J'ai rencontré Osman K. début 2004, il résidait en France depuis 2000. Singulière rencontre a vrai dire... au bas de ma cage d'escalier. Plusieurs soirs de suite : "Monsieur, vous n'avez pas une cigarette ?". Sans un mot, je lui tend une cigarette... Peut être le quatrième ou cinquième, j'engage la conversation avec le jeune homme. Même l'esprit ouvert la glace est difficile à rompre. Bref, je l'invite à boire un verre... D'un naturel curieux je commence à le questionner, qui est il ? Osman. D'où vient t'il ? De Sierra Leone. Pourquoi est il en France ? Je suis un réfugié. De la Sierra Leone, je sais que c'est quelque part en Afrique. Ou ? Que s'y passe ou que s'est y est il passé ? Après mon travail, je vois Osman de temps en temps. Ca ne va pas très fort... Son recours auprès de l'OFPRA a été rejeté une première fois, l'appel a lieu d'ici trois semaines. Si c'est un échec il sera expulsé !
Je commence sur Internet à m'informer sur la Sierra Leone, que s'y est il passé durant les années 90 ? Je trouve la chronologie suivante... Bon courage !
Pour ma part, je n'ai jamais transporté de sac de riz sur une plage de Somalie sous le regard des caméras. J'ai accueilli Osman en 2004. Il est en France depuis 2000. Son statut de demandeur d'asile ne lui permet plus depuis déjà 3 ans de travailler. Il vient d'être débouté en première instance... Si dans trois semaines il est à nouveau débouté en appel, il devient immédiatement expulsable. Il est hébergé par un couple d'africain plus loin dans la rue. Le jeune homme est désoeuvré et déprimé... Il est à bout... Le seul document en sa possession est une carte de réfugié du HCR portant les mentions suivantes : Réfugiés Sierra Léonais et en anglais : "Document autorisant à traversé la mer"... Les journées il garde durant l'été les enfants du couple qui l'héberge. Le soir il attend ma sorti de travail. Je deviens sa bouée de sauvetage... Bardé de mes valeurs, de mes principes et de mon éducation, j'essaye de lui faire raconter son histoire. Cela prend plusieurs jours notamment pour déterminer la région de laquelle il est originaire mais surtout pour lui faire raconter son histoire personnel... Il n'en peut plus, il me demande de l'héberger le soir... Tout d'abord réticent de lui laissé mes clefs, son histoire me touche. Je commence d'apprécier ce colosse d'un mètre quatre vingt cinq. Il respire l'honnêteté... Il n'a depuis pas trahi la confiance que j'ai commencé de lui porter ces jours la. Pourtant je ne l'épargne pas... et puis lui non plus n'a pas pleinement confiance au départ... et puis l'histoire qu'il m'apprend est particulièrement horrible... La nuit, il dort sur un lit de camp de man salon, parfois il me réveille en pleine nuit... Qu'est ce qui ce passe, je me réveille, il dort, il fait des cauchemards... Voici le résumé sous forme de chronologie personnel que j'ai pu reconstitué... Il n'y a pas tous les détails...
J'étais abasourdi du témoignage d'Osman... Il me fallait néanmoins le recouper avec des éléments objectifs puisque même sa nationalité Sierra Léonaise était contestée par les autorités françaises. J'ai quasiment mis deux semaines à retrouver le village ou il résidait dans le nord de la Sierra Léone grâce à un site de géolocalisation sur intenet. Osman me répétait qu'il était originaire de "Balamia". J'ai essayé à peu prés toutes les orthographes approchantes... Je ne trouvais pas, je n'arrivais pas à avancer... L'appel de l'OFPRA approchait à grands pas... Et puis un soir j'ai trouvé BALAMUYA. Je ne vous dis pas l'impression qui a été la mienne lorsque je lui disais de citer le nom des villages alentours ou il circulait enfant avec son pére commerçant et je vérifiais immédiatement sur le site de géolocalisation. Tous les noms qu'il m'indiquait correspondaient avec mes recherches sur le net... C'était ahurissant... Sa nationalité Sierra Léonaise était démontrée... Mais trop tard ! Osman venait juste de se rendre à Paris pour l'appel de l'OFPRA... Malgré un appel de dernière minute à son avocat... Nouvel échec ! Une fois de plus l'arrêt du jugement conteste la nationalité Sierra Léonaise d'Osman... Il est assorti d'un avis d'expulsion dans les 3 semaines... La situation est désespéré...
Il fallait maintenant se saisir des grands moyens pour faire reconnaitre la justice et le droit. Heureusement Osman avait aussi le soutien de la CIMADE et du médecin psychiatre qui le suivait pour son syndrome dépressif. On le serait à moins...
Enfin, je trouvais encore sur le net un rapport de l'association américaine Human Rights Watch sur la situation Sierra Lonaise à la fin des années 90. Tout recoupait avec le récit d'Osman : Les dates, l'immense camp de réfugié de Forécariah en Guinée ou il commença sa migration... Le voici en intégralité pour les plus courageux...
Donc... il fallait désormais agir vite... Le dossier concernant Osman faisait pratiquement 30 pages. Je l'adressais à M. le Préfet du Puy de Dôme de l'époque avec l'accord d'Osman assorti d'un courrier de demande de régularisation pour raison humanitaire... Quelques semaines plus tard... Victoire ! La préfecture du Puy de Dôme donnait un avis favorable et délivrait une carte de séjour à Osman. D'autre part des démarches effectués auprès du consulat de Sierra Léone à Bruxelles (Seule représentation européenne de ce pays en Europe) permet à Osman de récupérer son passeport de ressortissant Sierra Léonais. Sa nationalité Sierra Léonaise était enfin reconnue.
Osman trouvait vite du travail dans une société de surveillance malheureusement sur des contrats précaires... Mais bon... Il trouve un appartement et s'installe.
Depuis lors (4 ans) sa carte annuel de séjour annuel est délivrée par les autorités françaises. Osman comme ami était invité à mon mariage le 10 mai de l'année dernière...
Ces derniers temps Osman souhaitait pour éviter des démarches annuel que lui soit accordé une carte de résident de 10 ans. Il lui était assuré par la préfecture que cette demande était étudiée...
Donc la préfecture étudiait la délivrance d'une carte de résident de 10 ans... Et puis voila, politique du chiffre, politique inéquitable... Il y a trois semaines la préfecture informe Osman que de carte de résident il n'est plus question et que même la carte de séjour ne lui est plus délivré. Il est à nouveau inscrit sur le fichier des personnes "invités" à quitter le territoire... Il est donc de nouveau expulsable... et n'a évidemment plus le droit de travailler...