Il peut prendre différentes formes, impliquer plusieurs parties et servir des objectifs divers, selon le contexte géographique, socio-économique et politique. La complexité du problème rend sa définition et son analyse difficiles, et la production scientifique sur le sujet reste rare. Le manque de connaissances largement diffusées sur les tendances actuelles du trafic illicite d’art et d’antiquités est l’un des obstacles à la lutte efficace contre ce commerce illégal spécifique.
Le visage commun du trafiquant illicite typique est très éloigné du mythe du gentleman voleur d'art perpétué dans les livres et les films. Des touristes naïfs aux collectionneurs privés sans scrupules, ceux qui sont impliqués dans le trafic illicite ne peuvent pas être regroupés sous une seule rubrique. Les aspects multiformes du trafic illicite de biens culturels impliquent qu'il existe divers profils, motifs et finalités pour les personnes qui alimentent ces activités illégales, qu'il s'agisse de voleurs, d'intermédiaires ou d'acheteurs. En outre, les sanctions clémentes appliquées au trafic illicite rendent cette activité attrayante pour un large éventail de « criminels ». Les vols d'objets ont lieu dans une grande variété d'endroits et de pays, et ces mêmes objets peuvent être vendus sur diverses plateformes et dans différentes parties du monde en fonction des tendances actuelles du marché. Des sites aux musées en passant par les églises, des pays occidentaux aux pays du Moyen-Orient et de l'Est, les marchés et les pays d'origine varient et évoluent dans le temps et les événements. La diversité des contextes dans lesquels un bien culturel est volé, pillé, vendu ou exporté illégalement implique une variation du mode opératoire, depuis le déplacement de l'objet jusqu'à sa destination finale.
L'office central de lutte contre le trafic de biens culturels (OCBC)
L 'OCBC est l’organisme de police Français compétent pour traiter le vol et / ou la réception de biens volés ayant une valeur artistique ou historique liée au patrimoine culturel, mais également en matière de contrefaçons d'œuvres d'art. Il est chargé de mener des activités préventives ainsi que de la formation et de la sensibilisation, et de coopérer avec les organisations internationales telles que INTERPOL, l'UNESCO et d'autres forces de police.
Rôle de l’OCBC
Au niveau national, de nombreuses exigences dépendent en fait de la bonne volonté des gouvernements. La ratification et la mise en œuvre des instruments juridiques internationaux est la première d'entre elles et implique le renforcement des législations nationales, mais aussi :
- La définition de bien culturel national
- L’exigences légales pour l'importation, l'exportation et le transfert de propriété de biens culturels (certificats d'exportation, registres des marchands d'art et d'antiquités, etc.)
- La définition et mise en place de procédures strictes de due diligence pour l'acquisition d'objets culturels
- La Mise en place de sanctions en cas de violation de la législation nationale
- La transposition des règles déontologiques professionnelles dans les lois nationales
- L’établissement et mise à jour des inventaires nationaux
- Le développement des institutions de conservation
- La supervision des fouilles archéologiques et promotion de la recherche scientifique connexe
- L’établissement de règles éthiques pour les professionnels de l'art et du patrimoine, y compris le marché de l'art
- La sensibilisation du public
Partenaires internationaux
De nombreux États parties à la Convention de 1970 ont créé des unités de police spécialisées pour prévenir et lutter contre le trafic illicite de biens culturels. Ces organismes et unités de police spécialisées jouent également un rôle crucial, en créant un réseau international dans la récupération des biens culturels volés ou perdus et leur retour dans leur lieu d'origine.
INTERPOL
INTERPOL, en particulier son unité des œuvres d'art, fournit des outils pour faciliter l'échange mondial d'informations entre les forces de police sur les délits impliquant des œuvres d'art, les détails des œuvres d'art et les criminels impliqués. INTERPOL sert de référentiel central pour ces données, fournissant une analyse pour identifier les tendances émergentes dans les vols d'art tels que la prolifération des œuvres contrefaites ou l'utilisation d'Internet pour vendre des œuvres de provenance douteuse.
UNESCO
L'UNESCO a élaboré différents traités pour lutter contre ce phénomène répréhensible qui peut se produire dans différents contextes : la Convention de La Haye pour la protection des biens culturels en cas de conflit armé (1954) et ses deux protocoles (1954 et 1999) et la Convention de l' UNESCO sur les moyens d'interdire et de prévenir l'importation, l'exportation et le transfert de propriété illicites des biens culturels (1970). Ce dernier a été complété par la Convention d'UNIDROIT (Institut international pour l'unification du droit privé) sur les biens culturels volés ou illicitement exportés en 1995, et les deux fonctionnent en temps de paix. La Convention sur la protection du patrimoine culturel subaquatique (2001), La Convention pour la sauvegarde du patrimoine culturel immatériel (2003) et la Convention sur la protection et la promotion de la diversité des expressions culturelles (2005) jouent également un rôle important dans la protection du patrimoine culturel dans toutes ses dimensions. Au niveau de l'action diplomatique et des « bons offices », un Comité intergouvernemental pour la promotion du retour des biens culturels dans leur pays d'origine ou de leur restitution en cas d'appropriation illicite a été créé pour traiter des cas plus exceptionnels généralement hors du champ d'application de ces accords internationaux.
