Vladimir Poutine a réussi à gagner la sympathie de l'opinion publique française et mondiale. Faire croire que la France, les États-Unis et l'OTAN sont dans le camp du bien et la Russie l'axe du mal comme le disait en son temps Georges Bush Junior est une bien vaine tentative. La réalité est évidemment plus complexe mais une complexité que les observateurs et les citoyens un peu aguerris comprennent parfaitement aujourd'hui.
Si la France était ce pays démocratique et si attaché aux valeurs humanistes comme aiment à le rappeler les commentateurs qui ont pignon sur rue, nous ne serions pas le troisième exportateur d'armes au monde? La France a même dépassé la Chine, la belle affaire ! Les Yéménites morts sous nos bombes nous remercient pour cette belle performance commerciale et ce n'est pas tout.
Les scandales qui secouent la République depuis tant d'années et qui finissent en instructions judiciaires à rallonge pour donner lieu à des simulacres de procès sont aussi l'expression d'un pays dont la démocratie est fatiguée, usée jusqu'à la corde.
La concentration des médias d'opinion aux mains d'une poignée de milliardaires ne peuvent pas trop plaider là non plus pour une démocratie française rayonnante.
Ne parlons même pas des migrants qu'on laisse en conscience mourir dans la Méditerranée faisant de cette mer un cimetière à ciel ouvert.
Ça c'est pour la France mais si on faisait l'inventaire des États-Unis, ce pays avec lequel nous sommes alliés depuis de si longues années, on aurait encore plus de mal à nous voir dans une glace. Le proverbe qui dit " dis moi qui sont tes amis et je te dirai qui tu es" donne toute la mesure de nos défaillances morales et éthiques. Les États-Unis, ce n'est pas moins qu'une guerre en Irak sans aucun mandat international et une guerre en Afghanistan qui ont fait à elles seules des centaines de milliers morts et principalement des innocents sans que la France ne s'en offusque si ce n'est par le grand discours de Dominique De Villepin prononcé le 14 février 2003 devant le Conseil de Sécurité de l'ONU qui nous a mis un peu de baume au coeur. Sinon plus rien.
Nous accompagnons l'oncle Sam dans ses pires œuvres sans jamais nous poser la question du bien-fondé de notre coopération. Quant à l'OTAN qui veut étendre son influence militaire vers l'Est pour mettre Moscou sous pression, on a de bonnes raisons de garder nos distances vis-à-vis de cette organisation internationale surtout que celle-ci est dirigée sous pavillon américain.
La France et tout son modèle démocratique ne nous permettent plus de dire quel pays est ou n'est pas démocratique.
Le soutien de la France aux dictatures africaines pour mieux museler les aspirations sociales de leurs peuples et donc au final les piller de leurs richesses plus tranquillement rend nos déclarations, nos postures et notre indignation honteuses. Nos élites ne comprennent pas que nous comprenons tout de l'imposture intellectuelle et morale qu'ils mènent en notre nom et c'est tout cela qui donne aujourd'hui à Vladimir Poutine une solide crédibilité malgré tous les articles qu'on peut lire même sur Mediapart.
Interdire Russie Today et Sputnik est-il vraiment mieux que permettre à CNews de crier sa haine de l'islam matin midi et soir? L'une fait de la propagande et l'autre fait sa propagande aussi. Aucune différence entre les deux médias sauf que la ligne politique n'est assurément pas la même. L'interdiction de ces deux médias russes nous a donc offert à peu de frais le parfait exemple d'une liberté d'expression à géométrie variable. Sauf que lorsqu'on permet à un courant de pensée de s'exprimer et pas l'autre, on ne peut plus parler de liberté d'expression.
Le scandale Mc Kinsey lui est un peu la cerise sur le gâteau d'une longue série de manquements devenus la norme car il donne toute l'étendue des dérives qui sévissent en France. Un cabinet américain qui siphonne les finances publiques avec l'assentiment de l'exécutif pour réduire voire supprimer des libertés est loin de correspondre à la haute idée que chacun se fait de notre devise commune.
Pour toutes ces raisons, je préfère encore un Poutine qui assume de diriger son pays d'une main de fer en ayant neutralisé tous les contre-pouvoirs plutôt qu'un pays qui prêche la vertu en se targuant d'être le défenseur des libertés alors qu'il n'a eu de cesse de combattre ces mêmes libertés à l'intérieur comme à l'extérieur de ses frontières. Car l'un s'affiche tel qu'il est alors que l'autre dissimule son visage hideux par un altruisme en réalité inexistant.