Ce matin visio-conférence via une plateforme professionnelle. Sentiments mitigés : bonheur de « revoir » des collègues ; léger stress lié au contexte ; frustration vis-vis de la façon dont on est « managés » (présentiel ou virtuel, cela ne change pas grand-chose, parole coupée, pas facile de s’exprimer) ; le tout dans le cadre d’une réorganisation que la crise sanitaire est venue percuter de plein fouet … Il m’a fallu un moment pour comprendre ma baisse de moral après cette séance. Malgré les politesses d’usage, il y a un manque d’empathie qui … dans les circonstances présentes … alors que le virtuel nécessiterait une attention particulière et une écoute plus aiguisée.
Je suis surprise que personne n’ait pensé à interviewer Paul Virilio car quand même, le penseur de l’Accident, avec un A majuscule, l’Accident des accidents, la catastrophe qui se déchaîne en cascades, c’est bien lui. Je me demande ce qu’il nous dirait. J’espère qu’il va bien.
Quand Buzyn nous a dit en janvier que l’état, sous sa diligence, avait pourvu aux stocks de masques et de tout le nécessaire, comment dire ? Ce n’est pas que je l’ai cru sur parole ; le gel était déjà manquant, j’étais méfiante ; méfiante aussi avec le discours du masque « qui ne sert à rien ». Mais j’ai pensé qu’un aussi gros mensonge n’était pas possible. Au pire on pourrait avoir des ruptures de stocks limitées dans le temps et dans l’espace. Jamais je n’aurais imaginé un tel mensonge tenu avec un tel aplomb sur combien ? Deux mois ? Trois mois ? (J’ai compris quand l’état les a réquisitionnés) ; car enfin un tel mensonge ne peut pas tenir sur la durée, il y a un moment où la vérité se fait et où le roi est nu. C’est donc se mettre dans une position intenable à terme. Comment est-il possible de faire ce choix-là ? car enfin même en découvrant, en janvier, que les stocks de masques et de gel n’existent pas, il était encore possible et temps de tout faire pour en commander ou en fabriquer et de nous l’expliquer.
Mais cela ne s’est pas arrêté aux masques et au gel hydro-alcoolique ni aux lits en réanimation (puisque supprimés au fil des ans) ; mais manque aussi tout le matériel de protection en milieu hospitalier ; manquent aussi les tests, les respirateurs, les produits nécessaires en réanimation ainsi que les médicaments indispensables à la prise en charge en soins palliatifs. A tel point que le professeur Philippe Juvin s’interroge : « y-a-t-il quelque chose dont nous ne manquions pas ? »
Mais cela ne s’est pas arrêté là. L’organisation avec les cliniques privées pour utiliser leurs lits, ne semble pas non plus avoir été correctement gérée. Les Ehpad ont été abandonnés. La seule chose qui semblerait ne pas manquer, ce sont les housses mortuaires… pour l’instant.
Les dysfonctionnements concernent tous les sujets. Comment est-ce possible ? On ne peut pas ne pas se poser la question : comment est-ce possible ? Est-ce de l’incompétence ou est-ce le résultat de choix assumés ? Ont-ils, à un moment, fait le choix de l’immunité de groupe (probablement) puis fait machine arrière devant le nombre de morts auxquels on pourrait aboutir ? Sont-ils occupés à d’autres tâches ?
Alors quoi ?
La question du premier tour des municipales apporte un éclairage et tend à prouver que ce n’est pas la santé publique ni la santé des citoyen-nes qui guide les choix.
On ne peut pas s’empêcher de penser aux bénéfices que le pouvoir pourrait tirer ou pourrait penser pouvoir tirer de sa gestion de la pandémie :
- Confinement total : arrêt des manifestations de gilets jaunes et contre la réforme des retraites,
- Nouvelles attaques inconcevables contre le code du travail qui pourtant était déjà salement amoché (semaine de 60 heures, attaques contre les congés payés …etc) (pression pour prendre ses congés sur le temps de confinement !),
- Loi d’urgence donnant la possibilité d’expérimenter la réaction du corps social, sa capacité à encaisser ou pas et comment ; possibilité d’expérimenter en réel une société du contrôle encore plus autoritaire,
- Baisse immédiate du budget des pensions de retraite à verser, puisqu'on nous a assez dit que le codid-19 touche essentiellement « les vieux » (et, cerise sur le gâteau, faire passer au second plan la réforme des retraites en soi-disant la suspendant, juste après le coup du 49.3, pour mieux l'imposer plus tard) ;
La tentation doit être grande d’utiliser la pandémie pour obtenir la reddition qui n’avait pu être obtenue par les flash-ball.
La composition du conseil scientifique et du comité Care (Comité analyse recherche et expertise) qui éclairent le gouvernement sur les choix et stratégies à mettre en œuvre, avec ses nombreux conflits d’intérêt, amène à penser que la pandémie est traitée avant tout comme une opportunité à saisir, l’opportunité de prendre des marchés : le marché des tests, le marché des traitements, le marché du futur vaccin du covid-19. Cela pourrait expliquer que les vrais sujets ne soient pas traités et que le travail ne soit pas fait ; les masques, le gel, les équipements nécessaires aux soignants, la gestion des lits, les stocks de médicaments, la logistique, l'organisation et la coordination de tous les efforts : personne n’a le temps pour cela, ils sont trop affairés ailleurs.
Hier séance de gymnastique (trois quarts d’heure environ) avec un gros ballon. Le mal au dos que j’avais la semaine dernière s’estompe. Il faudrait que je fasse ces séances en moyenne un jour sur deux. Pour compenser la sédentarité alors que je marchais pas mal avant.
Sinon, moral en berne. Ce monde est un tel gâchis. Je suis tellement triste de ce que je lis.