Omer Benjakob, Haaretz, 16/1/2024
Traduit par Tlaxcala
Les organes de défense, de renseignement et civils ont réalisé peu après le 7 octobre qu’ils étaient en train de perdre la bataille en ligne face à ce que certaines sources appellent la « machine de guerre psychologique et d’information bien huilée » du Hamas. Ils ont donc discrètement acheté des outils numériques pour lutter contre la désinformation, malgré les craintes d’une utilisation politique abusive à l’avenir

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Montage d’Aron Ehrlich à partir de photos de Miriam Elster, Gil Cohen-Magen/AFP, X.
Israël a réagi à sa « défaite évidente » face au Hamas sur le champ de bataille numérique en achetant pour la première fois un système technologique capable de mener des campagnes d’influence de masse en ligne, selon de nombreuses sources ayant connaissance du dossier.
Le système peut, entre autres, créer automatiquement des contenus adaptés à des publics spécifiques. Cette technologie a été achetée dans le cadre d’une tentative plus large des organismes israéliens, tant civils que militaires, de remédier à ce que certaines sources ont qualifié « ’ « échec de la diplomatie publique d’Israël » à la suite du massacre perpétré par le Hamas le 7 octobre et de la guerre qui s’en est suivie.
Selon huit sources différentes actives dans les domaines du renseignement, de la technologie, de l’influence en ligne et de la diplomatie publique, Israël était mal équipé pour faire face à la guerre des médias sociaux qui a éclaté le samedi noir. Il en est résulté une « crise de crédibilité » qui, du point de vue de Jérusalem, a entravé la capacité des forces de défense israéliennes à agir contre le Hamas sur le champ de bataille réel.
Bien qu’il ait été initialement conçu en termes militaires comme une solution aux besoins en matière de renseignement et de guerre psychologique, des sources indiquent que le système est actuellement exploité par un bureau gouvernemental. La raison en est que l’establishment de la défense s’inquiète de l’exploitation d’une technologie « politique ».
Selon des sources bien informées sur les efforts de diplomatie publique d’Israël - la « hasbara »,
comme on l’appelle en hébreu - le système est destiné à contrer ce qu’elles et les chercheurs appellent une « machine à haine » en ligne bien huilée qui diffuse systématiquement de la désinformation anti-israélienne et pro-Hamas, des informations erronées, le négationnisme du 7 octobre, ainsi que des contenus ouvertement antisémites.
Ces messages ont été soutenus par des campagnes technologiques menées par des forces iraniennes et même russes. Selon certaines sources, ces campagnes ont non seulement sapé les efforts déployés par Israël pour rendre compte des atrocités commises par le Hamas, mais elles ont également porté atteinte à la logique de la guerre et à la crédibilité du porte-parole de Tsahal, en particulier auprès des jeunes Occidentaux.
Ce n’est que lundi que le Shin Bet israélien a révélé que l’Iran exploitait au moins quatre faux canaux sur les médias sociaux israéliens dans le cadre de sa guerre psychologique et de ses opérations d’influence visant Israël. Parmi eux, un faux réseau en ligne révélé précédemment par Haaretz, qui a également contribué à amplifier les vidéos du Hamas sur l’attaque du 7 octobre et qui a depuis travaillé à provoquer le public israélien sur des questions liées à la guerre.
La première campagne est déjà lancée. Elle n’a cependant rien à voir avec la guerre et se concentre plutôt sur l’antisémitisme.
Israël, par l’intermédiaire du bureau du Premier ministre, qui contrôle la direction de la diplomatie publique et d’autres organismes, a rejeté toutes les affirmations contenues dans cet article.
Le front PsyOp
La première heure de la guerre a révélé à quel point l’establishment de la défense israélien était désespérément mal préparé à gérer les plateformes de médias sociaux comme Instagram et TikTok, et même les applications de messagerie comme Telegram, car l’internet (et la société israélienne) a été inondé de vidéos filmées par le Hamas documentant ses propres atrocités.