Et ce qui devait arriver arriva. 75% des enseignants du premier degré seront grévistes ce jeudi 13 janvier contre le énième protocole sanitaire mis en place par le ministre de l'Education Nationale, Jean-Michel Blanquer.
Il était temps que le corps enseignant se rebelle face à tant de mépris de leur ministre. On ne compte plus les sorties polémiques du ministre. Le dernière en date tient en quelques mots : "on ne fait pas grève contre une virus". Une phrase lapidaire et qui témoigne évidemment de l'immense dédain qu'il a pour cette laborieuse corporation. Et aussi qu'il est à mille lieux de comprendre le malaise dont souffre le corps enseignant.
Ces hommes et ces femmes qui préparent, arment par la transmission des savoirs et des savoir-faire les futures générations au monde de demain sont frappés à chaque prise de parole de leur ministre qui ont souvent des allures d'injonctions ou de remontrances.
Lorsque le même Ministre parle d'absenteisme au sein de l'Assemblée Nationale en évoquant le cas des professeurs absents, cela dit bien quelque chose de l'état d'esprit qui l'anime. Le mot absentéisme renvoie bien à une culpabilité, une culpabilité difficile à comprendre d'ailleurs dans la mesure où Jean-Michel Blanquer sait pertinemment que la majorité des absences s'expliquent par une flambée de l'épidémie. Cette épidémie qu'il n'a pas su ou pas voulu endiguer dans les établissements scolaires, invoquant avec une morgue insupportable que la fermeture des écoles, collèges et lycées aggraveraient les inégalités.
Le profond mouvement de protestation des enseignants couve depuis plusieurs années mais cette impréparation, ces couacs à répétition, ces protocoles que les enseignants apprennent à la dernière minute et par le biais d'une presse payante et enfin, la dégradation de leurs conditions de travail sans parler du gel du point d'indice qui malmène le pouvoir d'achat des enseignants sont autant de raisons qui ne permettent plus à tous ces hommes et ces femmes d'exercer leur métier sereinement.
Enseigner, un métier noble mais encore faut-il trouver l'envie de l'exercer quand le gouvernement ne se cache même plus de vouloir privatiser l'éducation en restreignant les budgets, le nombre d'enseignants, les remplaçants et en surchargeant les classes. La Seine-Saint-Denis est le département qui se mobilisera le plus en cette journée du 13 janvier. Rien d'étonnant quand on sait que la Seine-Saint-Denis un territoire de l'Education Nationale sacrifié. Les enseignants sont recrutés souvent sans certification, sans préparation, sans formation et à des niveaux de rémunération qui frisent le scandale. Le politique du ministère de l'Education Nationale est claire : il faut décourager les jeunes d'enseigner et pour cela, rien de mieux que des bas salaires et des infrastructures laissées à l'abandon. D'ailleurs, la chute vertigineuse du nombre de candidats au CAPES démontre à elle-seule la perte de vocation pour ce si beau métier. C'était ça "notre prooooojeeeeeet" et voilà le résultat cinq ans plus tard.
Quand les enseignants n'ont plus envie d'enseigner, comment donner envie aux enfants d'apprendre? Car derrière cette politique du tout budgétaire, c'est bien l'échec scolaire qui guette les futures générations et en bout de course une société où l'éducation sera une prestation marchande seulement accessible aux ménages capables de l'offrir à leurs enfants. En somme, l'Inégalité En Marche.