Peuple des océans, peuples des eaux céans
Des hommes, destitres, des clans, un tu’i (roi), un hau (roi)
UVEA (ÎLES WALLIS) & FUTUNA forment la plus petite collectivité française du Pacifique et abritent les derniers monarques de la République française. Distantes l’une de l’autre d’approximativement 230 km, Wallis totalise une superficie de 77,5 km². Abordées par les premiers hommes de traditions Lapita vers 1300 - 900 av. J. C. (Frimigacci 2000 ; Sand, 2000), Uvea et Futuna sont juchées au nord du sillon de la fosse des Tonga dans sa partie la plus septentrionale. Ces peuplades développent alors leurs propres caractéristiques culturelles en s’adaptant en grande partie au milieu qu’ils rencontrent à leur arrivée (Kirch 2000 : 42-62). Dès lors vers la fin du premier millénaire avant J. C. ces populations évoluent et produisent une partie du berceau de la culture polynésienne où elles deviennent uvéenne et futunienne à part entière. Les îles de 'Uvea et de Futuna continuent d’entretenir des échanges avec la région comme les îles Fidji, Tokelau, Tuvalu, Samoa et Tonga. Aux alentours de la deuxième moitié du XVe s. l’expansion politico-culturelle tongienne dans la région de la Polynésie occidentale trouve son paroxysme à 'Uvea. L’île est colonisée par les Tu’i Tonga[1] où l’ordre tongien bouleverse les traditions locales séculaires en parvenant, surtout, à fédérer les entités politiques indépendantes préexistantes sous une même coupe, régie par un pouvoir de type pyramidal comme ce fut le cas à Tonga ou aux îles Hawai’i. Le premier roi connu de la tradition orale est Tauloko qui est intronisé par les Tongiens. Cette mainmise du pouvoir tongien va perdurer jusqu’au XVIIIe s. Très loin de là, dans une autre temporalité historique et culturelle, la Guerre de Sept Ans (1756-1763) qui oppose en Europe et en Amérique du Nord la France à l’Angleterre, entrevoit dans son dénouement dans la conquête de la «Sea of Islands » (Hau’ofa, 1994). Suite à cet événement le capitaine Samuel Wallis, entre autres, diligenté par la couronne britannique redécouvre l’île de 'Uvea le dimanche 16 août 1767 au petit matin à bord du Dolphin, mouillé au large dans le sud-ouest de l’île (Hawkesworth, 1773). Débute alors la course européenne aux colonies. Le 1er novembre de l’an 1837 les pères de la Congrégation de Marie, « une promotion humaine » (Delbos 2004 : 36), prennent subtilement et officieusement possession des îles de Wallis et Futuna au nom de la France, un État profondément anticlérical depuis les événements de 1789, un caractère largement conforté par la loi de séparation des Églises et de l’État en 1905. Acquises au catholicisme en 1842 pour Wallis et un peu plus tard pour Futuna, ces deux îles deviennent protectorat français en 1887. La Deuxième Guerre mondiale voit l’afflux de 6000 soldats américains de mai 1942 à février 1944 sur l’île de Wallis qui devient une base annexe de la base américaine de Pago-Pago aux îles Samoa américaines. L’accalmie qui suit le départ des Américains voit l’intronisation du cinquantième roi de Wallis le 12 mars 1959 en la personne de Tomasi Kulimoetoke. Son règne marque une certaine forme de stabilité qui durera quarante-huit ans ce qui permettra d’asseoir un climat serein et propice à l’accès du Protectorat au statut de Territoire d’Outre-Mer par le référendum du 27 décembre 1959. Depuis 2003, Wallis et Futuna deviennent Collectivité d’Outre-mer régie par la loi n°61 du 29 juillet 1961 (Préfecture, 1961). Cette période est aussi caractérisée par la mise en place des principales infrastructures du territoire (adduction en eau et en électricité, réseau télécommunication et routier). En 2005 une crise politico-coutumière secoue l’île Wallis. Ces tensions sont plus ou moins attisées par le Préfet en poste en raison de son immixtion dans les affaires coutumière en soutenant officiellement et publiquement le camp dit des rénovateurs, qui prônent une forme d’alternance dans la gouvernance coutumière de l’île et tente une destitution avortée du monarque octogénaire, en raison d’une chefferie officielle qui parvient à les en dissuader. La tension monte et se termine avec l’envoi d’un médiateur, dépêché par Paris, qui reconnaît officiellement sa majesté Lavelua Kulimoetoke. La page Tomasi Kulimoetoke se tourne définitivement le 07 mai 2007 quand ce dernier s’éteint à l’âge de 88 ans laissant derrière lui un royaume divisé. 'Uvea reste orphelin de roi jusqu’au 25 juillet 2008 date d’intronisation du nouveau roi Kapeliele Faupala qui sera destitué le 02 septembre 2014. Ce dernier prend les rênes du royaume dans une conjoncture sociale et historique relativement délicate : comment allier la crise coutumière de 2005 en cours et surtout, comment innover vers une nouvelle gouvernance coutumière après quarante-huit ans de règne de Tomasi Kulimoetoke ? Des pourparlers de réconciliation sont voulues et initiés de chaque côté, mais ils n’aboutissent point.
Préludes à la crise de 2016 ou la seconde tentative de monnayage de l’essentia wallisien et futunien
Des hommes, des titres, un roi, un antiroi et un préfet
La crise de 2005 dans sa dimension institutionnelle trouve, si l’on en considère les acteurs que sont aujourd’hui l’Administration supérieure, l’ancienne chefferie officielle et la nouvelle chefferie, en filigrane le clergé, mais aussi dans l’enjeu qu’elle présentait, le pouvoir, une suite logique dans les événements politico-coutumiers que traverse la collectivité, et particulièrement le royaume de 'Uvea (Wallis).
