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Si vous flânez sur le site du MODEM, vous découvrez les têtes de liste que Bayrou s’est choisi pour les prochaines élections européennes de juin 2009 - sans demander l’avis de la piétaille militante de son mouvement.
Parmi elles, Robert Rochefort. « Expert » de tous les plateaux télévisés ( invité perpétuel de « Ripostes » du sarko-compatible Serge Moatti et des émissions « C dans l’air » et « Mots croisés » toutes deux animées par Yves Calvi sous la férule chiraco-sarkozienne d’Arlette Chabot).
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Robert Rochefort, présenté comme sociologue, est (était ?) le « patron » du CREDOC, le Centre de recherche pour l’étude et l’observation des conditions de vie (ouf !). Il sera la tête bayrouiste dans le Sud-Ouest.
Questions et réponses sur mesure. Mes commentaires seront soulignés.
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Pourquoi a-t-il été investi par Bayrou ?.
Extraits des réponses de l’intéressé : « j'étudie depuis des années la société française et ses craintes, ses angoisses et j'ai envie de quitter ce rôle d'observateur pour devenir un acteur » Devenir un acteur des craintes et des angoisses ? Drôle de programme !« En 1993, lorsque j'ai commencé à analyser la société, la crise frappait déjà le pays. On parlait déjà d'une société angoissée, inquiète de son avenir. Cette crise a perduré jusqu'à la fin des années 1990, puis on a eu une période de croissance. Durant cette époque, on a connu deux alternances : la droite de Jacques Chirac puis la gauche avec Lionel Jospin. J'ai pu constater que ni l'une ni l'autre n'avaient pu redonner confiance au pays. Aujourd'hui, la France se sent déclassée, ringardisée, perdue. »
Ce n’est pas du Baverez, c’est copié/collé. Le coup du déclin et de la ringardisation est typique des familles politiques marquées très à droite. Surtout quand la productivité a été multipliée par 1,8 durant la période décrite…
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Quelle place pour le Modem entre l'UMP et le PS ?
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"D'après mon expérience, on a en France environ 15% des gens qui plaident en faveur des réformes, qui souhaitent avancer, qu'ils soient à gauche ou à droite. Ce sont des cadres, des intellectuels, des professions libérales. Mais les classes populaires ne comprennent pas la nécessité de ces réformes et se sentent exclues. » (…) la hausse du Smic, de la consommation, ce ne sont pas des solutions que j'approuve. »
Stupides, vraiment, ces salariés à 1100 euros par mois qui ne comprennent pas la nécessité de briser les services publics ou d’être déremboursés des frais de santé…
Comment osent-ils ces gueux demander une hausse de leur salaire aussi misérable soit-il puisque Rochefort le dit : ce n’est pas la solution !
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Quel objectif fixez-vous pour le Modem lors de ces européennes ?
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« En termes de chiffres ? De faire le plus haut possible. Le Modem s'affirme comme la troisième force politique du pays, nous souhaitons en faire la deuxième. »
(…) « Le Modem porte des valeurs qui sont partagées par la société française. C'est un parti humaniste (1) et social, ce ne sont pas des mots creux. La droite est associée au capitalisme, la gauche au socialisme, deux termes usés, deux manières de gérer la société qui sont usées. »
La troisième force, on connaît. Un peu IVème Répblique avec Guy Mollet comme pivot. Humanisme ? Oui ? Très bien mais c’est quoi le mot, particulièrement ronflant, répété à l’envi ? Qu’en est-il des rapports sociaux ? Y aurait-il des incursions sociales dans la propriété privée ? L’eau, le logement, l’énergie, l’accès aux savoirs et tant d’autres besoins ou droits humains fondamentaux doivent-ils être considérés comme des « biens communs » ou laissés tels quels au gré de l’appétit des marchés et des multinationales ? On en saura rien !
Obligé, donc, de se pencher sur la trajectoire de l’éleveur de pur-sang - à ce titre, Bayrou ne paye pas l’ISF !Humaniste et social, qu’il vous dit….
