À l’attention de Messieurs
Jean Cottave, Président bénévole des banques alimentaires
Patrice Douret, Président bénévole des Restos du cœur
Messieurs,
Dans votre tribune du 3 mai dernier vous demandiez aux candidats aux élections européennes l’assurance de leur engagement pour la défense de l’aide alimentaire. Manon Aubry, à la tête de la liste de l’Union Populaire, porte un programme de lutte contre l’appauvrissement et dans lequel l’éradication de la précarité tient une place essentielle. Vous retrouverez l’ensemble du projet en suivant le lien en bas de page.
En préambule, nous portons un diagnostic similaire au vôtre : du fait des crises successives et de l’austérité imposée aux populations, la précarité se diffuse très vite, chez les travailleurs et les jeunes en particulier. Néanmoins, nous ajoutons un élément à cet état des lieux : l’inflation n’a pas été seulement synonyme d’appauvrissement ; pour un petit nombre elle a été l’opportunité d’un enrichissement obscène. Signe de cet antagonisme : quand dans les 3 dernières années la France comptait 535 000 personnes pauvres en plus, la fortune des milliardaires français a augmenté de 230 milliards d’euros, soit l’équivalent de plus de 10,8 millions de SMIC annuels. Au comble de l’indécence, en 2023 le montant des dividendes versés aux actionnaires en France a atteint la somme record de 67 milliards d’euros. Cela représente plus de 600 ans de subvention européenne à la France pour l’aide alimentaire. Dans ce contexte, la taxation des superprofits est une mesure élémentaire de justice sociale.
Au-delà de cette mesure emblématique, nous portons des propositions d’urgences permettant de soutenir l’action des associations de solidarité, dont le fonctionnement est trop souvent percuté par les instabilités du monde. La première, le doublement du montant du Fond Social Européen +, et par conséquent l’enveloppe dédiée à l’aide matérielle, est pour nous une mesure essentielle. Nous y associons le blocage des prix des produits de premières nécessités (plutôt qu’une TVA à 0% qui appauvrit l’État pour garantir les dividendes des distributeurs), garantit la continuité de la chaîne d’aide alimentaire en sortant ses acteurs de la tenaille qu’ils connaissent : hausse des demandes d’aides d’un côté, et baisse des produits réellement livrés dans le cadre du Fonds de soutien européen à l’aide alimentaire (SEAA) de l’autre. En pratique, nous savons combien les marchés infructueux et les retards de livraison du SEAA représentent un problème de gestion au quotidien. Nous proposons qu’une compensation financière équivalente à la perte soit affectée aux associations en cas de marché non pourvu ou bien lorsque les retards de livraison excèdent 3 mois.
De surcroît, nous ne voulons plus d’un SEAA seulement pourvoyeur de produits négociés à bas coût sur les marchés européens. Nous souhaitons qu’une part financière en gestion directe soit attribuée aux associations. Cette enveloppe devra favoriser la construction de filières locales, notamment pour les produits frais. Ce mécanisme vertueux revêt plusieurs intérêts : en premier lieu, l’argent des solidarités aidera à consolider notre souveraineté alimentaire. En second lieu, la proximité et la réduction des intermédiaires permettront de limiter les conséquences des retards d’acheminement du SEAA, tout en réduisant le coût écologique du transport. Enfin, et c’est peut-être le plus important, ces filières de proximité permettront de garantir la qualité des denrées distribuées, tout en permettant aux associations de s’adapter aux attentes et aux habitudes alimentaires des publics.
Nous partageons avec vous l’idée qu’il n’existe aucune différence entre manger et bien manger, et qu’il s’agit d’un droit fondamental. Votre mission d’utilité publique doit donc être soutenue, pérennisée et protégée des aléas de la finance. Il convient également d’ajouter que la solidarité que vous portez en tant qu’associations ne saurait remplacer la garantie d’égalité que l'État doit apporter. C’est la boussole qui oriente notre programme. Bien entendu, les mesures exposées ci-dessus ne sont pas exhaustives et nous sommes à votre disposition pour prolonger l’échange selon les modalités qui vous conviendront.
Avec notre inconditionnel soutien.
Bien respectueusement,
Manon Aubry, tête de liste de la France insoumise aux élections européennes
Younous Omarjee, député européen la France insoumise
Leïla Chaibi, députée européenne la France insoumise
Maël Brillant, candidat sur la liste de la France insoumise aux élections européennes
Maxime Da Silva, candidat et co-animateur du groupe thématique Pauvreté de la France insoumise