Au nord du Zimbabwe , la Zambie est au croisement des influences de l’Afrique australe, des pays du bassin du Congo et de l’Afrique lusophone, puisque la présence des Portugais, qui ont remonté le fleuve Zambèze, est avérée depuis le 16eme siècle. Mais ce pays fut soumis par les Britanniques au 19e siècle pour devenir la Rhodésie du nord, avant de recouvrer son indépendance en 1964. Ce que je trouve intéressant avec ce pays, c’est sa diversité musicale autour de la guitare et au-delà avec les instruments à corde. C’est à partir de cette ligne directrice que je vous invite au butinage musical de ce jour, toujours en cinq morceaux.
1/5 Le kalumbu est un arc musical monocorde joué à l’aide d’un bâton. Une calebasse assure le rôle de caisse de résonance que le musicien peut moduler en l’approchant ou en l’éloignant de sa poitrine. Le commentaire accompagnant ce petit film explique que cet instrument se retrouve uniquement dans le sud de la Zambie et que les musicologues le relient aux traditions du peuple San. Les San constituent les plus anciens habitants de l’Afrique australe et sont davantage connus sous le nom plus péjoratif de « Bochimans » - les hommes des buissons en afrikans - ceux du film « Les dieux sont tombés sur la tête ». Le Kalumbu est considéré comme l’ancêtre du berimbau brésilien popularisé par la capoiera.
2/5 La guitare ne se diffuse réellement qu’après la seconde guerre mondiale, notamment sous l’effet de l’urbanisation liée au développement de l’activité minière dans la Copper Belt du nord du pays. Les ruraux déracinés se retrouvent dans des lieux de sociabilité comme les Mine welfare centers que le paternalisme des sociétés minières promeut. C’est l’occasion pour les musiciens de chanter la vie quotidienne dans les villes minières, leurs heurs et leurs malheurs à l’exemple de cette chanson Amatsotsi mama amanonge chalo, « les Tsotsi sèment le trouble dans la vie quotidienne ». Tsotsi fait référence à un terme utilisé en Afrique du sud pour désigner les jeunes qui basculent dans la délinquance mais qui se reconnaissent aussi par une tenue vestimentaire particulière. Cette musique urbaine a été collectée tout au long des années 1950 par le musicologue Hugh Tracey, connu également comme l’inventeur de la kalimba, une sanza (mbira) adaptée pour les orchestres occidentaux. Je ne peux que recommander l’extraordinaire collection qui regroupe ses enregistrements qui s’étendent de l’Afrique du Sud jusqu’en Ouganda : Origins of guitar music, SWP records.
3/5 Lorsqu’ils ne peuvent pas se les offrir, les musiciens urbains façonnent leurs propres instruments. Ce phénomène que l’on retrouve dans nombre de pays africains est particulièrement présent en Zambie avec le Kalindula. Le Kalindula est une sorte de gros banjo sur lequel s’assoit le musicien pour en jouer, comme on peut l’entendre dans ce morceau du Swagastic Zambian Mariachi Band. La guitare est elle également de fabrication artisanale. La caisse du banjo est ici frappée par un troisième musicien pour compléter, avec une incroyable économie de moyens, le trio classique guitare – basse – percussions. Le kalindula se retrouve également – sous le nom voisin de karindula - dans la province du Katanga située au sud de la République Démocratique du Congo.
4/5 Le kalindula devient dans les années 1980 l’expression du principal style de musique populaire zambienne. Une musique électrifiée, marquée par des influences extérieures comme la soukouss congolaise. Amayenge est un des groupes phares de cette époque qui tire son nom d’une danse d’initiation pour les femmes. Amayenge joue sur l’articulation entre la tradition et la modernité : guitare électrique et cloches frappées, costumes traditionnels et mise en scène télévisuelle des danses traditionnelles.
5/5 Le Zamrock est peut-être l’une des manifestations les plus singulières de la réiterprétation du rock US de la fin des années 1960 et tout particulièrement du rock psychédélique et du funk. En écoutant ce morceau de Chrissy Zeby Tembo, on se prend à croire, comme certains qui disent avoir vu récemment Elvis Presley, que Jimi Hendrix n’est pas mort et qu’il se cache quelque part à Lusaka, la capitale zambienne.
Prochaine escale : peut-être le Malawi...