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Billet de blog 31 octobre 2024

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Sur François Bazin, Le parrain rouge. Pierre Lambert. 1° partie.

A nouveau un livre sur Lambert et le « lambertisme » : leur liste est déjà relativement longue. Cela alors que, comme les précédents, il ne dit certainement pas le dernier mot sur un sujet qui relève, à présent, de l’histoire, mais qui relève aussi, et de brulante manière, de la politique immédiate en France compte tenu des prolongements présents (fidèles ou infidèles) du dit « lambertisme ».

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Parrain ?

Je ne suis nullement un « ancien » militant, l’étant toujours, mais bien un ancien de l’OCI, et, en ce sens-là, un ancien « lambertiste » (avec les guillemets …). Je dis cela car comme beaucoup des dits anciens, ce titre de « parrain rouge » m’a heurté et inquiété : nous n’étions pas des mafieux !

Un « parrain », « rouge » de surcroît, ça aide sans doute à la vente. Il est vrai, comme me l’a rappelé un camarade, que j’ai moi-même, dans mon article biographique sur Pierre Broué, fait le rapprochement entre la mention par Benjamin Stora (La dernière génération d’Octobre, Paris, Hachette, 2008) de la fascination des responsables étudiants de l’OCI vers 1981 pour le film de Coppola, lesquels voyaient Lambert, puis Mitterrand, comme leur « parrain », et le souvenir de la même fascination pour ce même film parmi la jeune génération des dirigeants du Socialist Workers Party américain à la même époque, évoqué par Paul Le Blanc (avec Georges Breitman et Alan Wald, Trotkysm in the United States, Haymarket Books, Chicago, 1996). Il vaut le coup de donner le titre original du film de Francis Ford Coppola : The Godfather. Etymologiquement, ce terme, correctement traduit par « parrain », veut dire : dieu-père …

Alors, oui, la fascination a existé, composante d’un rapport de domination. Mais comme dit ce camarade : « Aux parrains, Bonapartes et tribuns, fussent-ils rouges, opposons nos fermes exigences de démocratie. »

Lambert pas encore Lambert et la seconde guerre mondiale.

Quand on s’engage dans la lecture du livre de François Bazin, l’espèce de brouillard lié à ce titre se dissipe, car nous ne sommes pas dans un récit sensationnaliste. L’auteur, sans tout percevoir certainement, semble généralement comprendre de quoi il parle, le fait d’une plume alerte et avec une certaine empathie, que Lambert, sans être pris pour Godfather, mérite bien, lui aussi, après tout.

La jeunesse, la famille et les débuts militants de Lambert y apparaissent de manière crédible, sans projection téléologique rétrospective plaquant ce qu’il est censé être devenu sur ces premières années. Or, plusieurs récits et articles avaient brossé une légende noire, que j’avais moi-même combattue dans mes articles sur Lambert, et qui est légitimement démythifiée par le récit de Bazin.

En particulier, son chapitre 3, La tâche, examine en détail, au moyen des archives policières, l’épisode de l’arrestation, du jugement, et de l’évasion, de Lambert en 1940 (qui fut aussi le moment de son premier mariage), et montre qu’en réalité, il n’y a pas de « tâche ». La confusion des circonstances et la crainte, compréhensible, que tel ou tel ait « donné » des camarades à la police, ont semé une graine de soupçon envers le jeune Boussel, dont le pseudo était jusque-là Andreï. Celui-ci a en fait assumé ses positions politiques envers la police, comme le prouvent les procès-verbaux d’interrogatoires cités par Bazin, dont l’un est reproduit en photographie.

Bazin accable un autre militant de la « tâche » dont Lambert fut soupçonné, à savoir Charles Margne, qu’il appelle même « Margne-la-Balance ». L’intéressé, parti de la future OCI avec la tendance Bleibtreu-Lequenne en 1955 et qui y revenu en 1971, est aujourd’hui décédé. Bazin ayant examiné les PV policiers, on peut le supposer sûr de lui à ce sujet, mais ce point aurait mérité de faire l’objet de plus amples citations et d’une reproduction photographique, à l’instar de celle disculpant Lambert.

Dans la suite de la guerre, sous le pseudo de Lejeune, Lambert appartient aux CCI (Comités Communistes Internationalistes), issus du courant de Raymond Molinier et Pierre Frank.

Le fait que le principal dirigeant de ce groupe (R. Molinier et P. Frank ayant quitté la France), Henri Molinier, ait en 1941 préconisé l’entrisme dans le Rassemblement National Populaire de Marcel Déat, a par la suite nourri des rumeurs sur une tentation « collaboratrice » chez les trotskystes. En réalité, ceux-ci sont, tous groupes confondus, le courant du mouvement ouvrier français qui a proportionnellement fourni le moins de collabos et de pétainistes, aucun à ma connaissance parmi ceux qui se considéraient encore comme trotskystes en juin 40. La position d’Henri Molinier, qui préconisait d’ailleurs aussi l’entrisme dans le PCF, procédait de la théorie selon laquelle le « capitalisme d’Etat » hitléro-stalinien allait dominer l’Europe pendant des années, voire des décennies.