Des signes, en partie, avant-coureurs de la crise de 2005 investissaient les royaumes de 'Uvea et de Futuna, indécelables alors sans doute par les vagissements des campagnes électorales qui battaient leur plein en 2002 suivies par l’élan des comités politiques victorieux, en liesses. Il s’agissait en premier lieu, en effet, des fameuses 31 mesures votées par l’Assemblée territoriale en 2003 dont la dernière, sur la « mise en place d'une fiscalité locale et une fiscalité des revenus », pose une réflexion sur une mesure fiscale. Puis ce fut aussi cette même année que les caisses du territoire accusaient un déficit relativement conséquent, on l’estimerait à une somme de près de 439 millions de francs Pacifique soit 3,7 millions d'euros. De la même manière, l’affaire dite de la « régie des avances » tient peut-être un rôle déterminant dans le déficit évoqué précédemment, que cette régie à l’époque aurait peut-être servi à financer la campagne électorale de certaines personnalités politiques. De cette hypothèse, l’on peut se questionner sur l’origine de ces financements. Bien que Wallis et Futuna soient très éloignées, autant sur le plan géographique qu’administratif, de Paris et de la Cour des comptes, l’Administration supérieure locale était-elle au courant de ces pratiques, si celles-ci étaient avérées ? Dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) adoptée le 28 juin 2001 par le Parlement, une commission de soixante députés en 2003 a saisi le Conseil constitutionnel en vue de la préparation de la loi nationale de finances de 2004 avec pour but bien précis, de rappeler le devoir de l’État, aspect également dévolu aux régions et aux collectivités, de présenter « de façon sincère l'ensemble de ses ressources et de ses charges ». Ce principe de sincérité implique que l'évaluation des charges et des ressources de l’État soit réalisée avec « bonne foi », et ce, aussi correctement que possible, compte tenu des informations disponibles (Conseil constitutionnel, 2003). Cette question à la fois complexe et primordiale ramenée à l’échelle de Wallis et Futuna en suscite une autre, qui est, peut-on dès lors considérer ces dépenses effrénées pour motifs juridiquement valables ou non, comme méconnaissant le principe constitutionnel de sincérité tel que l’impose l’article 32 de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 ? Ou plus grave, l’administration, déjà au parfum de la loi organique relative aux lois de finances, en relation avec la majorité présidentielle de l’époque, porteur de la LOLF, ont-ils intentionnellement ou non permis ces excès de fraudes en oubliant que même Wallis et Futuna ne dérogerait pas à la LOLF ? Autre affaire en 2002 découlant directement de l’utilisation des deniers de l’État, fut la question de la fameuse régie des avances qui aurait servi entre autres à financer la campagne électorale de certains politiques. Mais c’est apparemment la politique de l’omerta, au nom de quoi ou de qui ? Au nom de l’État ? Que dire alors de personnalités coutumières aujourd’hui officialisées par l’Etat français et dont les noms figurent sur des documents de remise de fonds établis par le régisseur auprès de la Régie d’avances du territoire ? (Kuaola, 2005). Ou serait-ce au nom d'un parti politique car en mettant le doigt sur ses ramifications à Wallis et Futuna, la guirlande s’illuminerait jusqu’au sommet de l’État via une autre collectivité d’Outre-Mer ? Plus tard en 2008 et 2009, l’on peut s’interroger aussi sur l’épisode malheureux de la défiscalisation qui nul doute si elle avait été initiée et cadrée dès le début, non sans trop de mal, aurait-elle bien évité beaucoup de tort à de nombreuses familles ? Où sont passés les responsables de cabinets d’agréments qui pourtant travaillaient sous la coupe du dispositif métropolitain de défiscalisation ? Où sont terrés certains administratifs représentants directs de l’État, pourtant liés encore aujourd’hui, directement ou indirectement au dossier ? Avec du recul, cette affaire poussée au maximum de ses retranchements n’était-elle pas un danger qui guettait les royaumes de 'Uvea et de Futuna ? Certains entrepreneurs, très peu, en effet, étaient prêts à leur grand désespoir à vendre un lopin de terre construit ou non via des cabinets immobiliers métropolitains, en vue de rembourser leurs frais engagés en justice. N’était-ce pas là une fixation de l’État ou simplement l’œuvre d’un parti politique, qui en l’occurrence était celui qui tenait les rênes du gouvernement métropolitain à ce moment-là, pour dissimuler des dérives locales où étaient impliqués au premier chef, certains de ses lieutenants ?Ces outils de développement sont formidables, encore faut-t-il que l’État en surveille scrupuleusement la mise en œuvre, ils doivent être utilisés à bon escient et à juste titre ; cet esprit de sincérité se devait d’être initié à la plus haute échelle locale, l’administration, et nationale, par l’État lui-même ordonnateur de toute affectation de crédits ou d’agréments dans le cadre de la loi organique relative