Dans un documentaire de Gregory Monro[1], Kubrick nous dit : « Je me souviens avoir lu que le labyrinthe est la parfaite métaphore pour beaucoup de choses dans la vie. Quelqu'un disait que dans un labyrinthe tout le monde se donne des conseils et ce faisant tout le monde s'induit en erreur. Personne ne sait quoi faire. Et chacun donne de mauvaises idées aux autres. » Et voilà. Ça vous rappelle quelque chose ? Il me semblait bien que nous étions dans un mauvais film - mauvais au sens dramatique - non pas en référence à Kubrick, je ne me permettrais pas.
Nous voici donc embarqués depuis plus de 40 jours dans une apocalyptique situation à laquelle nos dirigeants sont incapables d’apporter une réponse. Et nous ne voyons guère d’issue. Mais il est bien tant quand toute la plomberie a sauté, d’essayer de réparer les fuites diverses et variées.
La question du côté des gouvernants me semble être : comment avoir l’air le moins cynique possible tout en se soumettant aux desiderata des plus cyniques d’entre eux, à savoir les financiers. Il faut bien ménager la chèvre et le chou. Quid de la chèvre et du chou ? A vous de voir. Quant à paraitre le moins cynique possible, comment vous dire ? J’ai la vague impression que c’est raté !!
Les polémiques quant l’approvisionnement de masques, gel et autres produits nécessaires à la protection de ceux qui continuent à bosser malgré l’arrêt total d’autres activités, ne me parait pas être au centre du problème. Je m’explique vite car je sens que je vais me faire lyncher ! Et si nos illuminés de la politique avaient continué à financer la recherche et l’hôpital public peut-être n’en serions-nous pas à ce stade de totale improvisation. S’ils avaient un tant soit peu anticipé ? Et écouté. Sarkozy, Hollande et le meilleur de tous Macron ont refusé de poursuivre une politique préventive de risques sanitaires. En 2011 on trouve cet article dans la revue Cairn dont je vous recommande chaudement la lecture [2]. On peut y lire ces quelques lignes qui trouvent écho aujourd’hui : « On observe cependant des inflexions dans l’approche des problèmes sanitaires qui donnent lieu à une gestion de plus en plus « politique ». La question est de savoir quels effets une telle gestion produit dans le domaine sensible et devenu emblématique de la santé publique en France. » Et bien maintenant on a la réponse. Ça c’est fait !
En juillet 2019, Sylvestre Huet publie un article dans Le Monde/Science[3]. Je cite : « Six milliards. De plus. D’ici 2022. C’est, en résumé lapidaire, la réponse du Comité national de la recherche scientifique réuni le jeudi 4 juillet pour participer à la concertation ouverte par le gouvernement sur la loi de programmation pluriannuelle pour la Recherche publique. » Et voilà. Et Sylvestre Huet d’ajouter : « L’un des principaux freins à une politique de recherche publique ambitieuse réside dans le dogme de l’emploi public. Sa diminution ou sa stagnation est recherchée, et appliquée dans l’Enseignement supérieur et la recherche par le gouvernement. Ce blocage purement idéologique pèse son poids de stupidité et d’incohérence. » On arrête là ? Que nenni !
Dans Challenges[4], un autre article de 2017 – donc antérieur au précédent - intitulé ‘ Bio-terrorisme : improbable mais il faut s’y préparer ‘, Olivier Lepick, expert en menace NRBC (Nucléaire, radiologique, biologique et chimique), chercheur-associé à la Fondation pour la recherche stratégique déclare « Le problème avec cette menace [attaque bio terroriste], c'est que les risques d'occurrence sont très faibles mais les moyens de se protéger représentent des investissements énormes". Investissements que visiblement aucun gouvernement n’a voulu faire. Et on en paie le prix aujourd’hui.
Evidemment vous allez me dire : ah ben oui pour étayer ses propos, elle va chercher des articles qui vont dans le même sens. Mais la question est : pourquoi trouve-t-on une disparité de point de vue ? Il y a polémique. Et sur un sujet pareil – la Recherche, la menace bio terroriste et la sécurité sanitaire des nations – aucune polémique ne devrait voir le jour. Il devrait y avoir consensus. Je suis peut-être naïve et assez ignare dans ces domaines mais – parce qu’il y a toujours un ‘mais’ quand je dis que je suis naïve et ignare !! – mais pourquoi se fait-il que de tels sujets fassent l’objet de polémiques ? Oui l’article dans Cairn cité ci-dessus le dit : il y a polémiques car le sujet est traité de façon politique. Et maintenant on se rend compte que ce n’est pas jouable.