Il se trouve que le jeune Lambert fut le principal opposant de cette analyse et des choix qui pouvaient en découler. Il n’y eut pas l’ombre du début de mise en œuvre effective des propositions d’Henri Molinier, qui passèrent aux oubliettes sitôt l’Union soviétique envahie en juin 1941 : juste un débat académique clandestin entre jeunes pondeurs de thèses – et, s’il faut en croire Claude Bernard dit Raoul (Cahiers Léon Trotsky n° 56, juillet 1995), les pondeurs de thèses passant pour des « intellos » étaient surtout Molinier et le jeune Lambert lui-même, ce qui est assez piquant.

Dans les CCI, Lambert eut en effet des relations plutôt bonnes, tout en ayant des débats de fond, avec Henri Molinier (tué en 1944), et détestables avec les autres responsables, Jacques Grinblat dit Privas et Rodolphe Prager, qui finirent par l’exclure mais qui le retrouveront dans le PCI réunifié en 1944. Il fut même question, en décembre 1943, de l’assassiner car il aurait constitué un danger pour l’organisation. Une chose pareille mériterait un examen sérieux. F. Bazin en traite de manière laxiste, en se référant à Raoul :

« Pour faire simple, Boussel est accusé d’avoir essayé, en contravention totale avec les règles de son organisation, de recruter pour le compte de son courant une militante stagiaire, laquelle s’est empressée de le dénoncer à la direction du CCI. Celle-ci convoque aussitôt une manière de tribunal du côté de Glacière, à Paris, avec Grinblat dans le rôle du procureur. Il accuse Boussel d’être parti avec la caisse et exige donc qu’on le liquide au plus vite ! »

Le récit de Raoul cité par Pierre Broué est beaucoup plus précis et, en « faisant simple », Bazin, qui s’en sert, introduit des inexactitudes :

« L’hypothèse d’une exécution de Lambert et Testu qui était « parti avec la caisse » a été soulevée à une réunion à la Glacière où il y avait Mauricio, Catherine, Paul, Bruno, Privas. Mauricio et moi étions opposés. »

Donc, Lambert n’était pas seul visé, il y avait avec lui Testu, c’est-à-dire Henri Molinier lui-même, et c’est Testu, et pas Lambert, qui était accusé, mais on ne sait pas si c’est particulièrement par Privas même si c’est possible, d’être « parti avec la caisse ».

Notons aussi que Raoul ne parle pas de l’accusation d’avoir voulu gagner à ses positions une militante stagiaire qui l’aurait dénoncé. Cette version, ou cette précision, vient en fait de Michel Lequenne, non cité par Bazin, dans Le trotskysme. Une histoire sans fard., Paris, Syllepse, 2005, qui indique que la jeune militante stagiaire était Marguerite Bonnet, par la suite grande spécialiste du surréalisme, et ne qualifie pas le fait qu’elle ait parlé des propos de Lambert de « dénonciation », l’approuvant plutôt. Lequenne juge mineur cet épisode, mais manifestement (il n’était pas au CCI), il ignorait qu’un double meurtre avait été envisagé, et, tout de même, écarté, après les protestations virulentes de Raoul et de Mauricio (un réfugié espagnol clandestin).

Enfin, Bazin ajoute que Lambert avait été averti de la menace par sa future épouse Olga Faribault, ce qui est invérifiable (pas de source indiquée).

J’ai développé cette histoire de projet d’assassinat pour deux raisons.

D’une part, à cause de la gravité d’un tel épisode qui, évidemment, a laissé des traces (Grinblat, et Lambert qui l’aurait recruté, jeune juif montreuillois comme lui, avant-guerre, seront des ennemis personnels désormais), et par les questions qu’il soulève sur le type d’organisation que pouvait bien être ce CCI : il est évident, quels que soient leurs mérites, que ces militants étaient aussi des drôles d’« allumés », des « têtes brûlées ».

D’autre part, parce que le traitement très léger qu’en fait Bazin inspire des craintes sur sa manière de procéder en « faisant vite », comme il dit, avec les sources et l’analyse des situations.

La vague rumeur persistante autour d’une « tâche » concernant Lambert en 1940, les antagonismes hérités des CCI où cohabitaient de fortes personnalités fort sectaires et fortes en gueules, et, plus tard, les tentatives intéressées d’attribuer au trotskysme ou à des trotskystes des tentations coupables envers la collaboration, tout cela a servi à des projections rétrospectives dessinant, ou suggérant, insinuant, un sombre passé à Lambert, perçu comme un combinard qui aurait, de longue date, ourdi de drôles de manœuvres. Michel Lequenne, vieux militant dont j’ai mentionné ci-dessus le livre, était d’ailleurs un maître dans cet art de la suggestion calomnieuse visant Lambert.