aux lois de finances. Fort de ce constat, il apparaît que dans le giron de l’État, les royaumes de 'Uvea et de Futuna sources de nostalgie à la France, d’une époque révolue où celle-ci portait en son sein des monarques de droit divin, apparaissent à la fois comme une richesse multiculturelle, trônant au milieu de voisins exclusivement anglo-saxons, mais aussi comme une exception paradoxale républicaine qu’il faut changer à tout prix. Ainsi a-t-on le droit alors de penser qu’un accord tacite eût été concocté entre l’État et le parti politique en question, à la gouvernance du territoire à l’époque, et qui fut que le premier renflouât les caisses territoriales et, qu’en compensation que le second par l’intermédiaire du président de l’assemblée fît voter ces 31 coups de force. Enfin, l’on peut aussi se questionner comment la même année le territoire de Wallis et Futuna devint une collectivité d’Outre-mer dans le calme le plus complet, à l’insu de 99,5 % de la population ? Ce changement de statut était-ce seulement destiné à un club d’initiés ? Toutes ces interrogations autour de ces 31 mesures sont importantes puisqu’elles seront à l’origine d’un des paramètres catalyseur de la crise de 2005. Face à ce silence des politiques, volontaire ou non, et peut-être par un arrangement entre politiques et coutumiers, en 2004, sa majesté Tomasi Kulimoetoke procède à une série de destitutions au sein de la Grande chefferie. Le motif invoqué fut que le palais n’eût pas été informé de ce qui se tramait entre les politiques à l’Assemblée territoriale et certaines personnalités du palais royal, alors même que la quasi-totalité de ses ministres, cinq sur six, avaient été mis au parfum de ces mesures. Ces destitutions sont plus ou moins le fait du monarque octogénaire puisque dans son âge avancé, c’est sa fille cadette qui assure au palais le rôle de gouvernante et assume de plus la régence du royaume. Les cinq personnes destituées vont rapidement se retrouver en dehors du palais et rejoindre la mouvance rénovatrice initiée par les familles royales. Le climat social est sous tension et l’année s’achève dans une ambiance électrique. Il manquait non point un casus belli, mais l’étincelle qui mettrait le feu aux poudres. La veille du nouvel an 2005, un des petits fils du roi renverse mortellement un père de famille et décide de se réfugier au palais afin d’échapper à la condamnation. Du recul et de l’enseignement que l’on puisse en tirer, n'était-ce pas là l’occasion rêvée pour les chefs déchus, bien que l’irréparable eût été commis par le petit-fils du roi, de crier revanche ? Sur deux éléments factuels, un accident mortel et une instruction judiciaire, va se constituer une crise institutionnelle opposant, coutumiers entre eux ou coutumiers contre l’administration, puisque l’ingérence du préfet était avérée. Le 29 septembre pour sortir le royaume de 'Uvea d’une impasse qui ne peut plus durer, l’État français dépêche un médiateur, militaire de carrière, pour apporter une solution au conflit (Le Monde, 2005). Finalement la France confirme sa confiance, remise en cause à aucun moment, au Lavelua Tomasi Kulimoetoke et un protocole de sortie de conflit est signé avec à la clef, l’interdiction de représailles envers la faction rénovatrice et comportant surtout la clause suivante, que l’État représenté par le préfet ne devra plus en aucun cas s’immiscer dans les affaires coutumières des royaumes. Ce que le préfet actuel entend d’une autre oreille. A la sortie de ce conflit le ministre Kulitea Mikaele Tauhavili avait laissé entendre, qu’un document préjudiciable à tous les Wallisiens et Futuniens avait déjà été acté et signé par l’Assemblée territoriale. Ce document demeure en veille, jusqu’au jour où un autre Wallisien le rendra exécutoire. Ce texte n’est tout autre que les 31 mesures, signées par le président de l’Assemblée territoriale le 23 novembre 2003, après consultation du Conseil du gouvernement. Ce dernier compte parmi ses membres le préfet, président du Conseil, trois chefs coutumiers qui sont les vice-présidents ainsi que trois membres nommés par le préfet après accord de l’Assemblée territoriale. Suite à la destitution de Kapeliele Faupala le 2 septembre 2014, le royaume de 'Uvea reste sans roi. Les tractations s’activent et l’an dernier cinq noms se démarquent des palabres des familles prétendantes au trône et du Conseil de la Grande chefferie : le ministre Muko’ifenua Valeliano Lenato, Tominiko Halagahu alors faipule (chef de district) de Hihifo, Kusitino Manakofaiva (ancien 1er ministre), Fosio Manuopuava et Valelia Taputai. Les discussions se poursuivent jusqu’en fin mars où le nom de monsieur Halagahu fait l’unanimité. Les familles royales et la Grande chefferie s’accordent à ce que Tominiko Halagahu soit intronisé roi de 'Uvea. Le 1er avril 2016, le ministre Uluimonua Pasilite Hensen annonce officiellement sur les ondes de Wallis et Futuna 1ère que le roi de Wallis sera intronisé le 16 avril 2016. Cette date du 1er avril 2016 marque paradoxalement, selon l’édition