Depuis le début du génocide à Gaza, la Knesset israélienne a accéléré une vague législative d’une ampleur sans précédent, à un rythme qui reflète l’entreprise de mort menée par l’armée génocidaire. Sous couvert de « réformes judiciaires », ces lois ne sont pas de simples ajustements institutionnels : elles dessinent un projet politique clair et implacable, dont l’objectif est de démanteler la société palestinienne, d’en effacer la légitimité et le souvenir, et d’ériger l’impunité comme norme pour les colons, les soldats et les criminels de tous bords impliqués dans le crime contre l’humanité du siècle.
Loin de se limiter à un prétendu « coup judiciaire », cette offensive législative s’inscrit dans une trajectoire politique profonde : Israël ne change pas seulement de régime, il réorganise sa société pour effacer la question palestinienne, ou plutôt l’éradiquer. En profitant de la faiblesse des dirigeants palestiniens, l’État colonial israélien construit un cadre légal où le gouvernement dispose d’un pouvoir absolu, capable de formaliser l’annexion en Cisjordanie et de dégrader davantage le statut civil des Palestiniens à l’intérieur d’Israël.
Il est temps de rappeler que la prétendue démocratie israélienne n’a jamais été libérale ou égalitaire. Même à l’intérieur des frontières de 1949, les Lois fondamentales confèrent une suprématie légale aux Juifs du monde entier, y compris non-citoyens, sur la population palestinienne autochtone. Dans la même logique raciste et suprématiste, doit-on encore rappeler le cas de Falashas, ces femmes juives éthiopiennes, auxquelles l’État colonial a injecté des contraceptifs à leur insu car noires ? Les médias mainstream et la justice, censés protéger la démocratie, ont longtemps légitimé cette logique d’injustice raciste : les premiers ont normalisé la déshumanisation des Palestiniens, la seconde a entériné des lois d’apartheid comme celle de l’État-nation juif, qui réserve le droit à l’autodétermination nationale aux seuls Juifs et considère le développement des colonies comme une valeur nationale cardinale.
Ces lois, en reconnaissant uniquement la nation juive sur l’ensemble de la « terre d’Israël », c’est-à-dire tout le territoire entre le Jourdain et la mer, légitiment juridiquement la discrimination structurelle et pérennisent l’inégalité constitutionnelle entre Juifs et Arabes. La réforme de la justice israélienne réorganise les structures de pouvoir pour que les lois racistes et antidémocratiques puissent être adoptées sans contrôle aucun.
Cependant, le projet eugéniste et colonial israélien va bien au-delà des tribunaux. La droite au pouvoir cherche à consolider sa domination démographique et politique, malgré l’inégalité économique de ses électeurs ultra-orthodoxes. Cette consolidation passe par des lois autorisant l’annexion de larges portions de la Cisjordanie, la mise en place de l’exécution des prisonniers palestiniens accusés d’avoir tué des Juifs, et l’interdiction des opérations de l’UNRWA, privant des centaines de milliers de Palestiniens d’éducation et de services humanitaires essentiels.
Pour les citoyens palestiniens d’Israël, le danger est immédiat : des mesures comme la « clause de raisonnabilité » ou la «clause de dépassement» menacent de leur ôter toute protection juridique contre des décisions gouvernementales arbitraires. La scission du rôle du procureur général affaiblirait encore le contrôle sur les crimes de guerre dans les territoires occupés, consolidant l’impunité israélienne.
Depuis Gaza jusqu’aux citoyens palestiniens à l’intérieur d’Israël, l’objectif est clair : légaliser la discrimination, entériner l’oppression et faire payer un prix insoutenable au peuple palestinien. Le consensus politique israélien garantit aux législateurs une liberté totale, et les initiatives de l’opposition, comme la proposition de restreindre le droit de vote aux seuls anciens militaires, montrent que cette offensive dépasse largement la majorité au pouvoir.
Cette stratégie n’est pas accidentelle. Elle reflète une culture politique où le génocide devient politiquement viable et socialement acceptable. Les lois adoptées et celles en projet traduisent un message limpide : les Palestiniens ne sont pas seulement opprimés, ils sont légalement condamnés à subir l’injustice jusqu’à leur disparition ou leur enfermement dans des enclaves toujours plus synonymes de charnier à ciel ouvert comme le montre Gaza tous les jours.
À UPM, nous affirmons qu’il n’existe aucune neutralité face à ce processus. La législation israélienne ne peut être interprétée comme un simple conflit interne ; elle est l’instrument d’un projet génocidaire. Il est urgent de dénoncer, de documenter et de mobiliser pour construire des alternatives concrètes, et pour que le monde cesse de fermer les yeux sur cette tragédie. Le régime colonial d’Israël ne se contente pas de réformer sa justice : il institutionnalise le génocide et l’apartheid. Résister à cette logique, c’est défendre la justice, la dignité et l’existence même du peuple palestinien.