Il est bon que, globalement, et précisément en ce qui concerne cette « tâche » de 1940, qui n’en est pas une, le livre de Bazin aide à faire justice de ces constructions rétrospectives. C’est là le principal compliment que je puis lui faire.

Question de méthode : l’histoire d’un courant trotskyste est toujours internationale.

Dire que le militantisme trotskyste, surtout quand il commence dans les années 1930, s’inscrit dans un cadre et sur la base de préoccupations internationales, est pratiquement une lapalissade. Mais dans le cas de Lambert, c’est radical : sans les facteurs internationaux, il n’y aurait jamais eu de « lambertisme ». Sauf à le penser tout prédéfini dans le cerveau de Lambert, ce qui n’est pas la position de F. Bazin mais qui est, nous le verrons, une conclusion qu’il peut néanmoins inspirer.

La crise fondatrice.

Le « lambertisme » prend forme, dans les années 1950-1970, en raison de la situation dans laquelle se trouve placé l’un des rameaux historiques importants du courant trotskyste, à savoir, grosso modo, sa section française, puisque c’est la majorité de celle-ci qui est « mise en dehors » de la IV° Internationale en 1952.

Elle l’est parce que la grande majorité de ses militants ayant des responsabilités syndicales, ou étant connus dans des entreprises, ont refusé de mettre en pratique la conclusion logique extrême de la position prise par le « secrétaire général du Secrétariat International de la IV° Internationale », Michel Pablo, qui n’était alors pas du tout connu sous son vrai nom de Mikhalis Raptis, et qui vivait en France.

Il expliquait que la troisième guerre mondiale allait arriver, qu’elle opposerait le « monde stalinien » aux puissances capitalistes et impérialistes, et qu’il n’y aurait pas d’autre choix que d’être avec le « monde stalinien » qui allait être poussé à faire la révolution en faisant la guerre.

Cette position contredisait les fondamentaux du trotskysme sur le stalinisme et l’URSS, de toute évidence, et ce n’est pas elle qui constituera ensuite l’orthodoxie dominante dans l’organisation dénommée IV° Internationale et aussi dans le futur courant « lambertiste », mais celle élaborée en partie contre Pablo, mais sans le combattre de front, par Ernest Mandel, sur la persistance de l’URSS comme « Etat ouvrier bureaucratiquement dégénéré » et la formation par occupation par l’armée soviétique ou à la suite de guerres de guérillas d’ « Etats ouvriers bureaucratiquement déformés ».

Cette conséquence logique extrême des positions de Pablo, cautionnée par Mandel, qu’a refusé la majorité du PCI français, était qu’il fallait rejoindre le PCF en reniant publiquement si besoin ses convictions et son passé antistaliniens (c’est le fameux « entrisme sui generis »). Ce refus a entrainé son « exclusion de la IV° Internationale ».

D’où l’isolement national, involontaire et déploré, de ce « PCI majoritaire » qui, à la fin de la décennie 1950, sera souvent désigné comme « groupe Lambert », et sa recherche permanente de contacts internationaux pour reconquérir, puis pour « reconstruire », la IV° Internationale.

S’est formée dans ces conditions une aperception providentialiste de ce courant par lui-même, qui était d’une importance capitale dans la formation intellectuelle de ses militants, et dans leur perception subjective de ce qui était leur devoir être. La crise historique de l’humanité se réduisant à la crise de la direction révolutionnaire du prolétariat, sa résolution passait par la préservation du « fil de la continuité » porteur de la théorie révolutionnaire, et la seule forme d’organisation adéquate à l’incarnation de ladite théorie était la forme supposée bolchevique, ou léniniste, d’organisation. Réformisme puis stalinisme ayant brisé le fil, celui-ci était détenu par la IV° Internationale. A son tour, le « révisionnisme » pabliste, et pablo-mandélien car Lambert et ses camarades ont dans l’ensemble assimilé Mandel à Pablo (alors qu’ils se sont séparés par la suite, en 1965), ont de facto fait porter la préservation du fil de la continuité par les seuls militants du PCI français des années 1950 et leurs héritiers.

D’où une psychologie faite de responsabilité, de volontarisme, de culpabilité de n’en pas faire assez, et de crainte de dévier du « fil », qui est la forme sécularisée de bien des structures religieuses, pour le meilleur et pour le pire, et qui peut dégénérer en mentalité de secte ou de bande.

Le franco-français par et dans l’international.

Ceci résulte d’une histoire globale : cette histoire du trotskysme n’est pas une micro-histoire sectaire, mais un reflet et une composante de la tragédie des révolutions du XX° siècle après 1923, le siècle de Staline et d’Hitler. C’est uniquement dans et par ce cadre dont, comme ses camarades, il a été en permanence préoccupé, que s’expliquent Lambert et le lambertisme.

