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Billet de blog 22 avril 2022

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Et si Marine Le Pen ne voulait pas du pouvoir?

Le débat de l'entre-deux-tours qui s'est tenu mercredi 20 avril a montré une Marine Le Pen méconnaissable. Fébrile, approximative et pour tout dire totalement inoffensive. C'est en ces termes qu'on pourrait qualifier la prestation de Marine Le Pen lors de ce débat contradictoire dont les attentes étaient immenses.

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Le débat de l'entre-deux-tours qui s'est tenu mercredi 20 avril a montré une Marine Le Pen méconnaissable. Fébrile, approximative et pour tout dire totalement inoffensive. C'est en ces termes qu'on pourrait qualifier la prestation de Marine Le Pen lors de ce débat contradictoire dont les attentes étaient immenses. 

La candidate d'extrême-droite jurait qu'elle avait beaucoup appris de son dernier débat raté de 2017 et qu'elle livrerait par conséquent une bataille sans merci dans cette étape médiatique de l'élection. Quelle fut la surprise des téléspectateurs de voir une femme sans posture ni stature. Ébranlée à la moindre mise en cause et perdue dans les méandres d'un programme qu'Emmanuel s'est amusé à détricoter sans difficulté, Marine Le Pen a été si mauvaise qu'elle a réussi la contre-performance de faire passer le président sortant pour quelqu'un de compétent et de convainquant.

 Il y avait pourtant tant de choses à dire pour accabler Emmanuel Macron. Le bilan social et démocratique calamiteux de ces cinq dernières années aurait du alimenter de longues minutes cet échange entre les deux prétendants à la magistrature suprême mais rien. L'affaire Mc Kinsey a été évoquée une seule fois furtivement alors que là aussi, ce mode de gouvernance par l'appel à des cabinets privés était un angle d'attaque que n'importe quel candidat aurait pleinement exploité pour discréditer un Macron bien trop à l'aise et bien trop sûr de lui. Un peu comme s'il savait qu'il allait avoir face à lui une femme sans envergure et sans répartie.

 Les ratages de ce quinquennat ne manquent pas. Réforme des retraites, affaire Benalla, affaire Delevoye, l'affaire Alstom, la gestion de la pandémie par le mensonge et un autoritarisme assumé, précarisation de l'emploi, réforme de l'assurance chômage, aggravation des inégalités, la mise à sac de l'hôpital public, cadeaux fiscaux en pagaille pour les plus aisés et ainsi de suite. Il y avait un choix infini dans le menu des griefs faits à l'encontre du président sortant mais étrangement, aucune mention de toutes ces thématiques ou presque. À se demander si Marine Le Pen voulait vraiment le poste de présidente de la République.

 C'est une question désormais à laquelle elle va devoir répondre car c'est bien le sentiment que de plus en plus de marinistes partagent. Est-elle venue dans l'idée d'en découdre ou simplement de montrer une autre facette d'elle-même, c'est-à-dire d'une femme insuffisamment compétente face aux responsabilités de la fonction à laquelle elle prétend? Le doute n'est plus permis à la lumière de ce que les téléspectateurs ont vu médusés ce 20 avril 2022.  La thèse selon laquelle Marine Le Pen ne veut pas du pouvoir prend de plus en plus d'épaisseur. Et cela pour justement rester crédible face aux électeurs afin de maintenir à flot la petite entreprise familiale que son père lui a léguée.

 Il n'y rien de plus facile et de plus confortable que de rester en effet dans l'opposition et on dirait bien qu'elle a pris goût à ce rôle de donneuse de leçon. Mais rater la dernière marche face à une cible aussi facilement prenable prouve pour beaucoup de partisans du Rassemblement National que Marine Le Pen n'est pas intéressée par l'exercice du pouvoir et tout laisse à penser même qu'elle préfère gérer sa boutique qui est finalement une affaire très rentable et qu'il faut pérenniser. Et quelle meilleure façon de pérenniser un parti qu'en ne se risquant pas à l'exercice du pouvoir et pour ce faire, rater un débat d'entre-deux-tours semble être une très bonne stratégie. Généralement mordante, vindicative et pugnace, Marine Le Pen a montré le naufrage en direct de sa candidature. Même ses thèmes de prédilection que sont l'immigration et l'islam ont été traités de façon inhabituellement superficielle alors que l'idéologie du rejet est son principal fond de commerce politique. 

Stratégie ou accident, ce débat d'entre-deux tours a permis de comprendre définitivement pourquoi Emmanuel Macron a tout fait pour que ce soit Marine Le Pen face à lui au second tour de élection présidentielle. C'est en effet la seule candidate qui vraisemblablement peut assurer sa réélection haut la main et c'est bien le chemin que prend ce scrutin même si la grande perdante de ce rendez-vous tant attendu est la démocratie.

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