Ce quinquennat qui s'achève était douloureux sur tous les plans. La démocratie, l'écologie, l'école et plus globalement notre modèle social ont été très sérieusement abîmés par Emmanuel Macron et le gouvernement qu'il a mandaté pour faire cette sale besogne. Marine Le Pen, finaliste de ce scrutin, reste et restera l'héritière d'une idéologie mortifère qui nous ramène aux souvenirs les plus sombres de notre histoire.
L'expression "choisir entre la peste et le choléra" n'a jamais eu autant de sens que dans les circonstances que nous traversons aujourd'hui. Mais se résoudre à choisir entre deux prétendants dont chacun sait qu'ils seront l'un comme l'autre nocifs pour la France n'est plus un choix mais une contrainte et voter sous la contrainte ne peut et ne doit pas être une conception normale de l'exercice démocratique. Voter l'un pour rejeter l'autre est un choix qu'on peut faire une ou deux fois tout au plus dans une vie mais ne peut résolument pas être une habitude à prendre tous les cinq ans.
Si chaque rendez-vous démocratique devient l'occasion de "faire barrage" selon la formule consacrée, c'est bien que notre démocratie est gravement malade. Voter pour barrer la route à l'un sans adhésion au projet de l'autre, pire, en éprouvant même une révulsion certaine pour ce dernier est le pire des choix. C'est pourquoi voter blanc devient alors la seule alternative moralement et politiquement acceptable si nous ne voulons pas prendre part une nième fois à ce simulacre de front républicain. De front républicain d'ailleurs il ne reste que le nom car s'il y a bien une idée que nos politiques ont vidé de son sens, c'est le front républicain.
La vacuité politique de cette manœuvre est si prégnante que les instituts de sondages estiment aujourd'hui à environ 30 % le report des voix de Mélenchon au profit de Marine Le Pen. Non pas par adhésion bien sûr mais pour tenter de faire échouer le calcul bassement politicien et profondément nauséabond du président sortant. Ce dernier étant en effet convaincu d'obtenir sa réélection haut la main avec Marine Le Pen face à lui d'où la tentation de faire mentir son pronostic quitte à emmener la France dans le sillage de son terrible passé qu'on croyait révolu.
Il affirme en plus avec une morgue insoutenable qu'il ne banalisera jamais les idées d'extrême-droite alors qu'il les a déjà banalisés par les actes en orchestrant l'humiliation des migrants, le saccage de leurs tantes, en réhabilitant le Maréchal Pétain, un "grand soldat" selon ses propres termes, et en donnant un blanc seing à son ministre de l'intérieur visiblement très à l'aise avec les thèses d'extrême-droite. Lui-même trouvant Marine Le Pen "trop molle" sur certains aspects de son programme vis-à-vis de l'immigration et de l'islam. Associations caritatives fermées ainsi que de nombreuses mosquées et de nouvelles mesures prises toujours plus stigmatisantes pour les musulmans à chaque nouvel attentat perpétré. Les idées d'extrême-droite sont en réalité déjà au pouvoir, certes de façon un peu édulcorée mais les jalons de la politique du rejet sont déjà posés. Alors participer à une mascarade électorale pour se donner bonne conscience n'est définitivement plus la façon dont les Français veulent investir le champ politique. L'usure a eu raison de ce front républicain à répétition, une usure dont la victime est la démocratie ou du moins ce qu'il en reste.
Cependant voter est un droit et il ne faut pas oublier que mettre un bulletin dans l'urne était il n'y a pas si longtemps un privilège. Il faut donc continuer de s'approprier ce droit mais en exprimant une vraie aspiration. Et c'est bien la couleur blanche qui la représente aujourd'hui.