Certes, il y a des traits « franchouillards » prononcés chez Lambert, qui avait un côté « super Dupont » renforcé par son célèbre accent parigot, et qui a construit des réseaux typiquement français dans le syndicalisme et même dans la franc-maçonnerie (sans en être lui-même !).

Mais ces traits nationaux, ces idiosyncrasies, et parfois ces idiotismes, culturels et typiques, ne peuvent eux-mêmes s’expliquer que par et dans le cadre de l’histoire internationale des courants issus du trotskysme. La dispersion des forces issues de la volonté de construire une IV° Internationale a en effet incubé la formation de plusieurs courants nationaux animés par des sortes de chefs locaux typiques, à prétentions internationales, donc d’organisations relativement fortes dans un pays, ayant des appendices et des dépendances ailleurs.

Lambert était typiquement français et parisien – de banlieue parisienne. Mais Cannon était une figure remarquable de l’organiser syndicaliste yankee. Shachtmann de l’intellectuel « juif new-yorkais ». Grant et Cliff des produits du Commonwealth, cosmopolites dans les limites du Commonwealth et en ce sens so british, ce qu’était aussi, d’une autre façon, le sectaire brutal Gerry Healy qui se donnait des airs de cockney d’origine irlandaise. Posadas était appelé, sans doute à juste titre, le « danseur de tango » argentin, et son adversaire Moreno offrait une autre figure du dirigeant argentin construisant une Internationale sur des bases « latinos ». Lora était, avec une ombrageuse noblesse, une figure ouvrière de l’Altiplano bolivien. Chacun dans leur bastion – dans leur « willaya » disait-on aussi - tirant sur ce qui en approchait s’ils ne pouvaient le happer et le contrôler.

Je viens d’énumérer quelques-uns des « chefs nationaux » de courants trotskystes spécifiques : Lambert est le français typique dans cette galerie de personnages, dont l’ancrage national et l’histoire propre ne peuvent se comprendre que dans et par le cadre international de l’histoire d’un mouvement qui, au moins jusqu’aux années 1980, forme un tout organique, malgré ses divisions. Ce qui illustre d’ailleurs ce thème fréquent chez Trotsky pour qui la lutte des classes a un contenu international et ne peut qu’avoir une issue internationale, mais se développe sur le terrain et dans le cadre national.

Le fond du problème.

A l’échelle du siècle, ces divisions dans le cadre d’une référence permanente à la nécessité d’une organisation, la IV° Internationale, ayant pour horizon la révolution mondiale, sont conditionnées par le fait qu’en réalité, cette organisation n’était pas telle que Léon Trotsky l’avait voulue en 1938, dans l’urgence, pour que la seconde guerre mondiale qui approchait se transforme en révolution.

Reconstituée en 1944-1948, elle ne voit pas le problème dans l’absence de révolution et de « rôle dirigeant » de telle ou telle de ses sections, mais se félicite d’avoir « tenu » : on est passé à autre chose sans s’en rendre compte. La tentative de sortie de cette impasse par Pablo a, peu après, produit la crise – internationale – du mouvement dont le « lambertisme » est un produit. Si quelqu’un n’avait pas prévu ni souhaité cela, c’est bien Lambert.

Toute cette dimension internationale est quasi absente, ou vaguement évoquée de manière périphérique, tant dans les descriptions et les récits, que dans les explications de François Bazin, ce qui suffirait à invalider l’essentiel de son récit par ailleurs souvent assez fin psychologiquement.

Lambert, avec et au moyen de son organisation française, fut un dirigeant politique international : on ne le devine pas à la lecture de ce livre, qui, tout au plus, nous indique qu’il a eu des relations algériennes importantes, de Messali Hadj au PT algérien, mais ceci pourrait se rattacher entièrement à ses positions françaises.

Le cadre international : les débuts.

Est ignoré le fait que le PCI majoritaire français a été littéralement traumatisé par son isolement international en 1952-1953, puis qu’il tend naturellement à se rapporter à des organisations non françaises apparemment plus fortes, qui vont le décevoir : le Socialist Workers Party nord-américain le sort de son isolement en 1953, en apparence, et forme avec lui et quelques autres un « Comité international », mais il se réunifie avec les « pablo-mandéliens » en 1963, ce que le groupe dit « Lambert » se refuse à faire car il maintient un « Comité international » cette fois-ci avec les anglais de la Socialist Labour League (SLL), deuxième « grand frère » après le SWP, laquelle SLL va s’avérer une grosse secte dont les méthodes furent pires que ce que l’on appellera, un peu plus tard, en fait surtout après 1973, les « méthodes lambertistes ».

D’autre part, une recrue de poids, faite en 1962, Balasz Nagy dit Michel Varga, ancien dirigeant du Cercle Petöfi dans la révolution hongroise de 1956 -et non « Pelöfi » comme écrit p. 257 - fait naître l’espoir de la formation d’un réseau militant clandestin dans le bloc soviétique et en Yougoslavie.