spéciale n°415 du JOWF, le jour de la création de « l'anti-conseil de circonscription ». Le 13 avril, les partisans opposés à l’intronisation du roi, rangés derrière le chef de district de Hahake, cadenassent le portail du palais royal qu'ils occupent depuis une semaine. En fin d'après-midi, ces derniers investissent quatre personnes : Apitone Munikiha'afata, Paulo Liogi, Mikaele Halagahu, Aloisio Fulutui de quatre titres de « aliki fa'u ». Sans katoaga, sans roi Lavelua, cette cérémonie revêt-elle, comme le prétendent les auteurs, « l'authenticité coutumière » ? Non car le seul privilège dévolu au roi Lavelua est d'installer ses six ministres. Courant rénovateur ? Massacre coutumier ? Ou méconnaissance des repères identitaires ? Le 14 avril, la chefferie officielle brise le cadenas et pénètrent dans l’enceinte du palais afin d’entamer les discussions avec les occupants du palais menés par le faipule de Hahake et ses 4 chefs de villages. Là se réunissent les membres de la Chefferie officielle et le Kivalu nouvellement installé par le chef de district de Hahake (son beau-frère), qui annonce officiellement au journal télévisé de 19h00, que les différentes parties sont parvenues à un statu quo et que par voie de conséquence lui-même introniserait le roi, le samedi 16 avril. Plus tard, les occupants du palais et de la place royale, ont une discussion assez houleuse avec leur nouvelle chefferie au cours de laquelle, ils demandent purement et simplement l’annulation de l’intronisation. Au petit matin du vendredi 15, si la nuit a porté conseil à certains, elle a été chez d’autres, mauvaise instigatrice. Coup de théâtre : Kivalu Mikaele Halagahu, revient sur sa décision. On est à un jour de l’intronisation et les préparatifs s’activent, la tension est palpable tandis que le noyau dur rénovateur associé à la nouvelle chefferie, exaltés, fustigent l’intronisation et exigent : le report de l'intronisation du roi à une date ultérieure, et la démission de toute la chefferie officielle sauf le faipule et les chefs de village de Hahake. Face à cette volte-face incongrue des occupants du palais témoignant de mauvaise foi, la Chefferie officielle décide d’introniser monsieur Halagahu au Falepule'aga de Hihifo (maison de district) sis à Vailala par une cérémonie coutumière du kava qui a réuni la population de 'Uvea et les représentants coutumiers de la diaspora wallisienne en Nouvelle Calédonie invités pour l'occasion. Malgré qu'ils aient été dissuadés par les opposants, séjournant en NC, à ce moment-là, les coutumiers wallisiens de Calédonie confirment leur soutien au futur roi en honorant l'invitation. Le cinquante deuxième roi de 'Uvea vient d’être intronisé et porte le nom de Lavelua Ma’utāmakia Vaimu’a. Dans la même cérémonie, le monarque installe séance tenante son Kivalu, Premier ministre, Setefano Hanisi qui revient à la fonction pour la troisième fois. Vers 17h00, le conseil de circonscription de 'Uvea, souverain et légitime, officialise le nouveau roi. Vers 19h30, les délibérations n°10 et n°11 sont présentées au préfet dont le rôle est uniquement de publier. Déjà la nuit, puis le lendemain du côté des opposants qui occupent toujours le palais, la nouvelle est cinglante. Ces derniers n’ont de réponse que de bloquer les accès vers l'Administration et vers le palais royal. Dans le camp des opposants, des pourparlers s’engagent et très vite le nom du conseiller UMP monsieur Kanimoa Patalione fait l’unanimité. Pendant la nuit du 16 au dimanche 17 des dons de toute nature affluent du clan et des proches de ce dernier à son domicile. A 7h00 le roi Lavelua Vaimu’a et son cortège se déplaçaient dans le sud à Mu’a pour son premier kava hao’aga (premier kava de présentation de sa majesté à la population) à la maison de réunion de district dans le village de Mala’efo’ou. Monsieur Kanimoa est intronisé antiroi vers 10h00. Le 26 avril les rénovateurs procèdent à l’intronisation des chefs de village de Vaitupu et et Tufuone. Le 1er mai arrivant, fête du travail, mais aussi fête du Saint Patron du district de Mu’a, furieux de l’installation du roi Ma’utāmakia Vaimu’a, les partisans de l’antiroi aspirent à empêcher le cortège du roi Vaimu’a de se rendre dans le sud. Le 1er mai, sa majesté Vaimu’a sied en l’église de Saint-Joseph pour l’office religieux, accompagné de la chefferie. L’impromptu de la journée s’improvise à la place Saint Jean au palais à Matā'utu où pour la première fois dans toute l’histoire chrétienne de l’île, une fête de la Saint-Joseph du district sud, où elle prend tout son sens religieux, social et coutumier, est montée de toutes pièces devant le palais. L’Évêque, par souci de neutralité devant la crise coutumière, a conseillé les membres du clergé de ne pas participer aux fêtes coutumières. Le Nonce apostolique, ambassadeur du Pape François dira même dans son homélie à l’encontre de l'antiroi et ses partisans : « Priez pour ceux qui ne veulent pas vous faire confiance et priez le Christ pour qu’il œuvre auprès d’eux pour qu’ils vous fassent confiance ».
