Le monde mue, les hommes migrent. 214 millions de personnes vivent aujourd’hui en dehors de leur pays de naissance. Ce chiffre ayant augmenté de 42 % en moins de deux décennies, le vingt-et-unième siècle promet d’être mouvementé ! En Europe, ces franchissements de frontières génèrent des angoisses irraisonnées. Ils sont pourtant nécessaires à un continent vieillissant et amènent plus d’enrichissements que de réels appauvrissements. S’il est bien un secteur de l’économie qui le prouve, c’est le nôtre, celui des échanges musicaux.
Les musiciens migrants ou leurs enfants (voire leurs petits-enfants) sont, par exemple, à l’origine de quelques-unes des plus belles « succes stories » françaises de ces dernières années. A tel point qu’à l'étranger, le pays est désormais principalement représenté par des musiciens d'origine caribéenne, africaine ou latine. Sur les scènes des grands festivals d'Europe, des Amériques ou d'Orient, le son de la France, c'est avant tout le zouk de Kassav', le raï de Khaled ou la morna de feue Cesaria Evora.
Ce phénomène dure depuis les années 80 et n'est pas près de cesser. Il s'explique avant tout par l'histoire coloniale du pays, ses liens anciens avec l'Afrique du nord et de l'ouest, les petites et grandes Antilles, les îles de l'océan Indien... Paris, Marseille, Lyon et leurs banlieues abritent des centaines de milliers d'hommes et de femmes venus de ses anciennes colonies, rejoints après-guerre par les ressortissants de pays voisins, comme le Portugal. La plupart d'entre eux restent attachés à la langue et aux rythmes que leurs aïeux ont apportés dans leurs bagages. Ils les célèbrent régulièrement, lors de bals chaleureux et colorés donnés dans leurs espaces associatifs ou d'incroyables événements communautaires organisés dans les plus grandes salles de concert. Plus d'une carrière prestigieuse (citons également Salif Keïta, Idir, Yuri Buenaventura, Papa Wemba...) a commencé dans ces circuits...
Mais les artistes qui en sont issus ne sont reconnus en France que s’ils sont au préalable ovationnés outre-Manche ou outre-Atlantique. Au début de leur carrière, les programmateurs radios ou les directeurs de festivals leur préfèrent généralement des musiciens moins originaux, qui chantent en français sur des rythmes internationaux. Pour les défendre, est né le Prix des Musiques d'ICI, Diaspora Music Awards, qui accompagne chaque année 3 ou 4 lauréats.
Comme la France, de très nombreux pays hébergent de vastes communautés de migrants. Des initiatives comparables pourraient donc – qui sait ? – y naître prochainement.
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Les lauréats 2018 sont :
Walid Ben Selim (Electro-poético-orientale - Occitanie)
Germaine Kobo et Bella Lawson (Afro-punk-tribal - PACA)
Edgar Sekloka (Afro-rap-soul - Île-de-France)
En concert :
Festival Au Fil des Voix, le 06 févier à l'Alhambra. L'occasion de les découvrir !
Les lauréats seront aussi en showcase à l'occasion de MusiConnect France les 15 & 16 février prochains.
Plus d'infos sur le Prix des Musiques d'ICI : http://prixdesmusiquesdici.com/site/