http://youtu.be/eNj-jxY86AE
http://youtu.be/Vq7k36i81-g
http://youtu.be/ofI8AE2OARs
http://youtu.be/n4Yj5RIZ8x8
http://youtu.be/zjGpwRcl5RI
http://youtu.be/lNip5UFgZHE
http://youtu.be/svedKDqHAiE
http://youtu.be/jDOfjyTydX8
Ce documentaire pose beaucoup de questions intéressante à ce sujet et donne des points de vue qui me semblent tous justes si l'on considère le parcours des personnes qui les défendent. Même si, personnellement, je suis loin de les partager tous.
Cela me ramène aux questions que je me pose concernant les massacres de l'histoire qui, comme c'est dit quelque part dans le documentaire, ne mobilisent pas grand monde alors qu'ils se déroulent toujours que ce soit au Mexique, au Guatemala au Chili et en Afrique, entre autre, pour le plus grand bénéfice des multinationales.
En même temps, lorsque je vois dans le film la façon dont les jeunes sont amenés à se considérer comme des victimes potentielles du racisme (la scène avec les trois vieux assis sur un banc et l'interprétation qui leur est donné de leur paroles est significative) cela m'évoque l'instrumentalisation faite par les chrétiens de leurs martyrs pour justifier les exactions qu'ils ont commises par la suite : quoique ce soit que l'on fasse aux autres pouvait-on le comparer à l'horreur de la crucifixion du fils de dieu ?
Les réactions des jeunes qui se sentent coupables de ne pas ressentir ce qu'ils avaient imaginé devoir éprouver sont bouleversantes et, par la suite, on voit bien que ce qui donne une dimension réelle à l'horreur c'est ce qui permet l'identification à des personnes concrètes et non des chiffres : les vêtements d'enfants, les objets du quotidiens. De la même façon que les écrits des personnes qui ont vécu ces horreurs, même (et peut-être justement parce que) s'ils ne concernent que quelques individus dans un océan de souffrance nous permet mieux de comprendre ce que cela signifiait de parcours de vie saccagés. C'est peut-être aussi pour cela que l'on a refusé d'écouter les témoignages des survivants, ce qui est du domaine de l'impensable pour moi, parce que ces témoignages auraient rendu le poids de personnes à part entière à ceux et celles qu'on avait tenté de réifier. Il me semble que cette surdité de la société d'alors est un prolongement odieux du crime commis, d'autant plus odieux qu'il provient d'une société dont les rescapés auraient dû recevoir compassion, écoute et assistance.
Mais ce documentaire m'a montré quelque chose sur lequel je réfléchis depuis longtemps, c'est que lorsque l'on a conscience d'être soi-même victime réelle, porteur de l'héritage de victime des siens ou/et victime potentielle il n'est pas facile de ressentir de la compassion pour d'autres victimes car on a toujours le sentiment que ce que les nôtres ont vécu est pire que tous ce que les autres peuvent vivre.
Alors qu'est-ce qui fait que des familles de victimes peuvent dépasser cela et aller vers l'autre comme l'a fait La famille Elkhalan, ?
une voix contre la haine en Israël
02/01/2011
En Israël, la famille Peled-Elkhalan dérange. Enracinée sur cette terre depuis deux siècles, frappée par un attentat du Hamas, elle lutte de toutes ses forces pour la paix avec les Palestiniens. Nous avons rencontré Gaï Elkhalan, 31 ans.
C’était le 11 octobre dernier, en fin de matinée. Nous avions pris rendez-vous, pour Histoires Ordinaires, avec Gaï Elkhalan. Gaï et sa compagne Noa vivent à Tel Aviv, dans l’une de ces petites maisons ouvrières construites dans les années 50, au temps de l’utopie socialiste, et qui se cachent aujourd’hui, avec leurs immigrés, derrière les buildings clinquants du bord de mer.
Nous voulions connaître Gaï, l’artiste, le militant pacifiste, l’animateur de la radio israélo-palestinienne «All for Peace». Pendant que Noa continuait à fabriquer les marionnettes de leur prochain spectacle, Gaï s’est assis près de ses deux guitares et, de sa voix posée, paisible, a raconté.
Un grand père général et pacifiste
Son histoire est d’abord une grande histoire de famille. Par son père, Rami Elhanan, Gaï appartient à une « neuvième génération » de juifs israéliens. Ses aïeux «sont arrivés fin 18e – début 19e parmi quelques milliers de juifs fuyant les pogroms tsaristes. » Certains, dans la famille, prétendent d’ailleurs à une sorte de pureté originelle : ils appartiennent aux « Neiturei Karta », ces ultra-orthodoxes pour lesquels l’État actuel d’Israël est une insulte à Dieu, le Messie pouvant seul recréer le royaume perdu.
Par sa mère, Nurit Peled, Gaï a surtout hérité d’un grand-père à l’immense personnalité, Matti Peled, professeur de littérature arabe, général et député constamment engagé dans le dialogue avec les leaders palestiniens. Gaï s’en va chercher une photo. Elle date de 1976 : autour de Yasser Arafat, on découvre son successeur Mahmoud Abbas ; le célèbre pacifiste israélien Uri Avnery, Matti Peled…
C’est dans cette famille que Gaï nait en 1979 et grandit tranquillement, artiste déjà dès le lycée, avant d’affronter plus que d’autres, à 18 ans, le tourment des jeunes adultes israéliens : les trois ans d’armée. «Je ne voulais pas mais la pression était forte : “Tu ne pourras pas faire ceci, faire cela… ” On ne fait pas l’armée pour aller au front, pour battre l’ennemi, pour la gloire mais par peur de ne pas pouvoir accéder aux bonnes universités, aux bons postes, à l’excellence. »
Smadar Elkhalan, 14 ans, tuée dans un attentat du Hamas
Le jeune Gaï Elkhalan enfile donc le treillis. Pendant un mois. C’est alors que sa vie, celle de sa mère, Nurit Peled, de son père, Rami Elkhalan, et de toute la famille, bascule. L’après-midi du jeudi 4 septembre 1997, leur fille et sœur, Smadar, 14 ans, est tuée dans un attentat-suicide du Hamas, rue Ben Yehuda à Jérusalem. Les Elkhalan transcendent leur douleur : le combat contre la haine devient pour eux une affaire personnelle.