Entre temps le préfet Renouf sur les ondes de Wallis et Futuna 1ère, se réjouit de l’intronisation des deux monarques et poursuit qu’il n’a pas à s’immiscer dans les affaires coutumières et par contre se défendra de toute officialisation. Le 4 mai la chefferie du palais somme le préfet de reconnaître et d’officialiser l’antiroi. Ces tractations durent tout le mois de mai. Aux cérémonies de commémoration de la Victoire de 1945 du 8 mai, le préfet convie les chefs de district et les chefs de village qu’il a reconnus jusque-là, sans la grande chefferie officielle du roi Vaimu’a. Dans la semaine du 10 mai, un assaut est lancé contre la demeure du roi Ma’utāmakia Vaimu’a avec pour objectif bien précis, l’arrestation du roi. Ce cours des faits est à rechercher dans la plainte déposée par le préfet lui-même l’an dernier dans l’affaire du blocage de l’aéroport le lundi 23 novembre 2015 à l’encontre du chef de district Halagahu Tominiko. Il va sans rappeler que le protocole de fin de conflit stipulait entre autres la réouverture de l’aéroport et l’abandon de toute poursuite judiciaire comme notamment le référé condamnant les chefs coutumiers à une amende de 100 000 francs Pacifique par jour. Non loin de l’aéroport, de façon délibérée et préméditée, l’assaut commandité par la Préfecture ayant été plutôt une promenade de courtoisie admirative de la cocoteraie du roi dont l’aboutissement avait été gagé d’avance par l'antiroi et sa chefferie, heureux d’apprendre l’impensable, puisque ces derniers, complices, se rendirent un à un pour repasser sous les fourches caudines du préfet Renouf, languissant dans les bureaux de ce dernier de voir se réaliser leur songe, à travers l’arrestation du roi, fut une ridicule farce de l’administration. Cette même semaine la chefferie du roi Ma’utāmakia Vaimu’a déposa un recours contre le préfet pour ingérence dans les affaires coutumières. Le 22 mai, Atelea Vaitootai est intronisé Tu’i Mata Utu à la cause de l'antiroi du palais, succédant à Nicolas Vaitano’a, ancien maître de cérémonie du Lavelua Tomasi Kulimoetoke. Le 23 mai le président de l’Assemblée territoriale, Mikaele Kulimoetoke, rencontre à la maison de réunion du district de Mu’a la chefferie du roi Ma’utāmakia Vaimu’a, après s'être entrevu, deux jours auparavant, avec la chefferie de l'antiroi. Objectif : la rencontre des deux chefferies. Cette rencontre fut avortée. Le 28 mai, Pulunone Lakalaka est intronisé anti-chef de district de Mu’a à la cause de l’antiroi. Le 30 mai, les médias informent la population que cinq membres de la chefferie du Nord du roi est convoquée au tribunal pour y répondre du blocage de l’aéroport, sollicitation vaine puisque le protocole de fin de conflit rendait caduque toute plainte déposée antérieurement. La grande chefferie prend acte et informe la justice que désormais un avocat parlera en leur nom. Le 1er juin le préfet annonce que l’antiroi Kanimoa est officialisé. (Préfecture, 2016). A ce stade et par la force des choses, les fêtes de district deviennent de plus en plus stratégiques depuis l’intronisation de l’antiroi et la deuxième fête patronale du district de Mu’a approche à grands pas. C’est en quelque sorte un baromètre social et politique qui témoigne sans enquête formelle, la tendance du district. Depuis l’intronisation de l’antiroi, et surtout dans la semaine qui précède cette grande fête, les spéculations allaient bon train sur son éventuelle venue à cette seconde fête paroissiale dans le sud, si bien que pour annoncer les couleurs, le chef de district invita le roi Vaimu'a Ma’utamakia tel un message fort, limpide et claire, à l’antiroi que le district de Mu’a était acquis au roi du nord pour bien des raisons. Ainsi le dimanche 5 juin à la fête du Sacré-Cœur après l’office religieux du matin, le roi boit sa deuxième coupe de kava à Tepa dans le district de Mu’a, tandis qu’un escadron de gendarmes mobiles, venus spécialement de la Nouvelle-Calédonie pour l’occasion, sillonnait le district sud. A plus d’un détour sur les routes à Mu’a, l’on rencontrait ces gendarmes flânant aux abords des carrefours ou roulant au pas apeurés, circonspects d’un silence trop pesant. D’ailleurs certains de ces mobiles auraient pu prendre part, s’ils le désiraient, aux courses de scooter Vespa sur la RT2, faute d’avoir eu de la hiérarchie du travail sérieux et surtout utile à la collectivité. Mais c’est ainsi que l’édicte l’adage vivant « qui veut la fin met les moyens ». C’est tout simplement de la dilapidation de fonds publics. D’ailleurs, le préfet ce jour-là passera à deux reprises, s’agissait-il d’intox ou d’une simple constatation surprenante que l’antiroi qu’il venait d’officialiser était bien loin de faire l’unanimité ? Le 24 juin afin de donner du crédit à sa position tranchée au regard de la situation coutumière et pour noyer son désespoir partagé d’avoir été poliment écarté des deux fêtes paroissiales du district de Mu’a, le préfet suivit ahuri l’antiroi dans les fêtes de villages de Falaleu puis à celle de 'Ahoa, le 26 juin, faute de pouvoir assister à une cérémonie coutumière d’envergure paroissiale, gage de respect et d’obédience des sujets. Cet événement fera date dans les annales de l'histoire de Wallis puisque c'est la première fois qu'un préfet de la République, assiste aux fêtes villageoises. Le préfet était à ces cérémonies un grand évergète déposant délicatement les billets de banque sur la tête des danseurs, sans doute embarrassé d’une pratique contraire à sa morale, mais bien obligé de la mettre en œuvre pour le meilleur ou le pire du mariage inconvenant qu’il venait lui-même de sceller. Lavelua Ma’utāmakia Vaimu’a met à l’antiroi et au préfet dans le sud un KO deux – zéro, expéditif, digne d’un uppercut à la Mohammed Ali ou « tysonien ». Le 28 juin à l’ouverture de la session administrative de l’Assemblée territoriale, le Conseil du Territoire appelle l’assemblée à statuer sur le port obligatoire du casque, mais aussi à émettre un avis sur la question épineuse du code minier en vue de l’exploitation des terres rares dans les fonds marins de la collectivité. Survient alors le délicat