Balladur, Chirac, Juppé, peu importe dès lors qu’il reste ministre.Nommé ministre de l’Education Nationale, en 1993, dans le gouvernement Balladur (un humaniste !), il entame illico une réforme de la loi Falloux qui aurait permis le déplafonnement des subventions en faveur des établissements d’enseignement privé dont les « confessionnels » pour qui son cœur de catho penche. Le 24 janvier 1994, un million de manifestants (selon toutes les sources) s'en prennent à ce projet, pour défendre l'école laïque. La méthode de François Bayrou est alors critiquée à droite comme à gauche : il est accusé de vouloir « réformer à la hussarde ». Le projet de François Bayrou est rejeté par le Conseil Constitutionnel...
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En 1995, il soutient Édouard Balladur lors de la présidentielle mais obtient, après moult contorsions, de Chirac et Juppé (un autre humaniste !) un portefeuille élargi à l'enseignement supérieur, à la recherche et à la formation professionnelle.
François Bayrou reste ministre de l'Éducation nationale jusqu'à la dissolution de 1997 et la formation , dans la foulée, du gouvernement de la gauche dite plurielle emmené par Jospin..
La monomanie du déficit chez Bayrou et ses affidés
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Un modeste étudiant en sciences éco peut facilement contredire le caractère obsessionnel des envolées de Bayrou sur « le déficit » : en investissant dans le TGV ou dans la construction d’autoroutes hier, ou aujourd’hui dans le ferroutage ou la généralisation de l’ADSL à tout le territoire, les gouvernements accroissent le déficit public au sens comptable du terme, puisque l’investissement est considéré comme une dépense de même nature que l’entretien du jardin de l’Elysée par exemple. Mais contrairement à ce que dit le Modem (et autres partis « de gouvernement), ces investissements ne se font pas au détriment des générations futures.
Amusant : depuis la crise mondiale du capitalisme, les tenants du libéralisme se rallient à la thèse « déficit = investissement » !
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La pensée économique du Modem est très enfermée dans l’idéologie néo-libérale. Son conseiller, dans ce domaine, est Jean Peyrelvade, l'ex-Président du Crédit Lyonnais (LCL).
Un seul exemple. Pour lui, la crise des subprime ne fait que révéler «un défaut de régulation bancaire». C'est-à-dire que Jean Peyrelevade nie, comme tous les tenants du néo-libéralisme, l'élément essentiel de cette crise : la baisse de la demande suite à l'appauvrissement croissant des salariés et des classes moyennes.
Crise du pouvoir d’achat ? Connaît pas !
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Autre conseiller économique du Modem, Christian Saint Etienne, lui, est un djihadiste du libre-échange intégral, un pur tatchérien. Principal rédacteur du programme du Modem, cet ancien responsable du FMI et de l'OCDE a fini comme un vulgaire Cavada : il a rejoint la majorité sarkozyste lors des dernières élections municipales.
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Pour conforter son pôle économique, François Bayrou s’est donc entouré de Robert Rochefort. Un renfort qui, nous l’avons vu, ne risque pas de remettre en question la pensée unique néo-libérale qui est le principal marqueur idéologique du MODEM.
Quant aux envolées lyriques sur les libertés et la séparation des pouvoirs, la trajectoire politique de Bayrou montre qu’elles tiennent davantage de la posture que des convictions.
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Malgré tout entre un Rolex 1er et un Bayrou, je préfèrerai le second. Jugement fondé uniquement sur mes craintes de dérapages vichyssois du premier.
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(1) En deux mots : L’humanisme est un mouvement intellectuel qui s’est développé à la Renaissance. Il est censé viser l'épanouissement de l'homme. C’est aussi un concept philosophique tablant sur une supposée prédisposition humaine à distinguer le bien du mal. L'humanisme implique la recherche de la vérité et de la moralité et rejette la validité des justifications de transcendances comme, par exemple, une dépendance à l'égard de la croyance ou de textes présentés comme d'origine divine.
Nombreux ont été les ouvrages plus ou moins savants posant des questions comme « L’existentialisme est-il un humanisme ? ». De même pour le marxisme.
Jamais la question « Le capitalisme est-il un humanisme ? » n’a été posée !