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Billet de blog 9 juillet 2014

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Shocking Pujadas.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Au journal de 20 heures hier, David Pujadas lance un sujet : « les médecins prescrivent-ils trop d’IRM ? ». Le sujet porte sur la longueur des délais pour obtenir un examen par Imagerie par Résonance Magnétique. Anéfé, les délais deviennent de plus en plus aberrants, dans certains départements il faut 2 mois pour obtenir une IRM. A Paris, les délais sont plus courts, l’expérience vécue d’une proche gravement malade, montre qu’en dix à quinze jours on obtient son IRM.

Cependant, comment le journaliste normalement bien côté, le ci-devant Pujadas peut-il faire une entame sur ce sujet aussi grossière et pour tout dire, stupide ? L’imagerie par résonance magnétique permet d’obtenir des détails de l’intérieur du corps, avec une résolution de la fraction de millimètre, et sans toxicité pour les tissus imagés. De surcroît, quoique difficile d’interprétation, l’IRM détecte des comportements atomiques (diffusion de spin), qui permettent de distinguer les lésions des tissus  (par exemple tumeur ou œdème péri lésionnel), avec une précision spatiale, et une distinction diagnostique que ne permet pas le scanner à rayons X, qui est seulement sensible à la densité des lésions. Les deux examens sont différents sur le plan technique, mais aussi sur le plan de la durée de l’examen lui-même : quelques minutes tout compris pour un scanner, de l’ordre de une demi-heure à une heure et demi tout compris pour l’IRM.

Dans un monde idéal, les médecins feraient une IRM d’un patient atteint d’une tumeur cancéreuse, tous les quinze jours. Une telle imagerie permettrait en effet de suivre sur une base de temps rapprochée, l’effet d’un traitement sur une tumeur, et d’en changer rapidement, si l’effet du traitement est  nul. C’est la seule façon de suivre dynamiquement des tumeurs profondes, par exemple cérébrales, sans toxicité pour le malade.  L’alternative « scanner » est largement utilisée, puisque le scanner est beaucoup plus rapide à obtenir, et permet de passer plus de malades par jour. Cependant, d’une part le scanner ne résoud pas les petites tumeurs naissantes, et d’autre part, le scanner présente une radiotoxicité égale à plusieurs fois la dose annuelle de rayons « naturels ».

La véritable raison pour laquelle une IRM est difficile à obtenir n’est pas la prescription fantaisiste des médecins, mais bien le sous-investissement dans ce domaine.

La France se prétend un grand pays, mais en réalité, la grandeur de la France est obtenue par les sacrifices des Français. Les sacrifices quotidiens, visibles dans toutes sortes de fardaux qu’on pourrait détailler, mais également, simplement, le sacrifice des Français qui meurent prématurément de n’avoir pas été aussi bien soignés qu’ils l’auraient pu (dû).

Ce sacrifice des Français est tellement rentré dans les mœurs que l’on se bat, fait grève ou pétitionne pour toutes sortes de combats absolument secondaires érigés pourtant en urgences morales. Alors que, s’il fallait manifester demain matin, la cause première de manifestation serait le sous-équipement en instruments d’IRM.

Pendant que M. Pujadas sous-entend que des médecins (ouh ! les crétins) prescrivent des IRM inutiles, les statistiques, inflexibles, montrent qu’il y a en France trois fois moins d’appareils par habitants qu’en Allemagne ou au Danemark, et déjà moins d’appareils par habitants qu’en Croatie ou en Slovénie. (Moyenne en France :10,7 appareils par million d’habitants, moyenne européenne 17 appareils/million d’habitants, Allemagne 30appareils/Mhab.).

La France investit cette année seulement quelques millions d’euros dans 7 appareils d’IRM pour tout le territoire, ce qui ne modifiera qu’à la marge les délais d’attente.  On peut lire ici ou là qu’a minima, il faudrait installer 300 appareils pour rattrapper le retard, et être simplement dans la moyenne (il existe environ 700 appareils en ce moment en France).

Certes, la Frâââânce préfère la grandeur et la fierté de ses interventions en Afrique : la guerre au Mali a coûté exactement le prix de 300 appareils d’IRM (600 millions d’euros). Evidemment l’installation de ces appareils doit être accompagnée de la formation des personnels adéquats etc. Et je ne parle pas de l'amende infligée à la BNP par les USA, qui coûte à elle seule environ quatre mille appareils d'IRM.

Je ne dis pas que c’est mal d’aller au Mali. Je dis simplement que des pays comme l’Allemagne, ou le Danemark n’y vont pas, mais leurs malades peuvent se faire soigner correctement.

En France, la gandeur, toute relative d’ailleurs, se paye, sur la bête. Et ces choix traduisent, en réalité, un manque de considération du personnel politique pour la piétaille, les gens d'en bas, l'éternelle chaire à canon.

Je dis aussi qu’il faut arrêter de se tortiller avec des questions secondaires, et aller sans tarder au plus urgent.

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.