sujet, mais tant attendu par le reste de l’assistance ce matin-là, la présidence de la commission des finances que Monsieur Kanimoa devenu antiroi ne peut plus, aux questionnements de certains politiques, continuer d'en occuper la présidence. Le secrétaire général ne pouvant plus contenir son émotion au regard des remarques, bien que justifiées, à l’encontre du conseiller-antiroi, sort de son silence et rétorque, que l’antiroi Kanimoa n’a toujours pas démissionner de son poste de conseiller territorial. En conséquence de quoi, il peut toujours garder son statut d'élu et assurer la présidence de la commission des Finances tout en étant antiroi et président du Conseil de la Circonscription. Voilà un bon modèle légué aux employés de l’Administration supérieure à un moment où le monde, l’Europe et la France, sont en crise et, que l’on fait la chasse aux mauvais employés tenus de justifier leur salaire. Comment diable l’intéressé peut-il assumer sa fonction coutumière et gérer en parallèle la présidence de la commission des Finances, lorsqu’il faut un tant soit peu de préparation pour ne pas improviser l’affectation des deniers de l’État et de la collectivité ? Le 29 juin, fête de la Saint Pierre et Paul fut, est, et restera sans doute un moment illustre dans l’histoire du district du nord puisque c’est la première fois, depuis plus de quelque vingt ans, qu’un monarque daigne se rendre au jubilé de ces deux piliers de l’Église catholique. Cette fois-ci il s’agit non pas d’un roi, mais bien d’un roi et d’un antiroi. Tous deux assistent à l’office religieux du matin et s’en vont par la suite chacun de son côté pour les cérémonies coutumières. Si la chefferie du roi est au complet à Vailala, il manque à celle de l’antiroi la quasi-totalité de la chefferie du sud. Le 30 juin, la session administrative suit son cours et ajourne la modification proposée à la composition de la commission des Finances jusqu'à la prochaine session. Le vendredi 1er juillet à l’enterrement d’une personne au cimetière de Matā’utu qui fait aussi office de cimetière paroissial, des partisans de l'antiroi sont surpris en train d’endommager la voiture du roi Ma’utāmakia Vaimu’a ainsi que celle de l’un de ses ministres. Dans l'immédiat plusieurs plaintes furent déposées à la gendarmerie. Le 4 juillet par un courrier le vice-rectorat de Wallis et Futuna avise le Lavelua Ma’utāmakia Vaimu’a qu’il devra reprendre son poste d’agent au collège de Mala’e dans le nord.
Le désordre et le politiquement incorrect
Des hommes, un évergète de l’État : les abus de pouvoir du préfet dans le royaume de 'Uvea (Îles Wallis)
Quand le garant de l’ordre républicain sombre dans la partialité
La partialité du représentant de l’État est éclatante à travers la série de délibérations qu’il a lui-même publiées au Journal Officiel de Wallis et Futuna (n° 415 du 3 juin 2016), prise de façon unilatérale. Il aurait été simplement de bon aloi et d’un savoir-vivre élémentaire, qu’il convoquât l’ancienne Grande chefferie officielle, encore légitime et souveraine aujourd’hui afin de lui signifier sa désapprobation. Son impuissance lui a valu de précipiter le cours des choses et de tomber de Charybde en Scylla, de sa partialité vers une crise institutionnelle, maculée de ses abus de pouvoir et de ses ingérences répétés, aspect gravissime qui incombe à sa fonction de personnage incarnant l’État français et la continuité de ses services administratifs. Au nom de quel droit s’est-il arrogé le pouvoir de démettre l’ancienne Grande chefferie ? Simplement parce que cette dernière avait eu l’humilité de mettre en œuvre un geste de paix et d’apaisement en soutenant un roi du nord et de décider officiellement que le titre de roi de 'Uvea n’était pas l’apanage du district de Hahake, ni celui de Mu’a, ni celui de Hihifo, encore moins celui d’un antiroi, mais que c’était un titre appartenant à l’île toute entière ? Ou encore que travailler avec cette dernière pour lui était quasi impossible car elle ne serait pas une mince affaire sur son parcours déjà tortueux, mais surtout car le représentant de l’État veut avoir affaire à des interlocuteurs aisément monnayables ? Le préfet n’est pas habilité en Conseil de circonscription à prendre des décisions mais ne fait que rendre exécutoire les décisions émanant du conseil. Par ailleurs, les titres de chefs sans exception existent de par la population que constituent les clans des royaumes qui sont producteurs des futurs chefs, par la population qui justifie leur existence sociale et coutumière, mais aussi par la cérémonie de kava d’intronisation qui leur est réservé, sceau indéfectible de leur charge coutumière en liaison directe avec la terre. C’est ainsi que l’officialisation est une marque de reconnaissance de l’État français envers la personne du chef et non à la multitude. Il apparaît que les chefs qui ont été démis de leur fonction au Conseil de circonscriptionont fait l’objet tout simplement d’un abus pouvoir car en leur qualité de membres de ce conseil, énoncé par l’article 10 de la loi statutaire de 1961 (Légifrance, 1961), ces derniers se devaient de démissionner d’eux-mêmes, avant que le préfet n’officialise l’antiroi et sa grande chefferie. D’ailleurs, il annonce officiellement sur les ondes une contre-vérité lorsqu’il affirme observer un silence volontaire de dix jours, au nom de l'impartialité de l’administration et de la paix sociale, et officialise l’antiroi le lendemain de son intronisation, c’est-à-dire le lundi 18 avril. Force est de constater que les exactions trop nombreuses et flagrantes de l’Administrateur supérieur remettent sérieusement en cause la parole de l’État dans la collectivité de Wallis et Futuna.
Le lien inné du coutumier à la terre
Dans les royaumes de Uvea et de Futuna, les pulekolo (chefs de village), les aliki fa’u (les six ministres coutumiers) et le hau (Uvea) ou sau (Futuna), c’est-à-dire le roi, ont intrinsèquement en eux de par le titre qu’ils portent mais, aussi par leur distribution géographique, un lien indéfectible et inaliénable à la terre (kele) dont ils sont aujourd’hui les seuls dépositaires.
