstein ?

Pour en revenir à ce mouvement “pro-poil », savez-vous que le mot sororité qui vient de soror, signifie sœur et il apparait au Moyen-âge pour désigner des congrégations religieuses exclusivement composées de femmes. Plus tard, des veuves ont reproduit le modèle de ces communautés non-mixtes. Ce fut le cas des “Béguines“ afin d’échapper au (re)mariage imposé par leurs familles. La notion de sororité réapparait à la fin du XIXème siècle, dans les universités américaines, fortes d’une tradition de « confréries » d’étudiants où l’on tissait son réseau et où les filles qui arrivaient dans l’enseignement supérieur, n’étaient pas admises dans ces clubs. Dans les années 1970, la question des groupes non-mixtes est à l’agenda du mouvement féministe qui discutent des asymétries de traitement entre femmes et hommes et, luttent contre le plafond de verre, en défendant l’égalité de potentiel des femmes et des hommes !

Et les mouvements #Metoo et #Iwas seraient-ils leurs dignes héritières ?

Ce sont des réactions féminines, légitimes contre les harcèlements sexuel et textuel, contre toutes les violences faites aux femmes. Soit en France, 9 viols par heure soit 206 viols par jour et 75.000 par an pour seulement 18.000 déclarés et à peine 2.200 jugés en cour d’assises pour 1.000 personnes condamnées … Depuis le 1er janvier 2020, 57.974 jeunes filles et femmes ont été abusées ! Sans oublier que l’an dernier, 125 épouses et concubines sont mortes, tuées sous les coups de leur mari ou ami. Or à notre époque, la vie d’une femme est toujours soumise au machisme ambiant : je suis belle et j’ai réussi, donc, j’ai dû coucher ! La lutte pour l’égalité mettra encore du temps, hélas. De nos jours, il faudrait de vraies figures du féminisme comme la regrettée Gisèle Halimi … et non des orthodoxes comme Caroline de Haas qui combat l’Homme et non les dérives du machisme et de l’ancien monde patriarcal !

Concernant le féminisme, cause nationale, êtes-vous critique ou non envers M. Darmanin ?

Je suis très méfiante vis-à-vis des manifestations populaires et par voie de conséquences des “jugements de rue“ … Le temps de la Justice n’est pas celui des médias et, ce n’est surtout pas réagir par rapport à l’actualité ! De plus, condamner publiquement un homme qui de plus, n’est pas mis en examen me semble « excessif » ! La présomption d’innocence reste aussi valable pour un ministre, n’en déplaise au nouvel inquisiteur Edwy Plenel qui pense que l’on utilise de manière très déformée la présomption d’innocence. Pour lui, au nom du droit de savoir ; il faut s’autoriser à juger un politique car explique-t-il, ils existent des charges … et donc des faits. Or ces derniers peuvent être déformés par les partis adverses et la plaignante… Je ne suis ni procureur, ni jurée ; aussi j’attends d’abord qu’un magistrat décide ou non de poursuivre et ensuite qu’il y ait procès, débat, plaidoirie et jugement … et pas l’inverse ! Voyez ce qui s’est passé avec mon ami, le trompettiste Ibrahim Maalouf, innocenté … au bout de trois ans et demi, dans un silence médiatique assourdissant !

Est-il vrai que certaines ont réussi et gravi l’échelon social parce que femme ?

Et alors ! Les femmes doivent se battre davantage que les autres et avec leurs propres armes ; la séduction en fait partie ! Blanche Gardin s’en est d’ailleurs amusée lors de la cérémonie des Molières en 2019 : « A-t-on encore le droit de coucher pour avoir les rôles ? Sinon, il faudra apprendre des textes, passer des castings, et on n’a pas le temps ! » Les femmes représentent plus de la moitié de la population (55%) ; c’est normal qu’il y ait la parité au gouvernement !

Justement, quel est votre avis sur la nouvelle ministre de la Culture ?

C’est une ancienne collègue que j’ai croisée durant huit ans, aussi bien sur les plateaux de télévision que dans les studios de radio … et je ne jugerai sa crédibilité que sur son action ! Un journaliste m’a posé la question si j’accepterais d’être nommée ministre de l'Agriculture dans un futur gouvernement et je lui ai répondu : « Je ne pense pas que je serais à ma place ... pour le moment, en tout cas. »

Et à part Madame Bachelotte, que vous inspire le nouveau gouvernement ?

Que je préfère être à ma place. Se lancer dans une carrière politique, c’est se mettre sous les feux des projecteurs et ne plus avoir de vie privée quitte à s’exposer, pour certains, au scandale tant pour le politique que pour sa famille. Je pense par exemple à l’ancien candidat Benjamin Grivois … dont la femme et les enfants ont dû également souffrir des conséquences.

Et je me demande si les Français, héritiers des irréductibles gaulois, sont gouvernables ? En tous cas, ils dénigrent sans cesse le gouvernement et la majorité, manifestent régulièrement et portent même plainte contre l’État pour sa gestion du conconvirus ! Un sondage européen de l’après crise expliquent que les Français sont les plus inquiets et ceux qui ont le moins confiance en leurs dirigeants. En France, 72% des sondés s’estiment insatisfaits de l’action de leur gouvernement pour 45% en Italie et 30% en Espagne.

