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Billet de blog 13 septembre 2016

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Le Hitler Vert : bientôt l'ecofascisme ?

Le prochain totalitarisme sera-t-il un écofascisme ? D’ici 2100, face aux bouleversements climatiques et à la destruction de leur mode de vie, les peuples céderont-ils à la panique, jusqu’à placer leur avenir entre les mains d’un Hitler vert ?

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Dès les premières minutes de la Comédie grinçante de David Wnendt « Il est de retour », inspirée du roman de Timur Vermes imaginant le réveil d'Adolf Hitler 70 ans après sa défaite, le führer déclare : « je m'allierai plutôt aux verts […]. Protéger l'environnement, ça revient à protéger la Patrie ».

Ce choix n'a rien de fortuit, car tout porte à croire que le prochain totalitarisme sera un écofascisme.

Illustration 1

Eux ou nous

Dans Black Earth : The Holocaust as History and Warning, l'historien Timothy Snyder suggère qu'Hitler justifia l’holocauste « en présentant les Juifs comme une anomalie écologique responsable de la disharmonie de la planète ».

Or, si, d'ici 2060 à 2100, les bouleversements climatique et alimentaire, annoncés par le GIEC et quelques climato-catastrophistes, venaient à se réaliser, il n'est pas impensable qu'une majorité de citoyens adhèrent à l'idée qu'un génocide soit une solution acceptable à leurs maux... et qu'un futur Hitler ne parvienne à les en convaincre.

Si celui-ci est occidental, il visera la Chine ou l'Inde, déjà montrés du doigt comme « les plus gros pollueurs de la planète ». S'il vient du Sud, il visera l'Occident, son impérialisme productif, son way of lifehyper-consummériste et affirmera que « les vrais pollueurs doivent payer ». À l'instar de la Wehrmacht, qui se donna pour slogan « le Russe [ou le Juif] doit mourir, afin que nous vivions », le nouveau fascisme dira « l'Occident (ou l'Asie) doit mourir, afin que nous survivions ».

Le risque est bien qu'un État, doté d'une grande puissance militaire, ne cède à la panique écologique, comme le fit l'Allemagne hitlérienne. N'oublions pas que la Chine des années 2010, comme l'Allemagne des années 30, étant incapable de nourrir sa population avec ses seules ressources, se trouve dépendante de la conjoncture internationale. Ce contexte rend la population chinoise perméable à l'idée de « Lebensraum ». Les récentes tensions sino-japonaises, sur fond de reconquête de territoires, en attestent. Désormais, écrit Timothy Snyder dans le New-York Times, « le gouvernement chinois doit compenser la mémoire de famines endémiques encore proches par la promesse de toujours plus de prospérité, tout en affrontant des conditions environnementales en constante dégradation ».

Dans tous les cas, ce néo-éco-nazisme défendra une « écologie réactionnaire ». L'historien Peter Staudenmaier trace les contours de cette idéologie dans « Ecofascism, Lessons from the German experience » (1996). Un mélange de nationalisme et de rejet de la modernité industrielle et urbaine, confinant à l'obsession d'un retour à la nature. Une forme de populisme mystique, donnant naissance, en 1895, aux Wandervögel, une sorte de communauté hippie, l'amour universel en moins.

Car cette autre « écologie » – on doit d'ailleurs ce terme à un zoologiste raciste et antisémite allemand du nom de Ernst Haeckel – est profondément eugéniste. Le raisonnement est implacable : notre sur-nombre détruit la planète et épuise ses ressources. Pour préserver notre « espace vital », notre « biotope », nous devons réduire la population. Un génocide s'impose. Comment distinguer ceux qui seront épargnés ? La génétique. En 1920, les partisans du darwinisme social parlaient de « pureté de la race », en 2020, les écofascistes parleront de « performance génétique ». Déjà, le biologiste Jacques Testart, premier bébé-éprouvette et proche de José Bové, considère que seule la décroissance économique et technologique pourra éviter, dans un futur proche, le recours systématique à la sélection génétique.

On voit que le basculement de l'amour de la nature vers une doctrine de mort tient en quelques principes simples. Une fois l'homme réduit à un « élément de la chaîne de la vie », le poids de sa vie n'est pas plus important que celui d'un animal. Quand les lois sont dictées par et pour la nature, il reste peu de place à l'humanité, encore moins à l'individu.

L'éco-terrorisme au pouvoir

À quoi ressemblera le Hitler Vert ? Comment reconnaître notre prochain tyran mondial, parmi d'inoffensifs candidats ? Dressons le portrait d'Heinrich Himmler : un végétarien strict, grand ami des bêtes, adepte du bio, de l'homéopathie et entretenant une relation mystique avec la nature. Cela dit, doit-on assigner à résidence Aymeric Caron ou de Matthieu Ricard, le télégénique moine bouddhiste ? Pas pour l'instant.

Car le point de basculement d'une écologie « bon teint » vers « l'écologie brune » tient, avant tout, à l'affirmation d'une vision zoologique de l’histoire, où « le progrès culturel serait le reflet direct de capacités biologique ». Au contraire d'un progressiste, pour qui la culture (éducation) permet l'arrachement (à sa condition, ses déterminismes sociaux, sa Nation pour être citoyen du monde...), le réactionnaire s'agrippe à la nature et au terroir.

On reconnaîtra aussi le discours d'un l'éco-Hitler dans son violent rejet de la science, accusée de ne pas avoir pu changer le court des choses voire d'avoir contribué au désastre. Timothy Snyder nomme ceci « la démagogie de la panique écologique ».

Et puis, les militants de l'éco-Hitler prôneront un environnementalismeradical à l'origine de mouvements politiques quasi sectaires. Car, de notreécologisme démocrate, partisan d'une société soutenable et de l'harmonie avec la nature, à leuréco-terrorisme, il y a peu. De même que la frontière entre désobéissance civile et guerre civile est floue. Si floue que le journaliste écolo Will Potter a pris la précaution de sous-titrer son livre « Green is the New Red » sur l'activisme d'ONG écologistes type Greenpeace par la phrase « Activism is not terrorism ». Pour autant, comme l'écrit écrit Peter Staudenmaier, « même la plus louable des causes peut être pervertie et instrumentalisée pour être mise au service de la sauvagerie criminelle ».

Pour l'heure, l'éco-terrorisme n'est pas la priorité de la DCRI. Le Front de Libération de la Planète, dont le mot d'ordre est « la terre d'abord » (comprenez « l'homme ensuite ») passe après DAESH. Évident. Mais pour combien de temps encore ?

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