Depuis Parcelse il était clairement accepté par tous que "c'est la dose qui fait le poison". Nous sommes revenus à plus de clairvoyance en reconnaissant que de multiples facteurs environnementaux (pesticides, polluants divers, autres médicaments consommés, etc) ou héréditaires pouvaient interférer avec celui-ci, contribuant ainsi à des effets indésirables bien plus nombreux qu'attendus. Vous pouvez à bon droit vous interroger sur le rapport existant entre ce constat, et l'aval de plus en plus inquiétant apporté par une large partie du public pour les "idées" défendues par le Front National. Ce rapport analogique existe pourtant et je vais tenter de le justifier. Parti de rien ou de pas grand chose à son origine (agrégat de conservateurs et de nostalgiques de Déroulède ou du pétainisme), ce parti s'est trouvé au fil du temps des alliés de circonstance et un électorat qui n'a plus rien de marginal. De plus son corpus idéologique a diffusé ses toxines au sein du corps social, rongé par la crise, le mal être et le manque de réponses claires et identifiables pour y remédier. Les fantasmes et les peurs irrationnelles ont constitué un terreau favorable à son enracinement. Notre "matière noire"constituée d'une accumulation d'ambitions contrariées, de rancoeurs et du manque d'analyses objectives, avait jadis des barrières qui endiguaient au plus profond de nous cette part d'ombre, tant que rien ne permettait de la voir prospérer (à défaut de la combattre). Nous n'en sommes plus là en raison d'un "ripolinage" de façade des fondamentaux, du changement de génération survenu au sein du FN, et pour tout aggraver de la complicité d'une classe politique et médiatique qui ont rendu possible que ces idées (antithèse de notre devise nationale, sans parler de la xénophobie et j'en passe) ne choquent plus grand monde et soient même clairement assumées par des gens que nous croisons tous les jours.
"Le Front National donne de mauvaises réponses à de bonnes questions", dixit une intervention récente de Claude Guéant, vingt ans après la même "antienne" proférée mot pour mot par Laurent Fabius, voilà bien de quoi brouiller les lignes et accroître la crise morale. La confusion prospère pour des motifs pas toujours avouables et permet au Front National de passer pour un parti comme tant d'autres, favorisant ainsi son insertion dans le champ des "partis respectables." Par charité je passe sous silence les noms d'élus prêts à tout pour perdurer et la reprise de tout ou partie du fonds par des hommes politiques peu regardants sur les principes, ou en mal d'idées personnelles. Ainsi flattés dans le sens du poil, les cadres du Front doivent jubiler, leurs fondamentaux sont légitimés, même s'il y a juste quelques réserves de façade sur les solutions qu'ils proposent au "bon peuple". Les digues qui contenaient notre "matière noire" ont bel et bien cédées et je ne vois qu'un sursaut vraiment républicain pour remédier en luttant pied à pied "contre ce mal sournois qui répand la terreur". Le vivre ensemble sur des bases humanistes n'aura de réalité qu'en refusant avec la plus totale énergie de partager le brouet mortifère qui nous est servi par tous ces adeptes (du FN mais pas que..), qui flattent et confortent de si mauvais instincts, par un ajout massif de "poison". Ne lachons rien pendant qu'il est encore temps, en dépit de la confusion constatée au sein des partis et du mélange des genres, tous deux particulièrement nocifs. Sachons enfin trier le bon grain de l'ivraie ! Républicainement vôtre.
P. Thomas