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Dans une région où le climat politique est devenu un terreau fertile pour les violations des droits humains, ce rapport d’enquête révèle les mécanismes brutaux d'un régime qui écrase toute forme d'opposition. Ce climat de terreur, instauré pour étouffer les voix dissidentes et réprimer les manifestations pacifiques, constitue un viol systématique des droits fondamentaux. À travers une observation méthodologique des pratiques répressives du régime de Paul Biya, ce rapport expose les condamnations pénales qui en découlent, mettant en lumière la face cachée d'une gouvernance autoritaire.
Méthodologie :
L'enquête s'appuie sur des témoignages directs de victimes, des documents officiels, des entretiens avec des experts en droits humains, des sondages d'opinion auprès des populations concernées, ainsi que sur une analyse globale des méthodes extrajudiciaires et de répression. Des mesures sont prises pour assurer l'anonymat des témoins et protéger les identités des informateurs.
1. La Répression Brutale des Dissidents :
Depuis l’ascension du régime actuel, une vague de répression a balayé le pays, visant principalement les figures de l’opposition politique. Les dissidents sont régulièrement arrêtés et inculpés sur des accusations fabriquées de toutes pièces, allant de la sédition à l’incitation à la violence. Les conditions de détention des prisonniers politiques sont déplorables, marquées par des tortures physiques et psychologiques. Par exemple :
1984 : Après une tentative de coup d’État contre Paul Biya, des membres présumés du complot, liés à l’ancien président Ahmadou Ahidjo, sont arrêtés, jugés en secret et exécutés manu militari. Les témoins rapportent que les détenus ont été soumis à des interrogatoires violents et à des conditions de détention inhumaines.
2008 : Les manifestations contre la hausse des prix des denrées alimentaires sont sévèrement réprimées. Les forces de sécurité ont utilisées des balles réelles pour disperser les manifestants, faisant plusieurs victimes. Un survivant des violents affrontements de 2008 entre manifestants et forces de sécurité partage son témoignage : « Nous avons été traités pire que des animaux. La police n’a pas hésité à tirer sur des gens qui couraient pour échapper à la violence. Sous mes yeux, mon fils, un autre homme et une femme ont été abattus alors qu’ils essayaient d’échapper aux gaz lacrymogènes. La vie de mon enfant s'est arrêtée stupidement à cause d'un système qui a provoqué la ruine de notre pays. »
2. Les Violations des Droits à la Liberté d’Expression et de Réunion :
Au Cameroun, les manifestations pacifiques, qu’elles soient organisées par des partis politiques ou par des mouvements de citoyens, sont systématiquement réprimées. Les forces de sécurité utilisent une violence excessive pour disperser les rassemblements, allant jusqu’à faire usage de balles réelles. Les arrestations arbitraires de manifestants et les persécutions de journalistes qui couvrent ces événements sont des pratiques courantes :
1992 : Les élections présidentielles sont marquées par des accusations de fraude et de manipulation. Les manifestations pacifiques organisées par l'opposition sont réprimées violemment, avec des arrestations massives et des sévices infligés aux manifestants. Les témoignages de ceux qui ont survécu décrivent des scènes de brutalité policière et de détention sans procès.
2016 : Les tensions dans les régions anglophones du Cameroun, le Nord-Ouest et le Sud-Ouest, donnent lieu à une crise. Les avocats et enseignants protestent contre la marginalisation et la désorganisation de leurs institutions. La réponse du gouvernement est une répression sévère, avec des arrestations massives et des restrictions sur la liberté de presse.
2017 : Les tensions se transforment en conflit armé. Les forces de sécurité sont accusées de violer les droits humains, y compris des massacres de civils et des disparitions forcées. Les victimes et les témoins rapportent des abus systématiques et des violences extrêmes.
3. Le Système Judiciaire comme Instrument de Répression :
Le système judiciaire, loin d’être indépendant, sert les intérêts du régime en condamnant les dissidents à des peines sévères sur la base de procès inéquitables. Les avocats de la défense sont intimidés, et les jugements sont rendus dans un contexte de transparence limitée. Des cas de détention prolongée sans inculpation formelle, ainsi que des procès expéditifs, illustrent l'absence de justice véritable. Cela est particulièrement visible dans les contextes suivants :
2011 : Les élections présidentielles sont suivies de répressions contre les opposants politiques. Les arrestations de militants et les violences policières sont courantes. Les témoignages font état de détentions arbitraires et de tortures infligées à ceux qui contestent les résultats.
