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Billet de blog 19 avril 2023

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Le testament de Berger.

Extraits de l'interview de Berger pour annoncer son prochain départ et la fin du mouvement social contre les retraites.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Quelques questions/réponses extraites de l'interview de Berger dans Le Monde du 20 avril, suivies d'un bref commentaire personnel en italique.

Ne craignez-vous pas que l’on vous ­reproche de quitter le navire en pleine bataille des retraites ?
C’est tout l’inverse. Je pense que, le 21 juin, je laisserai une CFDT qui va bien. Elle compte 31 000 adhérents en plus depuis le début de l’année. Elle a créé plusieurs centaines de sections syndicales. Elle est la première organisation syndicale de ce pays. Elle est reconnue comme une organisation responsable, combative, constructive.

Ca roule pour nous malgré la défaite sociale on s'est encore renforcé !

La réforme des retraites a été ­promulguée alors que l’intersyndicale avait demandé au président de la République de ne pas le faire : est-ce une défaite du mouvement social ?
Non. La défaite du syndicalisme, c’est quand on n’a pas fait ce que l’on aurait dû faire. Le pire aurait été que cette réforme passe sans encombre, comme si elle ne soulevait aucun problème. Depuis trois mois, les travailleurs et les travailleuses ont exprimé une forme de dignité et j’espère qu’ils agiront encore ainsi, le 1er-Mai, en descendant dans la rue de façon massive.
En réalité, tout le monde est perdant à l’issue de cette séquence sur les retraites. C’est le cas pour les travailleurs et les travailleuses, qui vont devoir travailler deux ans de plus, avec une loi encore plus déséquilibrée, puisque le Conseil constitutionnel a invalidé plusieurs mesures avec un – faible – contenu social. C’est aussi le cas du gouvernement, qui a perdu le fil avec la réalité du travail et le monde du travail, qui n’est capable d’en parler que de façon théorique. Et c’est également le cas pour notre démocratie, avec un lien entre démocratie politique et démocratie sociale qui est très abîmé. C’est un rendez-vous manqué, à cause de l’exécutif, de sa volonté d’imposer une mesure paramétrique absurde, sans parler du travail.
Mais le combat n’est pas fini. Il y a le 1er-Mai, la deuxième demande de référendum d’initiative partagée – sur laquelle le Conseil constitutionnel doit se prononcer le 3 mai. Nous verrons aussi s’il faut contester devant le juge administratif des décrets d’application. Et nous serons vigilants sur la mise en œuvre des mesures, qui s’annonce compliquée sur un plan concret pour les personnes qui liquideront leur pension à partir de l’automne, en vertu des nouvelles règles.

Et puis d'abord quelle défaite ? Tout s'est bien passé. On va continuer à gesticuler un peu et la vie continue !

Est-ce que le front syndical risque de se désunir après le 1er-Mai, sachant que la CFDT a dit qu’elle n’allait pas ­manifester pendant six mois, tandis que d’autres organisations aimeraient ­prolonger l’épreuve de force ?
Ce qui peut fracturer l’intersyndicale, c’est de ne pas décider ensemble ou de ne pas respecter ce qu’on a décidé ensemble. Autrement dit, il y a deux risques. Le premier serait de tomber dans des logiques solitaires. Personne ne veut ça. L’autre risque serait de faire croire aux salariés que c’est la succession de journées de mobilisation qui feront revenir le président de la République en arrière, alors qu’il y en a eu douze et qu’il ne
nous a ni reçus ni écoutés. Je n’ai pas envie de faire perdre des journées de salaire, du fait de grèves, à des travailleurs de la deuxième ­ligne, en faisant miroiter une issue positive et en terminant avec des mobilisations ­chétives, à 100 000 personnes dans la rue sur toute la France.
Il faudra que nous rediscutions de la stratégie à adopter. Mais deux enseignements peuvent déjà être tirés de l’intersyndicale : quand nous sommes clairs sur les objectifs et sur les façons de fonctionner, nous sommes plus forts ; quand on sait s’adresser aux salariés sans leur mentir, nous contribuons à redorer le blason du syndicalisme.

Soyons réalistes on a été battu, la méthode des temps forts ca ne marche pas c'est pas la peine d'insister. Mais quand les syndicats sont unis tout se passe bien !

