victor watson

Abonné·e de Mediapart

1 Billets

0 Édition

Billet de blog 17 novembre 2022

victor watson

Abonné·e de Mediapart

Grève historique à l'université de Californie

Le 14 novembre dernier une grève historique concernant 48000 travailleurs de l'Université de Californie à débuté. Une longue et difficile négociation entre la gestion de l'université et différente catégories de chercheurs s'est rendue publique cette semaine dans un État peu familier de ce mode d'expression.

victor watson

Abonné·e de Mediapart

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Depuis maintenant quatre jours les doctorants, post-doctorants (postdoc) et les academic researcher (un autre type de contrat à durée déterminée de chercheur) de l'université de Californie (UC) sont en grève. Les contrats encadrant les conditions de recrutement et de travail de ces catégories sont arrivés à échéance au cours de l'année dernière et ont été étendus à plusieurs reprise alors que les négociations pour l'établissement de nouveaux contrats ne parvenait pas à un accord. En ce début novembre les contrats n'ont pas été prolongés et la clause de "non-grève" inscrite dans ceux-ci n'est plus applicable. L'union des travailleurs de l'automobile (UAW) fédérant entre autre les syndicats des formations concernés à donc appelé les 48000 employés répartis sur les 10 campus de l'UC à voter entre le 26 octobre et le 2 novembre en faveur d'une grève. La nécessité des deux tiers de vote favorables à largement été atteinte avec plus de 35000 vote en faveur de la grève soit plus de 98% des votes exprimés. Une soudaine augmentation très discrète et sous le niveau de l'inflation ne concernant que les (~500) postdocs du Lawrence Berkeley National Laboratory  (LBNL) à été perçu par la plupart comme une tentative de semer la discorde et diviser la coalition des différentes catégories unies dans la lutte. Par dessus tout, cette grève à été rendu possible par un comportement de sabotage des négociations de la part de l'UC dont la liste est disponible ici : https://www.fairucnow.org/ulp/  

Illustration 1
Banniere de l'UAW

Suite à ce vote, dès le lundi 14 novembre, les lignes de piquets se sont constituées freinant l'accès des piétons aux bâtiments de l'université, et même dans le cas par exemple du LBNL, l’accès des véhicules à l'ensemble du laboratoire. Depuis, le rythme des négociation s'est accéléré à tel point qu'on dénote un certain manque d'organisation du côté de l'UC convoquant plus de reunions qu'il n'est possible d'en tenir en un journée. Ces progrès bien qu'encourageant compte tenu du status-quo des 18 derniers mois ne laissent pas vraiment entrevoir la possibilité d'un résolution rapide.

Les travailleurs de l'UC par l'intermédiaire de l'UAW ont évidement des demandes économiques qui dans un contexte inflationniste sont difficiles à balayer. Le coût de la vie étant déjà très cher en général en Californie, le logement dans certains endroits comme la baie de San Francisco (Où se trouve notamment le campus de UC Berkeley) est très difficilement accessible à ces travailleurs qui logent beaucoup chez l'habitant ou en colocations. Une majorité souffre de rent burden ce qui signifie que leur loyer dépasse, même avec les stratégies cités plus haut, 50% de leur revenus net. Les postdocs demandent aussi l'accès à des aide pour l'enfance. La moyenne d'age vieillissant parmi cette catégorie fait que beaucoup veulent créer une famille alors qu'ils n'ont pas encore de poste permanent. Il est intéressant de savoir qu'avoir un enfant en bas age dans la baie de San-Francisco peut avoir un coût mensuel autour de 2000 dollars. Les assurances santé sont aussi à l'ordre du jour et l'ensemble des travailleurs sensible au problème du changement climatique demande aussi une aide financière dirigée vers l'utilisation des transports publics.

Illustration 2
Rally devant Sproul UC Berkeley

Sur les lignes de piquet de grève, une grande partie du rôle des picket leaders est d'éduquer les travailleurs arrivant devant ce qui constitue pour beaucoup la première expression de grève à laquelle ils sont confrontés. Jusqu'à aujourd'hui la majorité des personnes dont l'emploi du temps est chamboulé par ces piquets de grève ont une attitude positive à l’égard des grévistes, et les différentes structures rappellent quotidiennement à leur employés d'être patients et respectueux envers leurs collègues grévistes. Une incitation à travailler à distance pour ceux qui le peuvent jusqu'à thanksgiving (jeudi prochain) à même été adressée aux employés du LBNL. Certains travailleurs comme les livreurs de DHL ou UPS, étant eux même syndiqués ont le droit de refuser de franchir un  piquet de grève en signe de soutient et chaque véhicule fraisant demi-tour est applaudi et remercié par les grévistes.

À cet heure les négociations continuent, et tout le monde espère une resolution rapide de ce conflit social sans précédant en Californie. Il s'agit aussi de la première grève de postdocs de l'histoire des États Unis, comme aiment à le rappeler les picket leader postdocs. Le mot d'ordre est de tenir un jour de plus que l'université ne le peut, et même si l'UC a le droit de suspendre la paie des travailleurs pour leurs jours de grève un fond special est mis à disposition par l'UAW. Il suffit de signer pour 5 des 10 demi journées de piquet par semaine pour avoir droit à cette aide qui bien qu'elle soit très inférieure aux salaires semble constituer un moyen de pression supplémentaire en faveur des gréviste dans les négociations. 

Un autre caillou dans la chaussure de l'UC est son incapacité à invisibiliser le mouvement. La grève étant un évènement rare ici, les journaux nationaux tels que le NewYork times ou le Washington Post mentionnent le mouvement dès le premier jour de grève et le Los Angeles times en a même fait sa une et consacré plusieurs articles au sujet. Des personnalités publiques de la gauche américaine telles que Bernie Sanders, sénateur du Vermont et candidat à la dernière investiture du partit démocrate pour la présidentielle, Alexandra Ocasio-Cortez, congresswoman de l'état de New York, Alex Padilla, sénateur démocrate de Californie ou encore Adam Schiff du parlement local de Californie.

Illustration 3
B

La semaine qui nous sépare de la fête nationale de thanksgiving vont être décisifs pour les grévistes mais aussi pour la création d'un nouveau standard pour les droits des travailleurs de l'enseignement supérieur et de la recherche en Californie.

Victor Watson (Postdoc)

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.