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Billet de blog 8 juin 2023

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Humour (noir): Retraites. Ce n'est pas un échec !

Un document incroyable mais qui explique bien des choses.

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Dans un article de France Bleu, un haut responsable de la CFDT parle, et il faut l'écouter pour comprendre ce qui vient de se passer depuis cinq mois. Extraits -non modifiés- de l'interview:

Question: Sans surprise, les chiffres de la 14ᵉ mobilisation contre la réforme des retraites sont en nette baisse en France et notamment en Bretagne. On peut dire que c'est la fin ?

Réponse:

Christophe Rondel : Alors la fin, pas forcément, en tout cas, c'est peut-être la fin des mobilisations telles qu'on les a connues depuis janvier. Mais pas la fin de nos revendications sur le sujet des retraites. Il y a plusieurs projets de loi qui sont en discussion, qui parleront travail. Nous, lorsqu'on parle des retraites, on parlait travail. Eh bien, ce sera l'occasion de parler travail et de parler retraites. C'est la question de l'emploi des seniors, c'est la question de la pénibilité du travail. Donc il y a de quoi encore parler retraite à l'occasion du travail.

D'abord il explique tranquillement que le passage à 64 ans et l'allongement de la durée de cotisations c'est pas une catastrophe, après tout on va pouvoir discuter de plein de choses à ce sujet. En pointillé on devine bien la ligne Berger dans l'intersyndicale: on ne se battait pas tant pour faire reculer Macron que pour nous placer favorablement dans les prochaines négociations. 
Les 64 ans et le reste sont actés, au pertes et profits, mais on va discuter le bout de gras pour voir si on peut récupérer des miettes ailleurs.

On est tout à fait dans la définition du "syndicalisme d'accompagnement des réformes néolibérales". On ne bat pas tant pour empêcher les réformes que pour les accompagner et les aménager.

Sauf que pour tout le monde l'intersyndicale représentait l'état major de la lutte sociale contre la retraite à 64 ans. Les gens ne sont pas mobilisés pour qu'on discute de pénibilité ou d'index senior mais pour le retrait de la réforme. Et ils ont été trompés par les dirigeants syndicaux. Consciemment. 

Ensuite c'est encore plus clair.

Question: Mais le chef de l'État, lui, n'a pas reculé. La réforme va s'appliquer. On peut parler d'échec ?

Réponse:

"Alors non car ça, c'est la démocratie, ce n'est pas un échec de l'intersyndicale. Si on décidait de tout, on serait le Parlement. Or, on n'est pas le Parlement. Nous sommes des corps intermédiaires, donc ce n'est pas un échec. Sur la question des retraites, nous n'avons pas obtenu ce que nous souhaitions. Il y a beaucoup d'autres sujets qui sont à l'ordre du jour la question de l'égalité femmes hommes, la question du dialogue social, la pénibilité. On verra si les députés qui nous ont tendu la main à un certain moment pour dire 'on a besoin des corps intermédiaires pour réformer l'État, mais on va voir où réformer le pays'. On va voir s'ils sont à l'écoute de nos propositions, donc ce n'est que partie remise. Et puis surtout, l'échec n'est pas pour les organisations syndicales, c'est surtout pour la majorité relative et les ressentiments que peut avoir la population d'avoir une majorité qui n'est pas à l'écoute de sa population."

Rappelons d'abord l'extrême largeur de vue démocratique du syndicaliste, car la réforme n'a pas été votée par le Parlement mais imposée par le gouvernement avec le 49.3 et au terme d'une procédure expéditive.

Et quand on lit "ce n'est pas un échec de l'intersyndicale" c'est hallucinant, on entre dans la réalité alternative. On a gagné peut être !?

"L'échec ... c'est surtout pour la majorité" est du même tonneau. Personne de sensé ne peut nier que Macron vient de réaliser un exploit anti social: porter un coup de massue à la retraite par répartition. Avant lui personne n'avait osé passer à 64 ans.

Mais tant qu'on peut négocier quelques miettes, rien n'est  perdu nous dit le brillant chef syndical. Quand on lit entièrement cet article on comprend mieux l'attitude très "prudente" de l'intersyndicale. Je pense qu'à aucun moment ils n'ont même envisagé de mener une lutte totale pour obtenir le retrait de la réforme.

Au contraire à chaque étape ils ont temporisé, tergiversé avec des arguments fumeux. 

Alors que la réforme a été lancée par Macron en septembre 2022, les syndicats sont allés négocier l'accompagnement des 65 ans prévus. Et sans les bassesses politiciennes de LR qui a imposé 64 ans, nous en serions actuellement à 65 ans. 
Même atermoiement après le 10 janvier pour reporter au 19 puis au 31 les actions de masse. Puis les deux manifestations contestables de février avant la farce grotesque du 7 mars. Comme si 24H de grève arrêtait la France ! Mais faire sourire le bourgeois, ca oui !

Après le vote de la loi le 16 mars, les carottes étant cuites, ce fut un festival de gesticulations. Manifestations, opérations ponctuelles, projet de RIP impossible, loi LIOT sans avenir, et même ... lettres au députés :)

Mais en relisant les déclarations syndicales d'autosatisfaction on comprend mieux leur logique. Leur rôle c'est de négocier pas de lutter contre le gouvernement. Ils font leur métier, négocier et seulement négocier. Et accompagner au mieux le capitalisme dont ils vivent.
Comme disait Sarkozy en 2010: "on peut négocier bien des choses avec les syndicats mais l'allongement de l'âge de la retraite n'en fait pas partie". En 2023 on l'a vérifié.

Une réforme néolibérale ne se négocie pas en mettant des "coups de pression" symboliques. On l'a combat le plus efficacement possible.

Et cela passe par des coordinations démocratiques. La prochaine fois peut être ?

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