Une enquête du Cevipof, conduite fin 2022 et publiée quelques mois après, montre que les Français n’avaient pas une grande confiance dans les syndicats. Après ces trois mois de lutte, quel regard portez-vous sur le syndicalisme ?
Les choses se sont très clairement améliorées. Dans les sondages les plus récents, il y a autour de 50 % d’opinions positives en faveur des syndicats. Je pense que le syndicalisme a démontré sa capacité d’écoute du monde du travail et sa centralité. Il est, certes, mortel, comme toutes les institutions, si on n’en prend pas soin. Pour conjurer ce risque, il faut se recentrer sur le travail et les travailleurs. C’est ce qu’a fait la CFDT. On sait tous que là où les droits sont les meilleurs, c’est là où le syndicalisme est implanté.
Dès que le syndicalisme est en phase avec le monde du travail, qu’il ne se fout pas sur la gueule pour des futilités entre organisations – sans mentir, non plus, sur ce que sont les divergences en son sein –, il peut rassembler de plus en plus largement. Je crois qu’il sort gagnant de cette période. Il reste à faire fructifier ça par des adhésions, par la création de sections syndicales et en tenant compte de la maturité qui a été la nôtre dans la gestion de cette intersyndicale pour continuer de faire vivre des relations saines et respectueuses entre syndicats. Car c’est une vraie richesse.

Des syndicats unis, des salariés rassemblés, que demander de plus à part renforcer encore les syndicats ? 

Avez-vous des regrets sur la façon dont la contestation contre la réforme des retraites a été menée ?
D’abord, elle n’est pas finie. Il y a encore le 1er-Mai, notamment. Je ne regrette pas la ­façon dont nous avons procédé. Nous avons fait notre travail de critique, de mobili­sation, en tenant compte de la grande diversité sociologique et géographique de cet élan de protestation, auprès des parlementaires. Dès le départ, nous avons dit que nous voulions le soutien de l’opinion publique et la mobilisation en masse : on les a eus jusqu’au bout. C’est dommage que, dans notre pays, la démocratie politique ne soit pas capable de reconnaître et d’écouter la démocratie sociale.

On n'a rien à se reprocher ! On gagne on perd, c'est la vie !

Vous parlez d’un délai de décence avant de revenir à la table des négociations. Allez-vous participer aux discussions que souhaite engager le gouvernement sur le travail ?
D’ici au 1er-Mai, il n’y aura pas de discussion avec l’exécutif. Nous n’avons pas été reçus pendant trois mois. Et un mail de l’Elysée reçu le soir de la promulgation de la réforme, vendredi, à 23 h 5, pour nous dire qu’on allait être invités à une réunion devrait suffire ? Ce n’est pas décent. Après, nous sommes des syndicalistes. Quand il faut discuter de la défense des salariés en matière de salaires, de protection sociale ou de conditions de travail, on y va. Mais dans quelles conditions ? On va avoir des exigences en termes de méthode. On ne va pas rêver de coconstruction, on connaît nos interlocuteurs, mais on exigera plus d’écoute des propositions et revendications des organisations syndicales. On veut des assurances sur la méthode et sur le fond.

Bien sur qu'on aller bavarder, même si on se fait piétiner. C'est notre métier !

Quelle sera la position de la CFDT si ces exigences ne sont pas satisfaites ?
On dira qu’il n’y a rien de possible. Que les discussions ne sont pas fructueuses encore une fois. On jugera sur pièces. De toute façon, on n’ira pas discuter de mesures techniques ou symboliques. On veut de vrais changements pour le monde du travail. Quels sont les gros sujets ? La question de la négociation obligatoire de l’organisation du travail dans les entreprises, la part plus importante des travailleurs dans la gouvernance, le droit d’expression des salariés, la conditionnalité des aides publiques, revoir certains points des ordonnances de 2017 qui ont réécrit le code du travail. Nous voulons que les vrais sujets soient mis sur la table.

On va discuter de tout et de rien, il y a encore plein de grain à moudre !

Pas d'autres commentaires.

Ceux et celles qui ne comprennent pas pourquoi on a perdu gaiement deux de retraites apprécieront les réponses du leader de l'intersyndicale.

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