Bien, je vais reprendre ici un conte en randonnée en trois parties qui est tellement banal que le sens en échappe à ceux qui le racontent aux bambins mais qui, de fait, raconte comment chacun d'entre nous devient un agent de répression pour son voisin et comment cela pourrait s'inverser....
Il était une fois, une fermière qui avait une chèvre qui lui donnait du lait de qualité qu'elle vendait un bon prix au marché, ce qui lui permettait de mener la belle vie.
Un jour, la chèvre lui échappe et s'en va dévorer des choux. La fermière en colère veut l'en empêcher mais la chèvre ne se laisse pas faire. Alors, de plus en plus en colère la fermière court chercher le chien et lui donne l'ordre de mordre biquette pour l'obliger à sortir du chou. Mais le chien n'est pas d'accord, il dit que Biquette ne lui a rien fait, qu'elle est son amie et qu'il ne voit pas pour quelle raison il devrait la mordre.
Furieuse, la fermière va chercher le bâton pour qu'il tape le chien mais le bâton refuse tout net : il n'a rien à reprocher au chien, ni à Biquette.
Ah ! Puisque c'est comme ça crie la fermière je vais demander au feu de te brûler! Mais le feu n'est pas d'accord et la fermière le menace alors de l'éteindre avec de l'eau, l'eau ne voulant rien savoir, la fermière demande à la vache de la boire La vache n'a pas soif et puis Biquette est son amie.
La fermière se précipite chez le boucher et celui-ci veut bien tuer la vache qui, du coup, est prise d'une soif soudaine et accepte de boire l'eau qui, à son tour veut bien éteindre le feu qui est d'accord pour brûler le bâton qui ne voit plus pourquoi il refuserait de taper le chien qui décide de mordre Biquette qui veut bien sortir du chou.
Mais la fermière n'a pas le temps de se réjouir car Biquette furieuse donne un coup de corne au chien, qui mord le bâton, qui tape sur le feu, qui chauffe l'eau qui brûle le museau de la vache, qui encorne le boucher.....
Bon, c'est très résumé : il y a un refrain "Ah! tu sortiras, Biquette, Biquette ! Ah! tu sortiras de ce chou là !" qui rallonge d'autant l'histoire et que les enfants adorent, mais aussi longue qu'est cette randonnée, les petits l'écoutent jusqu'au bout et la redemandent, se plaisant à devancer l'énonciation des personnages. C'est un vrai plaisir de la leur raconter !
Si vous voulez connaître la chanson de cette histoire voici un lien qui la donne avec deux personnages en plus mais les saisons deux et trois omises....
http://www.wat.tv/video/ah-tu-sortiras-biquette-z2uw_2g7bz_.html
Cependant, ce n'est pas pour cela que j'ai fait remonter à votre mémoire cette "niaiserie" qui appartient à notre patrimoine national (et international : il y en a des versions dans le monde entier) mais parce que deux ou trois choses me frappent (ouille ! Pas sur la tête !) dans cette histoire : d'abord, que la fermière ne peut rien faire contre Biquette sans la complicité de subordonnés et que tant que personne ne lui obéit elle est impuissante (ah ! L'obéissance, quelle belle valeur !), qu'il en suffit d'un (tiens, c'est un être humain, dans le conte, comme c'est bizarre Balthazar !) qui collabore pour que tous les autres soient contraints de le faire pour sauver leur peau (on n'est pas tous des héros) mais surtout que parmi tous ceux-là, il n'y en ait eu aucun qui ait eu l'idée de se solidariser avec les autres pour dire à la fermière que maintenant ça commence à bien faire et qu'elle arrête de les emmbêter !
Si on y regarde bien, cette histoire d'apparence anodine pose des questions essentielles sur le fonctionnement du pouvoir et la soumission des individus et il est une bonne description de son mode de fonctionnement.
watayaga@hotmail.fr