Quand l’OCI prend son nom, en 1965, la perspective est de regrouper et sélectionner dans la durée en combinant l’auto-construction et les discussions-rapprochements-fusions-ruptures avec d’autres courants, tant au plan national qu’international. Au plan international, il s’agit de combiner le regroupement des forces issues de la lutte des classes directe et des évolutions vers la gauche pouvant se produire dans les vieilles organisations, avec la discussion visant les courants issus du trotskysme.

Dans cette combinaison, à géométrie variable, le messianisme national du type « le fil de la continuité passe par nous et seulement par nous », toujours latent, ne va pas s’affirmer et tout dominer tout de suite. Jusqu’en 1985 Lambert se considère comme composante d’une « famille » plus large, issue de la « crise de la IV° Internationale ».


De 1968 à la mère de toutes les purges.

Ce n’est pas un hasard si les relations organisationnelles internationales de l’OCI se mettent à évoluer dans la période qui suit 1968, tournant mondial de la lutte des classes avec la grève générale française et le Printemps de Prague et sa répression.

Des faits importants s’enchainent : rupture, voulue par la SLL britannique de Gerry Healy, mettant l’OCI hors de son « Comité international » ; contacts avec le Parti Ouvrier Révolutionnaire bolivien (POR) de Guillermo Lora, dans une situation révolutionnaire, et quelques autres organisations en Amérique du Sud ; essor mais aussi divergences dans la IV° Internationale officielle, dite depuis 1963 « Secrétariat Unifié » : l’absence totale de ces développements dans le livre de F. Bazin interdit de comprendre des données parmi les plus essentielles de l’évolution de l’OCI et de Lambert personnellement.

Le poids croissant de son réseau amicalo-syndicaliste en France, avant de complétement surdéterminer sa politique internationale, nous verrons quand, a été, à l’inverse, conditionné par ces faits internationaux, initialement non désirés, rencontrés par Lambert et son organisation.

Arrive alors (été 1972) l’« affaire Varga », très rapidement traitée pp. 257-258, qui est en réalité la pire, la plus violente, en un sens la « mère de toutes les purges » opérées par Lambert.

La documentation de François Bazin semble exclusivement limitée au travail de Pierre Salvaing, Ce que je sais de ce que fus l’OCI, mais sans prendre en compte le fait que pour Pierre Salvaing, comme pour tous ceux qui l’ont connue, cette « affaire » est fondatrice, qu’il y a un avant et un après.

Quelques autres « purges », c’est-à-dire des résolutions de divergences politiques par des moyens non politiques en interdisant la libre discussion (ou des moyens apparemment politiques mais ne portant pas sur ce qui faisait la matière des divergences) l’ont précédée, j’y reviendrai, mais aucune n’a son ampleur et, quoique regrettables, elles pourraient à la rigueur être présentées comme des malentendus. En 1972 en revanche, avec l’« affaire Varga », on a l’équivalent d’une purge stalinienne dans l’organisation trotskyste, inspirée par Lambert, avec Stéphane Just dans le rôle du maitre-enquêteur, et Pierre Broué (ami de Varga auparavant) dans celui du « lanceur d’alerte » déclenchant la paranoïa.

Les divergences sous-jacentes sont identifiables, mais elles ne furent pas exprimées où le furent après coup (Varga lui non plus n’ayant pas été un modèle de transparence) : elles portaient sur la stratégie de construction d’une organisation internationale. Varga contestait la constitution du CORQI (Comité d’Organisation pour la Reconstruction de la IV° Internationale), l’intégration du POR bolivien à celui-ci, la renonciation à toute discussion visant encore le courant de Healy, et l’éventuelle ouverture de discussions avec le Secrétariat Unifié ou des courants de celui-ci. Varga survalorisait la propre place des groupes formés en Europe de l’Est et donc sa place à lui, et considérait que se produisait une renonciation de fait à construire une « Internationale révolutionnaire de la jeunesse », qui effectivement ne se poursuivra pas, et que les appels au vote PS/PCF en France marquaient le début d’une dérive opportuniste.

Dans une organisation démocratique, ces questions devaient se poser et être discutées. Dans l’OCI, elles se sont posées sourdement et ont été réglées par la mère de toutes les purges.

Dans la vie interne de l’organisation, l’obligation faite fin 1973 aux militants d’admettre que la brochure de Stéphane Just Provocation dans la IV° Internationale. L’itinéraire d’un provocateur, dite « brochure verte », démontrait que Balasz Nagy-Varga était un agent du KGB s’étant de surcroît délibérément fait « stipendier » par la CIA pour salir le trotskysme (c’est là exactement la calomnie délirante qui le visait, plus précisément que simple « agent du KGB et de la CIA » comme on le lit généralement), donc l’obligation de faire semblant ou de penser réellement qu’il y avait là une démonstration, alors qu’il n’y avait que du vent, cette obligation absolue a joué le rôle d’un « test d’orthodoxie » (on vous fait affirmer une absurdité), et d’appartenance, au sens ecclésial du terme (j’y ai personnellement échappé, étant entré dans l’organisation en 1979 !).

