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Paul Ariès (1) veut faire de 2012 un moment d'unedouble révolution : celle de l'objection de croissance, celle du «bien vivre». Pour cela, il propose au NPA de faire "cause commune".Au moment où EE-LV se perd entre les candidatures de VRP de TF1- Gel douche et se voit dictée sa ligne par le futur commentateur de foot sur Canal +, son propos doit retenir toute l'attention de la gauche anticapitaliste et antiproductiviste.
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L'Objection de croissance iradivisé aux élections de 2012. J'aurai souhaite une campagne de la décroissancefortement ancrée à gauche et faisant sienne les mots d'ordre de défense de lagratuité du bon usage face au renchérissement du mésusage (avec sa traductionpolitique autour de la revendication du revenu garanti), une campagne de ladécroissance fondée non pas sur l'idée d'une chimérique «panne sèche» dusystème et pire encore sur la thèse qu'i l suffirait que chacun consomme moins(variante du malthusianisme économique qui met la décroissance au service de ladroite et du Medef) mais sur la conviction qu'il est possible de construire unautre monde. J'aurai aimé que la décroissance soit capable de faire ce choix del'anticapitalisme et d'un éco-socialisme conséquent, car je redoute que les pas(de géants ou de mains, chacun appréciera) accomplis, depuis quelques années,par une fraction des gauches vers l'antiproductivsime ne soient encorehésitants. .
L'anticapitalisme n'est pas encore totalement guéri du productivisme(la question se pose depuis deux siècles et il ne suffit pas d'opposer un bonMarx à un méchant Lassalle ni même un bon Marx à un mauvais Marx).L'anticapitalisme peut à tout moment retomber dans les mêmes chimères. Nousavons en même temps que le seul système économique non croissanciste par naturepeut être le socialisme (un éco-socialisme conséquent) car le capitalisme, lui,est intrinséquement productiviste. Nous savons aussi (le NPA autant que moi)que le seul chemin qui peut conduite au-delà de l'économisme de droite et degauche est la subversion de la Valeur d'échange par la valeur d'usage. Le NPAfait donc partie des forces politiques (comme une fraction du Front de gauche)secouées par ces débats qu'ont su remettre au goût du jour les milieux de ladécroissance, de l'anticonsumérsime mais aussi les mouvements amerindiens,grecs ou une partie du mouvement en Guadeloupe. Même une partie de lasocial-démocratie récupère aujourd'hui certains thèmes en les vidant de leursubstance (question du revenu garanti, question de la relocalisation, du«care». du ralentissement). Le NPA peut avoir la co-responsabilité de traduirecette mouvance en parole et en actes politiques. C'est pourquoi j'avais proposéau moment du choix de rejoindre le NPA lors de sa fondation qu'il se mue en NP2A(Nouveau parti anticapitaliste et antiproductiviste, ) tout comme j'avaisproposé, sans plus de succès, au Parti de gauche de se métamorphoser en Partide gauche écologique.
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Cette mutation est toujourspossible et 2012 peut en donner l'occasion. Le NPA peut choisir de répéter lesexcellentes campagnes de Besancenot. Il ait le faire et il n'est jamais inutilede dire ses 4 vérités au capitalisme mais on sait d'avance ce qu'il sortirapolitiquement de cette répétition.
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Le NPA peut aussi faire le choix du risque,celui du débordement du son propre héritage, celui de l'ouverture à des thèmesde campagne et à des formes de campagne inédits. On sait qu'une élection sejoue sur quelques mots d'ordre, sur quelques symboles forts, sur un stylepolitique. Ce que je propose donc au NPA c'est qu'il accomplisse une doublerévolution en une campagne. Celle de l'antiproduictivisme (de l'objection decroissance) mais aussi celle du «bien vivre» (buen vivir). Je sais que jedemande beaucoup au NPA mais je sais aussi qu'il fait partie des rares forcespolitiques capables de conduire cette véritable révolution interne auxdifférents courants du socialisme. J'entends bien la position du NPA parrapport au parti socialiste et donc aux alliances possibles mais je dirai que siLe NPA a raison par rapport au social-libéralisme, il s'arrête cependant encoreen chemin. J'oserai dire qu'il a accompli la partie la plus facile... compte tenude sa propre histoire. L'autre partie du chemin consisterait à dépasserl'enfermement dans le seul discours anticapitaliste pour s'ouvrir à unantiproductivisme conséquent que la notion d'éco-socialisme n'épuise pas. Jecrois surtout que ce double ancrage dans l'objection de croissance et le «bienvivre» permettrait enfin et surtout de basculer vers un discours et despratiques tout aussi radicales, mais qui camperaient sur l'autre face de lacritique, celle de la construction d'un autre monde.
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On ne pourra vaincre lecapitalisme et le productivisme qu'à partir de lieux qui ne soient ni l'un nil'autre. 2012 peut être un moment de ce basculement vers ce que je nomme unegauche dissidente, une gauche qui pratique autant (sinon plus) l'insurrectiondes existences que celle des consciences, une gauche qui sache que résisterc'est créer, une gauche qui accepte de faire sécession, car si on ne pourrapeut être pas changer ce monde, rien ne nous interdit de commencer à enconstruire un autre. Je suis convaincu qu'une nouveau langage de l'émancipationse cherche aujourd'hui à l'échelle planétaire: le sumak kawsay des peuplesindigènes amerindiens, le «buen vivir» équatorien et bolivien, Eudémonia ( lavie bonne) de nos amis grecs, les «nouveaux jours heureux» descitoyens-résistants. Ces deux révolutions en une élection serait aussi lameilleure réponse à tous ceux qui refusent de suivre le NPA dans ce qu'ilsconsidèrent être le choix de l'isolement face à une alliance avec le FG.J'invite déjà tous les adhérents du NPA à réagir au contenu programmatiquedéveloppé dans le «Hors série» n° 2 du Sarkophage (Viv®e la gratuité) qui seraen kiosque d'ici fin avril 2011. Nous y développons le cheminement vers unesociété décroissante par le choix politique de la gratuité. J'avais proposé, en2006, à José Bové d'être ce candidat de l'antiproductivisme, celui du revenu garantiinconditionnel (cela ne suffit pas à faire un projet mais cela en défait déjàbeaucoup), Je propose aujourd'hui au NPA (comme au Front de gauche) de ne pasrépéter l'erreur de José Bové qui fut de croire qu'il suffisait encore d'êtreseulement un candidat antilibéral (anticapitaliste). Les objecteurs decroissance ont besoin aujourd'hui de cette double révolution de la gauche faceà la montée en puissance des thèmes de droite y compris au sein de certainscourants de la décroissance.
Paul Ariès est le directeur du Sarkophage, journal des gauchesantiproductivistes
(1) http://fr.wikipedia.org/wiki/Paul_Ari%C3%A8s