À l’armée, relégué à des postes subalternes en raison du drame, Gaï réfléchit de plus en plus à la société dans laquelle il vit. Dans les mois qui suivent, ses parents intègrent le «Forum des familles endeuillées» lancé deux ans plus tôt et qui réunit cinq-cents familles, moitié israéliennes moitié palestiniennes. Nurit Peled et Rami Elkhalan s’engagent de plus en plus et revivent. Leur fils aussi. Lors de sa troisième et dernière année d’armée, Gaï sympathise avec les «Noirs », les Juifs séfarades venus des pays arabes ainsi désignés par les Ashkénazes, les « Blancs » venus d’Europe centrale. Il les défend et aiguise sa critique.
En 2000, quand il arrive en France pour ses études, Gaï est prêt à franchir un nouveau cap. Il se met à apprendre l’arabe, fréquente les militants français qui l’invitent à témoigner, lâche un jour le fond de sa pensée et dans la foulée signe la lettre des « Refuzniks », l’appel à l’objection de conscience pour les jeunes israéliens. Le voilà dans le mouvement « Le Courage de refuser ». Sur les scènes de France, Gaï le militant retrouve Gaï l’artiste : «Petit à petit, j’ai transformé les conférences en séances de contes contemporains puis former un groupe avec des Palestiniens. »
Un spectacle satirique et philosophique
C’est un artiste pacifiste qui signe, en 2006, son retour sur la terre d’Israël. Son art mûrit. Il introduit des marionnettes et surtout le contenu devient «beaucoup plus satirique, philosophique aussi. » Il crée une troupe qui se produit dans les festivals de théâtre alternatif à défaut d’avoir accès aux scènes nationales. Il décrit les « fragments d’identité » de la société israélienne qui semble n’avoir pour seul ciment que la peur de l’autre et la guerre qui va avec. Il « lutte contre la propagande » et ce que « beaucoup de gens appellent, dit-il, la fascisation » qui menace Israël.
Pendant ce temps, ses parents parcourent aussi le pays. Et parlent, parlent encore. Au printemps dernier, à la veille de la « Nakba », la « catastrophe » que représentent pour les Palestiniens la défaite et l’exode de 1948, Nurit Peled, prix Sakharov pour les droits de l’Homme, a fait une longue déclaration commençant ainsi : «Je porterai le deuil pour la Nakba. Je porterai le deuil pour la Palestine disparue que, dans sa plus grande partie, je ne connaîtrai jamais. Je porterai le deuil pour la terre sainte qui perd son humanité, son paysage, sa beauté et ses enfants sur l'autel du racisme et du mal… »
Deux « frères », Rami l’Israélien et Bassam le Palestinien
En avril, dans un long discours que l’on peut retrouver sur le site d’UAIV (Une autre voix juive), Rami Elkhalan est revenu sur ses treize années de deuil, en insistant sur «le point culminant de cette traversée » : «La rencontre entre moi et mon frère le « terroriste » qui a passé sept ans dans les prisons israéliennes, le combattant pour la Paix Bassam Aramin. » Et de citer la lettre de ce dernier :
«“Chers Nurit et Rami, je voulais vous dire combien je m’identifie à vous, comme un frère, en ce triste anniversaire de la mort de votre pure et belle enfant Smadar (…) ; depuis que nous nous sommes rencontrés, je n’ai pas eu le courage de vous écrire à ce propos par peur d’ajouter encore plus de chagrin et de souffrance dans vos cœurs. Je pensais que le temps, petit à petit soignerait cette profonde blessure. (…) Mais quand ma fille Abir a été assassinée par un soldat israélien le 16 janvier 2007, j’ai compris que les parents n’oublient jamais, ne serait-ce qu’un seul instant. Nous vivons nos vies d’une manière spéciale que les autres ne connaissent pas et j’espère qu’aucun autre être humain, qu’il soit Palestinien ou Israélien, ne sera jamais forcé de la connaître.”»
Un voilier contre le blocus de Gaza
Rami Elkhalan et Bassam Aramin ont créé ensemble une émission sur la radio «All for Peace». Elle est animée par Gaï qui, chaque semaine, y donne la parole à divers groupes militants, à des jeunes, des artistes. Elle s’appelle, traduit en français, «On change de direction».
Avant de nous quitter, nous avons évoqué avec Gaï la dernière action de son père quinze jours plus tôt. Dans la sillage de la fameuse flotille pour Gaza arraisonnée dramatiquement le 31 mai, Rami Elkhalan a embarqué sur un voilier avec une dizaine de militants israéliens et européens pour tenter de forcer à leur tour le blocus contre Gaza. Ils ont été bien sûr arrêtés. L’ancien député a subi huit heures d’interrogatoire. Il en faudrait bien plus pour décourager cet homme et cette famille…
Michel ROUGER. La famille Elkhalan, une voix contre la haine en Israël