C’est pleinement la dimension internationale qui est en jeu dans l’« affaire Varga » dont les conséquences sont considérables : le principal réseau de militants trotskystes (y compris par rapport aux autres courants se réclamant du trotskysme) réellement existant dans le bloc soviétique – dans la plupart des Etats le composant ainsi qu’en Yougoslavie – a été alors, pour l’essentiel, détruit. Ce n’est pas rien.

Au test d’orthodoxie se sont ajoutées des violences physiques graves et répétées. L’acquiescement au moins passif à tout cela scelle une sorte de pacte, qui ne transforme pas les militants en mafieux, sans doute, mais dont la nature, au fond, est de cette sorte.

Et le résultat ayant été la destruction de la majeure partie du « travail Est », il est permis de s’interroger sur l’intérêt effectif du KGB, avec lequel Varga n’avait évidemment rien à voir lui-même, dans cette affaire, et donc son rôle.

Cette affaire n’a d’intérêt du point de vue de F. Bazin que comme épisode démontrant que Lambert veut contrôler sa boutique, alors que ce fut un épisode constructif, fondateur, des vices du « lambertisme », précisément à cause de ses enjeux internationaux que Bazin ignore : il la règle donc en moins de deux pages en la mettant à égalité avec l’« affaire Berg », qui n’aurait pu avoir lieu sans ce précédent bien plus ample.

Pliouchtch et Soljenitsyne.

Ce désintérêt pour les enjeux internationaux réels est prolongé par le silence sur une campagne internationale essentielle, qui, paradoxalement, suit de trois ans l’« affaire Varga », et est une victoire éclatante, pour la libération de Leonide Pliouchtch, dissident soviétique de gauche et ukrainien – voir Laurent Mauduit et Denis Sieffert, Trotskysme. Histoires secrètes. De Lambert à Mélenchon, Paris, les Petits Matins, 2024, chapitre 4, et Michel Broué, Pour voir clair, Paris, Le Seuil, 2024, pp. 56-69.

Modèle des campagnes internationalistes pour faire libérer un prisonnier, qui peut nous inspirer – et nous a inspirés – aujourd’hui pour sauver Sentsov et Koltchenko, et plus récemment sauver Maksym Butkevych …

La chose est abordée dans une note de bas de page p. 276 :

« Dans le combat contre le stalinisme, à l’Est, Lambert, pourtant d’un laïcisme intransigeant en France, ne manifestait aucune prévention contre les syndicalistes polonais liés à l’Eglise. De même, soutenait-il aussi bien les dissidents qui se disaient trotskystes, tel Leonid Pliouchtch, que ceux qui affichaient des idées réactionnaires, tel Soljenitsyne. »

Quel gloubi-boulga ! « Soutenir » au sens de soutenir politiquement, et « soutenir » au sens de défendre contre la répression, sont confondus. Pliouchtch n’était pas trotskyste, mais l’OCI a donné à la campagne initiée par Tania Mathon, Laurent Schwartz, Michel Broué (alors membre de l’OCI) et quelques autres le « coup de main » décisif, à savoir les forces militantes, qui en permirent la victoire. « Lambert » a, en ce sens, « soutenu » Pliouchtch, mais la libération de Soljenitsyne, à ceci près qu’il était évidemment pour sa liberté, ne lui doit pas grand-chose, quant aux syndicalistes polonais, catholiques ou non, ils étaient des syndicalistes …

« Entrisme » international tous azimuts ?!

A la fin des années 1970, nous apprenons p. 287 que Lambert avait « des fractions » dans le PS portugais, dans le PSOE espagnol, dans « l’appareil du FLN » algérien alors au pouvoir, dans le Fatah palestinien et dans le Matzpen israélien. Excusez du peu ! Mais comment faisait-il ?!

Qui plus est, toujours p. 287, Lambert aurait eu « des camarades infiltrés de longue date » dans le PSOE espagnol qui, en 1979, « contribueront à mettre en minorité Felipe Gonzales, coupable d’avoir voulu que le PSOE rompe avec le marxisme. » En réalité, cette année-là, au congrès de Madrid du PSOE, en mai, Felipe Gonzales échoue à « moderniser » les statuts façon « Bade-Godesberg », rompant non seulement avec « le marxisme » mais avec la tradition du socialisme espagnol, principalement largo-caballeriste, et il démissionne, organisant un chantage à l’implosion du parti, qui lui permettra d’en reprendre le contrôle en fin d’année, dans un nouveau congrès, extraordinaire. Cet épisode conclut les luttes internes par lesquelles le PSOE « mute » et pourra gouverner l’Espagne postfranquiste de manière néo-libérale, avec F. Gonzales comme premier ministre, luttes commencées à son congrès de Suresnes en 1974. Les militants socialistes espagnols, basques et catalans liés au courant dit « lambertiste » furent de ces batailles, qu’ils ont perdues, mais ils ne sont en rien à l’origine de la résistance de la base à la mutation organisée par en haut par Felipe Gonzales.