C’est comme le Professeur Didier Raoult : c’est une sommité ou c’est un charlatan – pour faire très court ? Pourquoi y-a-t-il une polémique à son sujet ? Je n’ai aucune idée sur la question. Ce qui me dérange c’est que la question soit posée. Ceci dit il est quand même infectiologue et professeur de microbiologie à la faculté des sciences médicales et paramédicales de Marseille et à l'institut hospitalo-universitaire en maladies infectieuses de Marseille (IHU). S’il est un charlatan comme on a pu le lire, que fait-il à l’IHU ? Mais bon je n’en sais rien.
Le problème est que pour toutes ces prises de position, qui concernent des sujets essentiels sinon vitaux, les conflits politiques et/ou économiques mènent la danse. Exit réflexion, échanges ou partages de savoir, humanité. La politique vous dis-je !
De toute façon maintenant, au moins tout le monde est d’accord sur un point : c’est l’apocalypse ou presque. Et pour couronner le tout maintenant Donald (Trump) veut nous faire croire qu’un labo chinois est à l’origine du truc. Politique encore.
A tout ce chaos s’ajoutent – je pioche au hasard – quelques infos qui empoisonnent l’air ambiant.
Le gouvernement octroie un chèque en blanc de 7 milliards à Air France et dans le même temps la compagnie refuse de rembourser les billets d’avion pour cause d’annulation de vol.
Les respirateurs fabriqués dans l’urgence par Air Liquide, PSA, Valeo et Schneider Electric seraient inadaptés. Notons au passage que trois de ces braves industries sont présentes au CAC40 … Et qu’elles se font des couilles en or depuis un paqué d’années.
Les caissières de SuperU vont bénéficier de … 50€ de prime par semaine !!
Le Conseil scientifique préconise la reprise des classes en septembre : qu’à cela ne tienne les écoliers, collégiens et lycéens reprendront le 11 mai par petits groupes, une semaine sur deux et d’une manière différenciée selon les régions … Enfin ce n’est peut-être pas ça mais ça y ressemble. Ou même l’inverse !
Les tests à grande échelle ? Ça n’aurait pas de sens a dit Monsieur Macron. Ah bon ? Adieu les tests. Par contre on investit dans des drones qui surveillent, dans des applications qui pistent, dans des sous-marins nucléaires à un milliard le navire. Soit dit en passant un milliard c’est le budget hôpital annoncé en janvier 2020 pour … trois ans.
Et quand même, cerise sur le gâteau : « […] désireuse d’incorporer dans la surveillance bancaire ‘ les facteurs environnementaux et sociaux ‘, [la Commission de Bruxelles] a conclu un contrat avec la société américaine BlackRock.[5] » Là on atteint quand même des sommets ! BlackRock qui s’occupe d’environnement et de social ! Si j’étais un loup je hurlerais à la mort comme dirait ma copine !
Alors pour finir, pour ne pas rester sur une note sombre, je vous conseille ce texte que l’on m’a envoyé. C’est très très très drôle !
https://www.facebook.com/102510334431957/videos/2672515083025380/
Pour résumer nous sommes davantage déconfits que confinés.
Prenons soin de nous !!!!!
Good bye et good luck
[1] Kubrick par Kubrick est disponible du 5 avril 2020 au 10 juin 2020 sur Arte.fr.
[2] Vers une gestion politique des crises sanitaires ? - Claude Gilbert et Laurence Raphaël - Dans Les Tribunes de la santé 2011/3 (n° 32), pages 55 à 60 - https://www.cairn.info/revue-les-tribunes-de-la-sante1-2011-3-page-55.htm
[3] https://www.lemonde.fr/blog/huet/2019/07/06/loi-recherche-le-conrs-veut-6 milliards
[4] https://www.challenges.fr/monde/bio-terrorisme-improbable-a-court-terme-mais-il-faut-s-y-preparer_455576]
[5] https://www.lemonde.fr/economie/article/2020/04/18/blackrock-l-encombrante-conseillere-de-la-commission-de-bruxelles_6037014_3234.html