Les détracteurs de Jen-Luc Mélenchon suite à son billet de blog pour dénoncer la visite de Nancy Pelosi à Taïwan surjouent l'indignation à bien peu de frais. Et l'article de François Bougon et Mathieu Dejean viennent malheureusement donner de l'écho à cet antimélenchonisme primaire qui trouve sa source uniquement dans le caractère clivant du personnage.
On ne peut pas plaire à tout le monde, on le sait, quand on arrive au niveau de notoriété et de popularité de Jean-Luc Mélenchon mais prendre une déclaration, la tordre dans tous les sens pour dépeindre le leader Insoumis en porte-parole de l'impérialisme chinois est juste risible. La réalité est que la visite de Nancy Pelosi était bien une provocation manifeste envers la Chine qui lorgne sur cette île depuis très longtemps. Pour de bonnes ou de mauvaises raisons, la Chine veut récupérer ce territoire et nous Français, nous serions très mal avisés de juger les intentions chinoises quand on sait que les troupes françaises sont intervenues au Sahel, en Centrafrique, au Tchad et que la France maintient un dispositif de sécurité renforcé dans les Outre-mer notamment en Guadeloupe où les aspirations indépendantistes sont de plus en plus fortes.
En matière d'impérialisme, nous n'avons donc pas beaucoup de leçons à donner au monde car la France, elle-même, exerce et s'attèle à étendre son influence culturelle, politique militaire et économique par la force. Sans parler du soutien d'Emmanuel Macron à Mahamat Idriss Deby, l'actuel président tchadien qui a succédé à son père sans aucun processus démocratique là aussi pour garder ce territoire d'Afrique sous emprise française. Dénoncer donc la posture américaine est juste le bon sens car le voyage de la présidente de la Chambre des représentants des États-Unis vaut quasiment reconnaissance de Taïwan en tant qu'Etat indépendant et souverain alors que la Chine ambitionne de reprendre cette île.
Nul doute qu'il faille toujours soutenir les démocraties lorsque celles-ci sont menacées par des États impérialistes mais force est de constater que l'impérialisme d'aujourd'hui n'est pas que chinois. Il est aussi américain et russe. Or combattre les trois impérialismes en même temps relève de l'impossible. D'où la nécessité de choisir l'impérialisme le plus dangereux pour le monde et de ce point de vue, il ne fait aucun doute que c'est bien l'impérialisme américain qui fait craindre au monde entier le chaos total dans un avenir proche. Les guerres en Irak, en Afghanistan, en Libye, le soutien et l'armement d'Israël pour mieux réprimer le peuple palestinien qui résiste à l'occupation sont autant de menaces pour la stabilité du monde.
Les bonnes âmes revendiquent le soutien au peuple taïwanais parce que l'île est une démocratie mais qui croit encore que les États-Unis soutiennent la démocratie dans le monde après les effusions de sang qu'ils ont provoquées au quatre coins de la terre? La France, pays soumis aux desiderata américains n'est pas davantage animée par ce dessein progressiste de répandre la démocratie et l'autodétermination des peuples où alors il faut nous expliquer pourquoi notre diplomatie soutient toujours ouvertement et reçoit en grande pompe Denis Sassou-Nguesso, le président de la République du Congo, l'un des hommes les plus corrompus de la planète et massivement rejeté par l'opinion publique congolaise. La même question se pose aussi pour le président égyptien Al Sissi qui a accédé à la plus haute marche du pouvoir en décimant des milliers de manifestants.
C'est pourquoi soutenir la démocratie est certes une impérieuse nécessité et salutaire pour ce que nous sommes mais le faire de façon pragmatique et par étape c'est mieux car s'offusquer de voir un article qui dénonce l'impérialisme sanguinaire américain, c'est soutenir l'impérialisme américain lui-même et lui donner toutes les raisons de continuer son expansion mortifère à travers le monde.