Cet épisode de l’histoire nous montre deux choses : que le CORQI était bien un courant international même si l’OCI le dominait, et que là est la clef explicative de la présence de « lambertistes » et autres « camarades infiltrés de longue date » dans telle ou telle organisation, et, deuxième chose, que son emprise n’était pas celle qui lui est prêtée par F. Bazin, qui serait d’ailleurs bien en peine de l’expliquer étant donné sa vision francocentrée.

Notons, en outre, que si l’on parle et fantasme beaucoup sur l’« entrisme » en France, l’histoire de l’entrisme, tout à fait légitime, dans le PSOE espagnol et le PS portugais, dans les années 1970, mériterait une étude approfondie, reliée à l’histoire de la révolution portugaise et reliée, en Espagne, à l’effacement des héritages issus de la tradition révolutionnaire espagnole et catalane d’avant la victoire de Franco (substrat largo-caballeriste du PSOE, anarcho-syndicalisme, POUM).

En note, p. 287 encore, F. Bazin ajoute que « Deux membres du comité du central (sic : sans doute le comité central ?) du Fatah étaient lambertistes. Ils vivaient à Gaza et n’avaient pas suivi Arafat dans son exil. » Diantre ! On aimerait en savoir plus. Mais il semble que nous devions, comme explication, nous contenter de savoir que, comme pour FO et la Libre pensée, l’entrisme est devenu pour Lambert une « seconde nature »

Outre que sont confondus ici, d’une part l’entrisme, entrée de courants politiques dans des organisations, d’autre part le sous-marinage ou « travail de fraction », placement clandestin d’agents d’influence et/ou d’informateurs, et enfin la formation de réseaux plus ou moins informels, la remarquable affirmation selon laquelle Lambert prend à tout cela « un plaisir évident » (!!!) ne répond pas plus à la simple question : mais comment faisait-il ?!

La réunification et le dépassement avortés de 1979-1981.

A la fin des années 1970, une cristallisation s’opère, des nœuds vont se défaire et d’autres vont se nouer.

L’OCI espère une réunification avec la IV° Internationale officielle, le « SU » (Secrétariat Unifié), un dépassement réel de la « crise pabliste », dans la mesure où le SU a rompu avec la ligne de la guérilla en Amérique du Sud et s’oriente vers une politique de front unique ouvrier.

Sans ménagement, Lambert et Just se délestent (voir à ce sujet mon article Guillermo Lora, une conscience ouvrière bolivienne) du POR bolivien, affaibli par la répression dans son pays, et de Politica Obrera en Argentine (début 1979) : Just est chargé de les accuser des pires méfaits parce qu’ils participent aux syndicats officiels ou péronistes (au moment même où, au Brésil, un secteur des syndicats étatisés se détache dans les grandes grèves de l’ABC de Sao Paulo, à l’origine du PT !).

La chute du dictateur Somoza au Nicaragua produit une tripolarisation du SU : le SWP salue l’avènement d’un « Etat ouvrier » et se fait de plus en plus procastriste, le courant du dirigeant argentin Moreno accuse au contraire les sandinistes de préserver l’ordre bourgeois, alors qu’il a envoyé sur place une « Brigade Simon Bolivar » que les sandinistes répriment, et la majorité « mandélienne » cautionne, comme le SWP, cette répression, mais sans aller jusqu’à voir un « Etat ouvrier » à Managua.

C’est alors que Nahuel Moreno joue un vrai coup de poker : il propose une alliance à Lambert et au CORQI, qui topent. Au lieu d’une réunification complète, on a une réunification partielle qui semble flamboyante, mais qui se disloque aussi vite qu’elle était née, fin 1981, à nouveau à l’initiative de Moreno qui dénonce la passivité de l’OCI face au gouvernement Mitterrand en France, et, entrainant quelques groupes du CORQI (Venezuela), veut développer sa propre organisation, qui s’appelle alors la LIT (Ligue Internationale des Travailleurs).

Ces péripéties sont très importantes : elles mettent fin aux espoirs et aux projets de réunification entre les courants que la crise pabliste avait dispersés – et dont la projection française aurait été une unification OCI/LCR, donc un dépassement, pas seulement une addition.

L’histoire des principaux courants trotskystes était jusque-là l’histoire de rivaux inséparables. Désormais, la dérive de ces petits continents s’accentue et la manière dont ils réagissent les uns sur les autres s’affaiblit.

De manière plus directe, Lambert avait vu en Moreno l’alter ego qui, de fait, lui manquait. C’est l’une des causes de son repli national, plus exactement de la mise de ses activités internationales au service de ses opérations nationales.