Wallis et Futuna sont des sociétés de tradition orale qui ont contre vents et marées perduré, non sans transformation, mais gardent encore aujourd’hui leurs prérogatives sur le foncier.
Il est vrai qu’aucune disposition du statut de 1961 n’établit expressément que la compétence en matière de régime domanial et foncier appartient à l'autorité coutumière. Il est plutôt énoncé aux paragraphes 5°, 6° et 7° de l'article 40 du décret n° 57-811 du 22 juillet 1957 rendus applicables à Wallis et Futuna par l'article 12 de la loi de 1961 prévoient que l'Assemblée territoriale prend des délibérations portant réglementation en matière domaniale et foncière et notamment en matière de biens et droits immobiliers régis par la coutume.
C’est là où le législateur de l’époque s’est peut-être trompé, de façon délibérée ou non certes, sinon nous n’aurions pas ce flou juridique ondoyant sur le foncier pour l’esprit cartésien d’un Européen, que par pragmatisme, l’Assemblée territoriale n’a jamais de toute son existence songé à empiéter sur ce domaine dévolu à la Grande Chefferie.
Sur la question relative à la compétence générale en matière de gestion du foncier, en 2009, le préfet d’alors saisit le tribunal administratif (TA) de Matā Utu, l’appelant à lui fournir son avis sur ce problème. Le TA considéra qu’ : « A ce stade de l’analyse, force est de constater que le foncier est de nature coutumière, qu’il relève des autorités coutumières, et cette sphère juridique coutumière s’oppose à ce que l’Assemblée territoriale crée du droit en matière foncière, qu’elle doit se borner à constater, à codifier, mais qu’elle ne dispose d’aucun pouvoir normatif qui empiéterait nécessairement sur le pouvoir des autorités coutumières. C’est la raison pour laquelle l’AT ne s’est jamais emparée de cette compétence ». (Avis n°01/09 du 17 février 2009 du TA de Mata’Utu).
Il faut souligner aussi que les premiers conseillers de l’assemblée furent également des chefs coutumiers. Sans doute faudrait-il que l’Assemblée territoriale statue une fois pour toute sur ce point et demande à l’Etat le transfert de cette compétence à la chefferie. Par ailleurs dans certains accords passés précédemment entre l’administration et les coutumiers ou avec des propriétaires terriens, comme ce fut le cas dans le blocage de l’aéroport, il devient plus qu’urgent pour un coutumier de mettre un holà pour signifier à la machine administrative, qu’il faut s’arrêter, s’asseoir et palabrer. Le chef est largement et pleinement dans ses compétences puisqu’il est de droit coutumier et en sa qualité de chef coutumier, il est seul garant de la terre de ses sujets. Peut-être oserions-nous penser aujourd’hui qu’avec les enjeux économiques actuels de la collectivité que certains politiques seraient prêts de « vendre la terre » à l’État ? Il apparaît de plus en plus probant, que l’administration au nom du développement économique avec la complicité de locaux, languissent de voir le foncier devenir cessible et aliénable un jour pour en disposer librement. Lorsque le préfet en mission dernièrement à Paris en compagnie des chefferies, des parlementaires, du conseiller économique et social et du développement durable et de certains politiques, annonce ses trois principaux axes de développement pour les années à venir, cela pourrait amuser plus d’un économiste anglo-saxon de retour chez lui d’un colloque à Suva sur le développement économique régional, patientant son heure d’envol à l’aéroport de Nandi (Fidji). Les trois axes sont les suivants. Libéraliser le foncier pour faciliter l’implantation de firmes transnationales (FTN); faire venir à 'Uvea et Futuna une partie du flux de touristes venant en farnientes sur les îles Fidji, par exemple ; explorer en vue d’une exploitation les terres rares qui gisent au large des eaux territoriales de Wallis et Futuna (Wallis et Futuna 1ère, 13 juillet 2016).
Le premier axe soulève encore le problème du foncier qui est un faux problème pour le développement.
La question est plutôt de savoir si, Wallis et Futuna ont encore à l’heure actuelle besoin de développement à grande échelle qui suppose la venue de FTN ou faudrait-il penser un développement plus modeste passant simplement par les énergies renouvelables et la couverture numérique complète et haut-débit du territoire ? Ce modèle de développement serait plus sain pour les populations et plus en phase avec l’écosystème ô combien fragile que nous avons à Wallis et Futuna. Le second axe de développement est une farce lorsque l’on sait que l’État lui-même et des personnalités politiques, en charge ou à la retraite, sont actionnaires de la compagnie, qui vous remerciait il y a quelques années, de l’avoir préférée à une compagnie concurrente dans un autre monde. Parler de tourisme dans des îles à écosystèmes très fragiles relève d’une volonté d’altérer et de détruire l’environnement et par la suite des structures coutumières. C’est en quelques mots, la porte ouverte à n’importe quoi. Si cet aspect s’avère être un moyen de développement, le tourisme chez l’habitant semblerait le plus approprié. Enfin, le dernier axe de développement que l’administration aurait bien voulu faire figurer en tête, mais l’attrape-nigaud aurait été trop flagrant, la question des terres rares. Elles soulèvent bien des interrogations autant environnementales qu’existentielles. Filtrant toujours de la mission du préfet et des coutumiers à l’Élysée, madame la ministre des Outre-mer a annoncé la venue à Wallis et Futuna qu'«une mission d'exploration et de pédagogie sera envoyée à Wallis et Futuna, portant sur les richesses minières sous-marines ». George Pau-Langevin recevait les rois de Futuna et les représentants de l'antiroi de Wallis en visite officielle dans l'hexagone. Elle poursuit que «nous avons convenu d'envoyer une mission qui soit à la fois une mission d'exploration, qui va entendre les inquiétudes des populations, et une mission pédagogique qui va expliquer aux gens comment les choses peuvent se passer». (Wallis et Futuna 1ère et AFP, 2016)
Cette mission d’exploration et de pédagogie est semble-t-il un défoncement de portes ouvertes, lorsque l’on sait qu’à Futuna entre 2010 et 2013, l’IFREMER a exploré les fonds marins en consortium avec Eramet et Technip.
