Elle parle haut et fort. Son cri résonne dans toutes les tribunes officielles internationales, qui lui déroulent le tapis rouge. Prophète de malheur, son annonce de l'apocalypse se veut tempérée par une incantation d'espoir, un baume sur la plaie :" Il faut écouter les scientifiques !"
Justement, que disent-ils ?
"Le GIEC ne fait pas de recommandations, il n'est pas prescriptif. Ce n'est pas son rôle" souligne Nathalie De Noblet-Ducoudré, bioclimatologue et membre du GIEC dans une interview au magazine Le Point. "Notre travail (...) est de faire un état des lieux des connaissances à un instant T".
Les scientifiques ne disent donc rien des solutions. Eux aussi poussent un cri d'alerte. Greta Thunberg fait de la stéréo. Mais alors que veut-elle en incitant le monde entier à "se ranger derrière les scientifiques" ? Lancer le vaudou écologiste avec des foules de pénitents verts se lancérant le dos au cri de "Non à la fin du monde" ? Susciter des pèlerinages devant le CNRS et ses homologues étrangers pour voir apparaître des solutions dans un halo doré ? Faire tomber des cohortes humaines en état de transe, les yeux exorbités et la main brandissant le dernier rapport du GIEC en hurlant "là est la solution" ? (ce qui est faux...)
Privés de débouchés dans le monde réel, les discours de l'adolescente sonnent creux. Les solutions, ou même de simples pistes, c"est pas son truc. Il faut demander à papa ("les scientifiques").
Interrogée sur le CETA, le traité de libre-échange avec le Canada, lors de son passage à Paris en juillet dernier, la jeune suédoise a expliqué n'avoir aucune opinion sur le sujet. Les traités internationaux sont pourtant un facteur d'aggravation de la pollution, du gaspillage des ressources et de la baisse des protections sanitaires et sociales. Pour peu qu'on soit motivée par le sujet, comme elle clame que c'est son cas, la chose est de notoriété publique. Surtout pour une ado de seize ans qui a la prétention d'interpeller tous les responsables internationaux.
De même, l'exploitation des gaz de schiste. En prêche écologiste au sommet de l'ONU sur l'urgence climatique, à New York, il y a quelques jours, Greta Thunberg n'en a pas soufflé mot. Ni lors de son apparition au Canada un peu plus tard, où elle a rassemblé un demi million de dévots convaincus qu'ils étaient en train de changer le monde en battant le pavé. En se gardant toutefois de dénoncer l'exploitation des sables bitumineux de l'Alberta, une vraie saloperie sur tous les plans.
Aucune allusion non plus à l'accélération technologique, dévoreuse de terres rares, dont l'extraction est un désastre pour l'Afrique, notamment.
Sans parler du surinvestissement dans l'industrie nucléaire, certes décarbonnée, mais bombe à retardement écologique pour les générations futures car on ne sait pas se débarrasser des déchets.
Silence pudique sur la pollution générée par les éoliennes. Pas seulement une nuisance visuelle et sonore : ces pales géantes en matériaux composites sont non recyclables et indestructibles. Et elles ne durent que vingt ans...
Il faut se rendre à l'évidence : notre civilisation techno-industrielle condamne la planète à mort, et nous avec. Et le néolibéralisme accélère le mouvement.
Les abeilles meurent, les insectes aussi. Beaucoup d'espèces sont en voie d'extinction ou déjà disparues. Le climat change. Et la mer monte. Face à ces périls imminents, Greta Thunberg se satisfait de marcher. La marche, forme gymnique de la pensée magique. La marche et un fatras de généralités du type "Arrêtez de parler d'argent", "Il faut faire plus"...
Enfant gâtée du système, il lui est impossible d'en exiger des mesures radicales.
Analyser les causes des horreurs qu'elle fustige conduit pourtant à prôner la limitation drastique du commerce mondial, la fin du tout technologique, le retour des productions locales, la fin du néolibéralisme. Mais aussi du raisonnement scientiste qui rend l'homme maître et possesseur de la nature, avec les dégâts que l'on connaît.
Ce qui va au rebours de ce que laisse entendre Greta Thunberg avec son allusion à la science. Sans doute a-t-elle peur de pousser jusqu'au bout son propre raisonnement. Très très peur.