Tout ce que je viens de résumer là sur les fusions-scissions de 1979-1981 tient en une seule note de bas de page chez F. Bazin, p. 306. La voici :

« A partir de 1977, le Comité d’Organisation pour la Reconstruction de la Quatrième Internationale (CORQI), animé principalement par l’OCI, a entamé des négociations avec le Secrétariat Unifié (SU) de la Quatrième qui, depuis 1952, regroupait la majorité des partis trotskystes dans le monde. La situation au Nicaragua ayant entraîné une crise interne au SU en 1979 – sa direction considérant que le Nicaragua était un « nouveau Cuba » - Lambert a alors passé une alliance avec le groupe argentin de Nahuel Moreno d’où est sorti le Comité paritaire pour la réorganisation de la Quatrième Internationale. Critique à l’égard de Lambert et de sa gestion de l’alternance en France, Moreno a rompu avec ce Comité dès la fin 81. Ce bref rapprochement avait été l’œuvre d’un jeune homme, Luis Favre dit « Felipe », qui, avec Jean-Christophe Cambadélis, était réputé appartenir au tout premier cercle lambertiste. Argentin d’origine, Favre avait fui la dictature de son pays avant d’arriver en France au début des années 70 après un passage en Israël. »

Ce résumé est ultra-rapide, mais il comporte une ou plusieurs erreurs à chaque ligne. Les discussions SU/CORQI ont commencé officiellement en 1977, officieusement avant, et dès 1974 entre l’OCI et le SWP. Le SU n’existe pas depuis 1952, mais depuis 1963. En 1979 c’est seulement le SWP, pas le SU, qui considère qu’il y a un « Etat ouvrier » d’un type proche de Cuba, au Nicaragua. Moreno ne dirige pas un « groupe » en Argentine, mais un petit parti de près de 2000 membres, le PST (Parti Socialiste des Travailleurs), centre d’un courant international, la FB (Fraction Bolchevique). Le Comité paritaire ne réunit pas Lambert et le groupe de Moreno, mais le CORQI, la FB et une troisième tendance, la TLT (Tendance Léniniste-Trotskyste), consistant d’une part dans plusieurs groupes d’Amérique centrale et d’autre part dans un courant qui quitte alors la LCR française (plus quelques espagnols). Le nom exact du Comité paritaire est « Comité Paritaire pour la Réorganisation/Reconstruction de la IV° Internationale ».

Fin 1981 Moreno n’a pas critiqué la « gestion de l’alternance » par Lambert mais a subitement, et en forçant le trait, accusé l’OCI d’opportunisme complet envers Mitterrand, produisant volontairement la rupture sans chercher à discuter plus. Il n’a pas rompu « avec » le Comité paritaire, il a rompu le Comité paritaire qui comportait les trois courants, et qui cesse d’exister. L’ancienne FB devient la LIT, l’ancien CORQI, qui a abandonné dans la nature les groupes centro-américains de la TLT et l’a absorbée en Europe, devient la « IV° Internationale-Centre International de Reconstruction ».

Surtout, il est invraisemblable que tout cela ait été « l’œuvre » de Luis Favre, Felipe. Lambert et Moreno n’avaient pas besoin de lui pour se contacter : ces deux fauves s’observaient depuis longtemps dans la jungle. L’initiative de l’alliance comme celle de la rupture est venue de Moreno. Au plus, Favre a pu servir de courrier, mais en 1979, il est seulement le responsable d’un petit groupe argentin, et le frère cadet de Jorge Altamira, dirigeant de Politica Obrera … que Lambert et Just ont viré au début de l’année.

En fait, c’est à la suite de ces évènements que le rôle de Favre va grandir, et pas avant. Bazin est à l’évidence tributaire de ce que Favre, et Cambadélis, lui auront narré en se mettant en valeur. Et dans cette narration, l’essentiel des enjeux politiques et des positions des uns et des autres sur le Nicaragua, Cuba et le reste, a été largué.

Vers la « reproclamation ».

C’est durant le premier septennat de Mitterrand que se produit un double phénomène à la fois national et international dans le devenir du lambertisme : au plan national, l’abandon de la volonté de construction d’un parti révolutionnaire explicitement trotskyste, et au plan international, l’orientation progressive vers la proclamation d’une organisation qui ne cherche plus à reconstruire ou à réorganiser la IV° Internationale, et qui va finalement, en 1993, se présenter comme étant « la » IV° Internationale une bonne fois pour toute reconstruite, et donc reproclamée. Le tout avec une série de purges et une scission, le courant lambertiste connaissant un affaiblissement prononcé.

Je reviendrai sur cette dernière période plus loin. Il est clair que la dimension internationale, et internationaliste, est première et que sa mise entre parenthèses conduit à des erreurs et des incompréhensions massives. Cela étant dit, nous pouvons examiner maintenant la conception globale de François Bazin sur la destinée de Pierre Lambert, non seulement étroitement nationale chez lui, mais personnelle et psychologique, et qui ne manque pas par elle-même d’intérêt.

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