Devant les résultats prometteurs, Eramet a déposé au nom de sa filiale SialéO, une demande de permis exclusif de recherche qui s’est rapidement heurtée à l’incompatibilité juridique du code minier national et le statut politique de Wallis et Futuna. Le sujet est en discussion. Autre exemple, parmi tant d’autres, est l’exploration menée par la Japan Oil Gas and Metals National Corporation, la Chatam Rock Phosphate ou encore la société minière TransTasman, au large des eaux néo-zélandaises, qui ont obtenu un permis d’exploitation par le gouvernement, mais ensuite se sont vus refuser le permis d’exploitation par l’Agence environnementale du pays. Le motif revenant en force est la forte pollution de ces exploitations off-shore sous-marines. Si l’État français ambitionne le profit financier harangué depuis Wall Street, aux dépens des Wallisiens et des Futuniens, il s’expose à ouvrir la boîte de Pandore et de tout abandonner derrière lui pour la rouvrir ailleurs. Si les dirigeants de la collectivité et nous simples citoyens, nous ne nous penchons pas sérieusement sur cette question, si nous ne sommes pas solidaires les uns les autres, fustigeant la corruption de certains de nos gouvernants, refusant de nous jeter pieds et mains liés dans la bulle financière mondiale, nous serons coupables de non-assistance à une Terre/terre en danger. D’autres champs de nodules polymétalliques gisent au large des fonds marins de l’Amérique centrale sur sa côte Pacifique, prénommée zone Clarion-Clipperton (L’Usine nouvelle, 2015). L’État français, peut déjà s’y exercer avec d’autres consortiums étrangers, car à la différence fondamentale de Wallis et Futuna, cette région est inhabitée. Si la France et les puissances de ce monde n’ont pas encore la technique comme le rappelle Rémi Gallin, chef du bureau de la gestion et de la législation des ressources minérales non énergétiques au ministère du Développement durable, «aucun État, même pionnier, n’est en mesure de proposer une mise en exploitation de ce type de champ». Selon nous, les technologies nécessaires ne sont pas disponibles, tant en ce qui concerne le ramassage que la remontée du minerai ». Ils n’auront qu’à prendre leur mal en patience.
Une présomption d’innocence valable pour l’océan et non pour les Wallisiens et Futuniens
Depuis l’affaire du blocage de l’aéroport qui l’a mené dans un acharnement aveugle et opiniâtre contre la personne du roi Ma’utāmakia Vaimu’a, l’Administrateur supérieur commet deux effractions. Tout d’abord, il ne respecte guère la présomption d’innocence du monarque, de même quand celui-ci était encore chef de district. Tout aussi obstiné dans son raisonnement, il reste qu’à ce jour que la culpabilité de l'intéressé n'a pas été établie. En outre bien qu’un protocole de sortie de conflit eût été signé le 2 décembre dernier, où il était question surtout de la réouverture de l’aéroport et de l’abandon de toute poursuite judiciaire comme notamment le référé condamnant les chefs coutumiers à une amende de 100 000 francs Pacifique par jour (Lataste, mars 2016), le préfet a délibérément ignoré le protocole. Peut-être a-t-il oublié que le blocage avait eu lieu dans le nord et que par solidarité, le reste de la chefferie a été tout naturellement solidaire, sans y participer physiquement, de leurs homologues du district de Hihifo. Somme toute, il apparaît avec limpidité qu’il s’agit là d’un simple règlement de compte où son insuffisance de bon sens et d’humilité en terre de 'Uvea lui a valu de perdre la face. Il a tendu le bâton pour se faire battre.
« …Je préfère mourir debout que de vivre à genoux » (Stéphane Charbonnier dit Charb)
Les royaumes de 'Uvea et de Futuna, terres de paradoxes, viennent encore une fois d’accrocher à leur tableau de chasse, un énième paradoxe de la République française dans l’histoire de la Ve, malgré elle, puisque cette contradiction est à la solde du préfet. Il s’agit du mariage antinomique que l’Administrateur supérieur a contracté avec l’antiroi. Le caractère inédit de cette union, est le fait que pour la première fois, un gouvernement socialiste officialise un conseiller-roi de droite, des Républicains (ex UMP). Est-ce une nouvelle forme de cohabitation républicaine par le vase communicant de la coutume ? Les agissements et les volte-faces du préfet dans cette situation politico-coutumière sont une version plus édulcorée et sournoise de l’affaire du Rainbow Warrior où l’Administration œuvre pour disposer librement des terres et des fonds marins de 'Uvea et de Futuna.
C’est tuer l’essence de la coutume, celle des rois et des chefs et celle des hommes de la terre en définitive.
Comité de défense des îles Wallis et Futuna – Kautahi puipui mo malu'i o 'Uvea mo Futuna – juillet 2016
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