CARABINIERI
Le « Département des Carabiniers pour la protection du patrimoine culturel » en Italie est une unité de police spécialisée fonctionnellement dépendante du ministère de la Culture. Le Département est chargé de la protection des biens culturels nationaux par la prévention et la répression des activités criminelles, la récupération des objets culturels pillés grâce à la coopération avec des organisations internationales telles que l'UNESCO et d'autres forces de police.
GUARDIA CIVIL
L'équipe du patrimoine de l'unité opérationnelle centrale de la GUARDIA CIVIL est chargée d'enquêter sur tout crime contre les biens culturels, y compris en ce qui concerne le vol d'art, le pillage et le trafic illicite de biens culturels, la fraude aux œuvres d'art et les contrefaçons. L'équipe du patrimoine coopère directement avec le ministère espagnol de la culture et d'autres autorités départementales compétentes chargées de protéger le patrimoine espagnol, ainsi que de coordonner avec d'autres forces de police spécialisées d'autres pays.
Le trafic illicite de biens culturels sur Internet
Le trafic illicite des biens culturels est une question très importante et, à ce titre, il fait régulièrement l'objet de recommandations adoptées lors des réunions du Groupe d'experts INTERPOL (GEI) sur les biens culturels volés, auxquelles l'UNESCO et les membres des polices nationales spécialisées participent. La nécessité de créer un comité d'experts chargé des biens culturels volés est apparue après la destruction des bouddhas de Bamyan en 2001 et le pillage du Musée national d'Iraq à Bagdad en 2003. Une étude d'INTERPOL sur l'utilisation d'Internet dans la vente de biens culturels a souligné les énormes difficultés auxquelles sont confrontées les autorités dans ce domaine. Ces difficultés sont également mentionnées dans un document élaboré par l'UNESCO, en étroite collaboration avec INTERPOL et l'ICOM, pour conseiller ses États membres sur les " Actions de base concernant les objets culturels proposés à la vente sur Internet " . Ce document énumère un certain nombre de raisons pour lesquelles la surveillance du trafic de biens culturels sur Internet est si difficile :
- Le volume et la diversité des articles proposés à la vente ;
- La diversité des lieux ou des plateformes de vente d'objets culturels sur Internet ;
- Les informations manquantes qui empêchent une bonne identification des objets ;
- Le temps de réaction limité disponible en raison de courtes périodes d'enchères lors d'une vente ;
- La situation juridique des sociétés, entités ou individus servant de plates-formes pour le commerce d'objets culturels sur Internet ;
- Les questions complexes liées à la juridiction concernant ces ventes ;
- Le fait que les objets vendus se trouvent souvent dans un pays différent de celui de la plateforme Internet.
Reconnaissant les difficultés rencontrées par les services répressifs pour répondre à la vente croissante de biens culturels par Internet, INTERPOL, l'UNESCO et l'ICOM élaborent et diffusent à leurs pays membres respectifs une liste commune des actions de base recommandées pour lutter contre augmentation de la vente illicite d’objets culturels sur Internet ". Cela a conduit à l'élaboration de la liste des " Actions de base concernant les objets culturels proposés à la vente sur Internet ".
La plupart des mesures ont été prises en partenariat avec eBay. eBay compte 83,9 millions d'utilisateurs actifs dans le monde et 8,29 millions de nouveaux objets sont mis en vente chaque jour sur le site Web d'eBay. L'un des principaux objectifs d'eBay est de maintenir la confiance sur le marché et de fournir une plateforme sûre et efficace. Il existe des règles imposées par eBay destinées à garantir la légalité de tous les échanges qui ont lieu sur la plateforme. Par exemple, il y aura des messages d'avertissement, selon la catégorie de l'objet, conseillant aux vendeurs de se conformer à la loi et les avertissant des procédures judiciaires qui peuvent être menées en cas de violation des règles. eBay coopère également avec certaines autorités nationales pour lutter contre le trafic illicite de biens culturels. En France, eBay a construit une interface que l'OCBC peut utiliser pour rechercher des biens volés et des objets qui seraient mis en vente en ligne. Ainsi, les agents OCBC peuvent utiliser cet outil au cours de leurs enquêtes. De plus, eBay transfère régulièrement des données à l'OCBC pour des vérifications plus approfondies.
Les travaux de l’OCBC dans le secteur se poursuivront, principalement grâce à la coopération entre les organisations internationales sur le terrain et aux opérations de collecte d'informations. Internet est un outil précieux pour les trafiquants, ce qui rend le trafic illicite de biens culturels plus rapide, plus facile et plus difficile à combattre pour les autorités. Cependant, Internet peut également être utilisé contre les trafiquants. INTERPOL a développé une base de données sur les œuvres d'art volées, accessible aux services spécialisés et aux particuliers qui ont demandé une autorisation spéciale. Les forces de police nationales ont également développé des bases de données similaires, comme TREIMA pour l'OCBC en France. De même, en France, un réseau privé de compagnies d'assurance, connu sous le nom d'Argos, utilise une base de données avec les données fournies par les compagnies d'assurance et un logiciel (robot d'indexation) qui permet de récupérer des images sur Internet et de traiter les informations ainsi récupérées.