Ancien Détenu : L’homme de 67 ans se tient là, les yeux à peine levés, exprimant une profonde tristesse et une lueur de désespoir, comme s’il cherchait encore à comprendre les injustices qu’il a endurées. « Quand j’ai été enlevé en 2011, j’avais à peine eu le temps de comprendre ce qui se passait. Ils m’ont arrêtée pour avoir osé contester les résultats des élections présidentielles. En prison, j'ai connu l'enfer : coups, humiliations et tortures incessantes. Bien que leur cruauté n'ait pas brisé mon esprit, les cicatrices de cette période sont visibles et les atrocités subies hantent toujours mon esprit. Malgré mon amour pour mon pays, la liberté n'a pas calmé ma douleur. Je suis profondément convaincu que cette prison à ciel ouvert et ses bourreaux devront un jour répondre de leurs actes envers les Camerounais. »
4. Les Conséquences Humaines et Sociales :
Les impacts de ce climat de terreur sont dévastateurs. Les familles des dissidents emprisonnés subissent des pressions constantes et des menaces. L’instabilité politique et la peur généralisée freinent le développement social et économique du pays, avec des générations entières vivant dans l’ombre de la répression. Les organisations de défense des droits humains consultées ont également documenté des cas de disparitions forcées et de détentions illégales. Parmi lesquels :
2016 : La crise dans les régions anglophones du Cameroun commence avec des grèves d’avocats et d’enseignants protestant contre la marginalisation des régions. Le gouvernement répond par une répression sévère, avec des arrestations massives, des détentions prolongées et des violences policières. Des témoins oculaires décrivent une brutalité sans précédent, des attaques contre des villages entiers et des détentions dans des conditions que l’on peut à peine imaginer.
2023 : Le 17 janvier, Arsène Salomon Mbani Zogo, surnommé « Martinez Zogo » , journaliste à Amplitude FM et animateur de l'émission populaire "Embouteillage", a été enlevé devant un poste de gendarmerie à Yaoundé. Cinq jours plus tard, son corps nu et atrocement mutilé a été retrouvé. Les témoignages poignants de sa famille, plongée dans le deuil et le traumatisme, révèlent une campagne d'intimidation et de violence visant les journalistes, leurs familles et toutes les voix critiques.
Informateur (DGRE) : Un agent anonyme de la Direction Générale de la Recherche Extérieure (DGRE), révèle que l'ancien chef des services secrets, avant le remaniement annoncé par le décret présidentiel du 19 décembre 2023, est le principal orchestrateur de cette affaire, ayant exécuté les ordres reçus. Il explique que la DGRE est utilisée comme un instrument répressif au service du régime et de la mafia camerounaise, exécutant les tâches les plus inimaginables. Selon lui, cet ancien directeur aurait agi sur les ordres d'un homme d'affaires camerounais, avec pour objectif explicite l’élimination de Martinez.
Au moment de son enlèvement, le journaliste d’Amplitude-FM était à l'origine de plusieurs rapports qui auraient pu interroger la mauvaise gestion du pouvoir en place et révéler les liens obscurs entre le régime et les membres de la mafia camerounaise. « La filature de Martinez s’est étendue sur plusieurs jours, sans interruption. Les agents se relayaient en groupes de sept pour le suivre 24h/24. Après son enlèvement, Martinez a été conduit à Soa, au nord de Yaoundé, où il a été soumis à des tortures. Il a ensuite été transféré dans l'immeuble Ekang, appartenant à un homme d'affaires camerounais, propriétaire d'un groupe de médias. » De cet immeuble, le journaliste n'est jamais sorti vivant.
2024 : MC Cobra, un Bendskineur (terme désignant les conducteurs de moto-taxi) de Yaoundé et créateur de contenu sur TikTok, a été arrêté et emprisonné. Ses vidéos, qui documentent le quotidien des usagers de la route et la condition des routes, ainsi qu'une vidéo spécifique sur un agent de la circulation de la mairie de Yaoundé, ont été utilisées pour justifier son arrestation. Selon les témoignages de ses proches, il a été arrêté, battu, et détenu dans plusieurs cellules à travers la capitale. Sa moto a été confisquée et ses cheveux rasés, le tout accompagné de violences physiques et psychologiques de la part des agents municipaux impliqués.
2024 : Un activiste politique, Steeve Akam, est extradé du Gabon vers le Cameroun après avoir dénoncé les maux qui rongent son Cameroun natal, notamment les arrestations arbitraires, les persécutions, le système mafieux du régime en place, et avoir fourni des éclaircissements sur les mécanismes de corruption. Son extradition est perçue comme le point culminant d'un plan de répression régionale orchestré par des régimes putschistes, autoritaires et néocolonialistes. Selon certains informateurs, l'objectif est de faire pression sur la diaspora camerounaise à l’approche des élections de 2025, afin d’étouffer les voix dissidentes et de faciliter la succession au pouvoir de celui dont le nom circule déjà dans les couloirs du palais d’Etoudi.