Et votre avis sur les autres ministres ?

On reprend les mêmes et on recommence avec quelques changements de portefeuilles plus des nouvelles têtes pour faire moderne. L’ours Dupont-Moretti dans le rôle du grand méchant ; le palois Bayrou dans un poste plan-plan, le tour de passe-passe du jeune Denormandie de l’architecture à l’agriculture, … Rien de nouveau sous le soleil …

Êtes-vous critique envers le (nouveau) gouvernement du Président Macron ?

Pas du tout car le gouvernement a décidé de sauver des vies même si le conconvirus en a tué plus de 30.000. Qu’aurait dit l’opposition si Macron avait au contraire, décidé de sacrifier les plus de 70 ans qui coutent cher en santé et en retraite ! Je ne souhaite pas jouer les oiseaux de mauvais augure. Je préfère le bon sens terrien aux élucubrations négatives de bobos parisiens … Je préfère mes amis agriculteurs aux politiques avec tous ces faucons qui critiquent « systématiquement » le gouvernement mais, sans faire de propositions sérieuses.

Que pensez-vous de l’écologie qui a fait une percée remarquée lors des municipales ?

Nous devons TOUS faire des efforts au quotidien. Des petits pas qui mis bout à bout peuvent faire du bien à notre planète. Mais je refuse de culpabiliser les fumeurs, les agriculteurs, les propriétaires de diesel … Le nouveau gouvernement vient de décider de verser des primes pour isoler les maisons, pour faciliter l’achat de véhicule hybride ou électrique, et d’enclencher un vaste programme de rénovation thermique dans les écoles, collèges et lycées. Et comme l’a dit le Président, je crois à l’écologie “du mieux“ et non “du moins“ et, surtout pas punitive. Ensembles, on peut créer une économie verte et vertueuse !

Êtes-vous favorable au référendum ?

Je trouve que l’on vote déjà beaucoup trop. Chaque année, une élection ! Et on ne sait pas toujours pourquoi on vote car il n’y a plus d’instruction civique à l’école et c’est dommage ! Combien de français font la différence entre un conseiller municipal, un conseiller général ou un conseiller régional et savent quelles sont leurs prérogatives respectives ? Curieusement, les français pensent que l’État impose les réformes malgré eux et souvent, ils croient que l’on gouverne contre eux. Ce sont d’incroyables pessimistes qui n’ont pas confiance en leurs dirigeants, de vrais gaulois réfractaires. Pour moi, ce sont … des italiens tristes …

Qu’est-ce qui vous mets en colère ?

Je suis vraiment agacée par "l'agribashing". C'est très bien qu'on impose des normes, qu'on essaye de manger plus sainement et bio, qu'on essaye d'interdire les pesticides ... Mais on ne peut pas demander aux agriculteurs de revenir à la charrue alors que les patrons d'industries agroalimentaires partent en jet privé en vacances !

Avez-vous peur pour l’avenir de vos enfants ?

Je ne lis pas dans le marc de café. On ne sait rien de ce conconvirus. Je sais que nos grands-parents ont vécu et subi la (vraie) guerre. Aujourd’hui, l’après-crise sera plus facile à vivre que l’après-guerre. Si l’activité n’est pas encore revenue à son niveau de l’an dernier ; je souhaite que nous tous réussissions … malgré les difficultés. Cessons d’avoir peur que le ciel nous tombe sur la tête !

Et pour conclure ?

De bonnes fins de vacances à toutes et à tous … Une rentrée sans trop de tourments … et que les français et les françaises n’oublient pas que l’amour est dans le pré …

Karine Le Marchand est née Mfayokurera, le 16 août 1968 à Nancy, de l’union d’un mère française originaire de Lorraine et d'un père natif du Burundi qui a quitté la maison un an plus tard. Elle pratique avec sa sœur Agnès, la harpe et la flute traversière au conservatoire régional de Nancy. Avant de devenir animatrice télé, cette belle et grande adolescente : 1,74 m, devient mannequin. Ce qui la mène à RMC où elle prend comme pseudo, le nom de son copain de l’époque : Lemarchand. Puis elle anime en 1998, “Musique, musiques“ sur France 3 avant de rejoindre durant 10 ans TV5 puis France 5 où elle remplace Maïtena Biraben aux “Maternelles“ qu’elle présente durant cinq années. Ensuite, elle rentre à M6 qui lui confie « L’amour est dans le pré » mais aussi « C’est ma vie ! » ; « On ne choisit pas ses voisins » ; une émission politique « Une ambition intime » et pour cette rentrée, elle prendra les rênes de l’émission : « La France a un incroyable talent. »

En 2013, Karine Le Marchand, alors animatrice de « L’amour est dans le pré. » reçoit la croix de chevalier dans l’ordre du Mérite agricole des mains du Ministre, pour sa contribution à remettre les agriculteurs au cœur de la société.

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