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Billet de blog 5 août 2008

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Omar Bongo, une soukouss présidentielle

Le ministère espagnol des affaires étrangères l'a confirmé: le président du Gabon, Omar Bongo, est dans «un état préoccupant», hospitalisé depuis une dizaine de jours à Barcelone pour un cancer des intestins. Il y a quelques mois, notre abonné, Tristan Guilloux, postait cette vidéo d'un anniversaire -en musique- de l'inamovible président.

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Le ministère espagnol des affaires étrangères l'a confirmé: le président du Gabon, Omar Bongo, est dans «un état préoccupant», hospitalisé depuis une dizaine de jours à Barcelone pour un cancer des intestins. Il y a quelques mois, notre abonné, Tristan Guilloux, postait cette vidéo d'un anniversaire -en musique- de l'inamovible président. Il s'agissait alors de commenter le discours sur l'Afrique de Nicolas Sarkozy écrit par Henru Guaino. Voici le billet de Tristan Guilloux écrit à l'époque:

«Je vous l'avais bien annoncé. L'exégèse du discours de Dakar, par Henri Guaino, conseiller du Président, est en passe de devenir une saga de l'été., même si elle est dépassée largement par l'affaire Siné qui crève (pas uniquement littéralement) l'audimat. Après sa tribune dans Le Monde daté du 26 juillet, Henri Guaino est à nouveau interrogé le 31 sur le site Internet d'information Rue89 sur l'Afrique, Khadafi et l'Europe, où il persiste et signe.

Les critiques ne se sont pas faites attendre. Parfois outrancières dans les attaques et démesurées par rapport à la modestie que revendique le personnage. D'autres sont bien mieux construites, comme la réaction de Jean-Frédéric Schwaub le 4 aout, toujours dans les colonnes virtuelles de Rue89. Dans cet article, M. Schwaub rappelle qu'il n'est pas besoin de faire appel aux mânes de Hegel pour établir la filiation du fameux discours, mais qu'il suffit de le rapprocher de celui prononcé par De Gaulle en 1947, du temps de "La plus grande France", aux obsèques de Félix Eboué, ancien gouverneur de l'Afrique équatoriale française.

M. Schwaub poursuit M. Guaino sur le terrain sur lequel le conseiller présidentiel a voulu resituer le discours : le terrain politique. Nous ne pouvons tout de même pas nous empêcher de rappeler que le discours de Nicolas Sarkozy a été prononcé le 26 juillet 2007 à l'Université de Dakar et non pas devant une assemblée politique, et que le président s'adresse nommément à "l'élite de la jeunesse africaine". Petit mensonge par omission de M. Guaino, mais passons.

Ce contexte académique explique que les critiques sont d'abord apparues dans la sphère universitaire africaine - et l'on se reportera utilement à la tribune publiée par Achille Mbembe, professeur à l'université du Wtiwatersrand à Johannesbourg, le 1er aout 2007 sur le site internet de la section de Toulon de la Ligue des Droits de l'Homme - avant d'être relayées, avec vigueur par Bernard-Henri Lévy, traité en retour par très présidentiel conseiller de "petit con prétentieux".

Les réactions furent plus mitigées parmi les hommes politiques et la société civile : le président Wade le remercie pour l'idée d'Eurafrique, tandid qu'Alpha Oumar Konaré, président de l'Union africaine explique que "le discours n'est pas nouveau en Afrique". Certains cependant contestent non les principes mais le ton. Mgr Sarr, l'Archevêque de Dakar explique que « Nicolas Sarkozy a dit beaucoup de vérités bien affirmées, mais je trouve aussi dans son propos beaucoup d’absolutisme». Toujours sur RFI,Me Aissata Tall, avocate et membre du parti socialiste sénégalais, critique plus ouvertement le ton professoral et affirme que "Ce que nous attendions du président Sarkozy c’est de nous indiquer les moyens, non pas la voie", tandis que les étudiants s'avouaient déçus de ne pas avoir d'engagements tangibles sur les visas pour se rendre en France pour étudier.

Les critiques furent donc, dans un premier temps du moins, beaucoup plus modérées qu'on a pu l'affirmer par la suite. Mais rapidement, c'est-à-dire le lendemain, le discours a perdu en crédibilité, puisqu'après avoir dénoncé la corruption, il se rendait au Gabon, un pays dont le régime et la gouvernance sont très largement critiqués.

Omar Bongo Ondimba, donc. L'inoxydable président du Gabon mérite notre attention dans cet épisode de la saga de l'été dans la mesure où Henri Guaino nous invite dans sa tribune à pratiquer l'anthropologie culturelle pour "chercher ce que les Africains ont en partage...".

On lui a récemment prêté d'avoir eu la peau - ou plutôt le cuir du maroquin - de Jean-Marie Bockel, ministre de la Coopération prié récemment de rejoindre les Anciens combattants (Marquez le pas! un, deux! aurait chanté Zao). Le plus ancien président africain a fêté ses 40 années de règne en décembre dernier. La vidéo postée ici et tournée à l'occasion de son anniversaire est cependant plus ancienne car l'animateur du panégyrique présidentiel, Madilu Bialu, le "Grand Ninja" de la Soukouss congolaise, s'est éteint en août de la même année.

Madilu a été une voix qui a compté dans le TP OK Jazz, le combo musical de Franco, avant d'entamer une carrière solo dans les années 1990. Dans un décor somptueux qui rappelle, pour les plus anciens, les fastes du Camp du Drap d'Or, nous assistons à un déhanchement de smokings et de robes longues dans une soirée qu'on imagine sans cela un peu guindée. Ah,"priorité à la lutte contre la pauvreté" chante le griot électrique devant des tables richement dressées, nous voilà rassurés. Laissons-nous gagner par la sebene lancinante de la guitare mi solo.

A bientôt, pour poursuivre cette saga avec d'autres musiques.

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