Nous sommes des féministes de plusieurs générations. Certaines d’entre nous ont milité au MLF, pour le droit à l’avortement, la reconnaissance du viol comme crime, le droit de disposer de nos corps, y compris celui de porter le voile si nous le souhaitons.
D’autres, bien avant MeToo, ont dénoncé les prédateurs, ont obtenu le droit de porter pantalon ou jupe, se sont battues pour rallonger le délai de prescription des crimes sexuels ou ont obtenu que le consentement ne soit pas reconnu avant 15 ans.
Nous avons affronté le mépris et la violence pour avoir osé nous revendiquer féministes dans un monde qui nous voulait silencieuses.
Nous sommes fières d’avoir contribué à faire avancer ces luttes et plus encore de voir de nouvelles générations s’en emparer avec force et conviction. Mais nous voyons aussi le féminisme dévoyé, détourné pour servir d’instrument à des idéologies qui prétendent défendre les femmes tout en les divisant.
Au nom d’une laïcité à géométrie variable, certaines voix voudraient exclure des féminismes entiers, condamner des choix personnels sous prétexte d’émancipation et nier la diversité des vécus et des oppressions. Ces discours prétendent parler au nom de toutes, alors qu’ils n’expriment qu’une vision biaisée, où seules certaines femmes mériteraient d’être protégées.
Nous refusons ce féminisme à deux vitesses. Nous refusons que la lutte contre les violences sexuelles serve à alimenter des discours racistes et xénophobes, où l’agresseur n’indigne que lorsqu’il appartient à certaines catégories. Nous refusons aussi que des oppressions soient minimisées sous prétexte qu’elles s’exercent dans des sociétés occidentales, présentées comme des modèles d’égalité.
Tout oppresseur doit être dénoncé : le taliban qui enferme les Afghanes, le régime iranien qui persécute les Iraniennes, le gouvernement israélien qui bombarde et affame les Palestiniennes, le hamas qui viole les israéliennes, le législateur américain qui criminalise l’avortement, le même qui persécute et criminalise les personnes transgenres, ceux qui stérilisent les femmes handies ou autochtones sans leur consentement et qui par extension ne les protègent jamais de rien, , le violeur bien de chez nous, trop souvent protégé par le silence et l’impunité, le féminisme blanc qui ne défend que lui-même et tire une balle dans le pied de ses soeurs.
Nous défendons un féminisme qui ne hiérarchise pas les violences, qui ne s’accommode ni du racisme ni des doubles standards. Nous affirmons que la justice doit être au service de toutes les victimes, quelles qu’elles soient, et garantir un véritable accès à la parole et à la réparation.
Les femmes ne doivent pas être instrumentalisées. Le féminisme est un combat politique pour l’émancipation, pas un outil d’exclusion. Il ne doit jamais être détourné pour justifier des politiques liberticides ou des oppressions sous couvert d’universalisme. Nous continuerons à défendre un féminisme qui se bat pour tous.tes.
Sans « oui mais ».
Sans exception.
JAD (et qui voudra)