Activiste Gabonais : « Même si Steeve Akam, alias Ramon Cotta, n'a pas formellement le statut de réfugié au Gabon, le besoin de protection humanitaire l'emporte sur les considérations administratives. Au-delà des conventions politiques, c'est l'humain qui prime » , souligne l’activiste Gabonais, qui défend le principe selon lequel tout citoyen, quelles que soient les motifs de l'arrestation doit être soumis à la présomption d’innocence et bénéficier de la protection de son intégrité physique, ainsi que du droit à une enquête légale et à un procès équitable. « La brutalité dont a souffert Steeve Akam évoque les pires heures des régimes précédents, montrant clairement que la promesse de renouveau du Comité pour la Transition et la Restauration des Institutions (CTRI) semble n'être qu'une façade séduisante mais trompeuse. »
En effet, Steeve Akam n'aurait jamais dû être enlevé, menotté et extradé du Gabon vers le Cameroun dans de telles conditions. « L'accord politique entre le régime du général putschiste Brice Oligui Nguema, chef de la Garde républicaine sous l'ancien régime Bongo et Paul Biya, le plus vieux président en exercice du monde, qui dirige le Cameroun d'une main de fer depuis 1982, constitue une grave violation des obligations internationales dont le Gabon est signataire : Ne pas renvoyer un individu dans un pays où sa vie serait en danger » Ces dirigeants éprouvent une haine profonde envers leurs peuples, conclut-il.
2024 : Junior Ngombè, créateur de contenu TikTok connu pour ses appels à l'inscription des jeunes sur les listes électorales en vue des élections de 2025, a été arrêté et emprisonné. Sa vidéo virale, qui appelait le gouvernement à prêter attention aux voix dissidentes pour améliorer la gouvernance, a été utilisée comme justification de son arrestation. Dans cette vidéo, il exhortait : « Chères autorités, nous ne sommes pas vos ennemis. Les Camerounais vous ont élus », en réponse à l’arrestation de l’activiste camerounais Steve Akam, extradé du Gabon vers le Cameroun.
Enseignante (Immigrée) : Une femme de 40 ans, émue, se confie : « Nous vivons constamment dans la peur. Il y a deux ans, j'ai essayé de rejoindre la Thaïlande, mais j'ai été refoulée à l’aéroport. J'étais passée par le Nigeria, et j'avais dû envoyer mon passeport au Kenya pour obtenir un visa », raconte-t-elle. « À mon arrivée en Thaïlande, les agents de l'immigration ont pris mon passeport et m'ont interrogée sur la manière dont j'avais obtenu mon visa. » L'enseignante précise qu'elle ne compte pas voter pour l’actuel président en 2025. Cette mère de trois enfants souhaite rassembler suffisamment de fonds pour émigrer légalement au Canada, où elle espère trouver des conditions de vie meilleures. « Nous ne devons pas perdre espoir ; nous devons nous battre pour nos enfants. Junior Ngombè a l'âge de mon dernier fils, mais sa voix représente celle de tous les nôtres », confie-t-elle.
Activiste de la JDC : « Il semble que Junior Ngombè ait récemment conclu un accord avec le gouvernement, qui lui a offert le statut de candidat admis au concours de la police dans sa commune en échange de sa libération. Fervent partisan de Maurice Kamto, leader du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun (MRC), le principal opposant au régime actuel, Junior Ngombè aurait changé de position, ce qui a conduit certains à parler d'un changement d’avis » , rapporte-t-il.
Les actions du régime de Paul Biya sont en contradiction flagrante avec touts les articles de lois internationales et nationales qui protègent les droits humains, pour ne citer que ceux-ci :
Article 3 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
Article 5 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme
Article 19 du Pacte International relatif aux droits civils et politiques
Article 9 de la Convention Européenne des Droits de l’Homme
5. Conclusion et Appel à l'Action
Dans les recoins sombres des régimes autoritaires, la répression et les violations systématiques des droits de l'homme tissent une toile de terreur et d'oppression. Ce climat étouffant engendre des dérives telles que le repli identitaire, exacerbe les conflits ethniques, conduit à des tragédies telles que l'immigration forcée et l'exploitation humaine, tout en alimentant les tensions diplomatiques. Face à cette sombre réalité, il est essentiel que les sociétés civiles s'élèvent, que les médias et les leaders d'opinion dénoncent et que les voix dissidentes s'unissent. Les tribunaux nationaux, les groupes de jeunes et les étudiants doivent se mobiliser et appeler la communauté internationale - les ONG, les tribunaux, les universitaires et les chercheurs - à agir de manière décisive. Il est impératif d'adopter des mesures concrètes pour mettre fin à ces abus, soutenir les victimes et promouvoir une gouvernance respectueuse des droits fondamentaux.
À l’ordonnance :
- Une enquête internationale indépendante pour examiner les violations des droits humains sous le régime de Paul Biya et pour tenir les responsables comptables.
- Des sanctions ciblées contre les individus impliqués dans la répression et la violation des droits humains.
- Un soutien accru aux victimes et aux organisations de la société civile qui luttent pour la justice et la liberté au Cameroun.
- Une pression diplomatique continue pour encourager des réformes politiques et judiciaires visant à restaurer l’état de droit et à garantir les droits fondamentaux pour tous les Camerounais.
Cameroun : L'enfer de la Répression (Extrait du Rapport d’Enquête)