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Billet de blog 9 septembre 2024

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MANIFESTATION VIE CHERE EN MARTINIQUE

Depuis début septembre 2024, la Martinique connaît des manifestations pacifiques contre la vie chère. Organisées par le RPPRAC, elles dénoncent l'octroi de mer et les pratiques des grandes enseignes de distribution qui gonflent les prix. Les manifestants, frustrés par l’inaction des autorités, demandent des réformes pour rétablir une justice économique durable.

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 La crise silencieuse en Martinique :

des manifestations pacifiques contre la vie chère, ignorées avant qu’il ne soit trop tard

Depuis début septembre 2024, la Martinique est le théâtre de manifestations pacifiques et symboliques contre la vie chère. Organisées par le Rassemblement pour la protection des peuples et des ressources afro-caribéennes (RPPRAC), ces actions, comme les « courses fictives » dans les supermarchés, dénoncent l'écart scandaleux entre les prix des produits de première nécessité en Martinique et ceux de la métropole. Pourtant, malgré leur caractère pacifique et créatif, ces manifestations n'attirent pas l’attention des médias, augmentant la frustration d’une population déjà exaspérée par l'inaction des autorités et des acteurs économiques.

Une crise qui rappelle celle de 2009

Ce n’est pas la première fois que la Martinique fait face à une telle situation. En 2009, une grève générale similaire avait déjà secoué les Antilles françaises, entraînant une paralysie complète des territoires, notamment en Guadeloupe avec le mouvement du LKP. Les Martiniquais s’étaient alors mobilisés pour dénoncer la vie chère, l'écart de prix avec la métropole et les pratiques commerciales des grandes enseignes. Le mouvement de 2009 avait débouché sur des accords, mais peu de réformes structurelles ont été mises en place depuis. Aujourd’hui, la même crise refait surface, avec les mêmes revendications.

Les grandes enseignes sous le feu des critiques

En 2024, comme en 2009, les grandes enseignes de distribution sont pointées du doigt. Des groupes comme GBH et le Groupe Parfait contrôlent une grande part du marché, à la fois en tant qu’importateurs et distributeurs, leur permettant d’avoir un quasi-monopole sur la chaîne d’approvisionnement​. Malgré leurs affirmations selon lesquelles ils ne pratiquent pas de marges plus élevées qu'en métropole, la population reste sceptique. Les marges bénéficiaires, combinées à la concentration du marché, sont jugées opaques, et les grandes enseignes continuent d'appliquer des tarifs prohibitifs pour les consommateurs martiniquais.

L'octroi de mer : une taxe controversée

Un autre acteur clé dans cette situation est l'octroi de mer, une taxe spécifique aux territoires ultramarins, censée financer les collectivités locales et protéger la production locale. Cependant, cette taxe, souvent appliquée de manière incohérente, contribue à l'augmentation des prix. Par exemple, des produits de base comme le riz, qui n'est pas produit localement, sont taxés à 22 %, ce qui semble incompréhensible pour la population​.

Le renvoi de responsabilités : la grande distribution, la CTM et l'État

Dans ce contexte, les différents acteurs se renvoient la balle. La grande distribution affirme que l'octroi de mer est le principal responsable de la flambée des prix, tandis que la CTM (Collectivité Territoriale de Martinique) accuse les grandes enseignes de pratiquer des marges excessives et reproche à l'État de ne pas assurer suffisamment de contrôle. En réponse, les représentants de l'État semblent minimiser la gravité de la situation, affirmant qu'il n'y a pas de véritable crise des prix, une attitude perçue comme un mépris par la population​.

Malgré ces tensions croissantes, les manifestations actuelles restent largement pacifiques et créatives, mais elles sont ignorées par les médias. Cela crée un sentiment de frustration chez les manifestants, qui craignent qu'une attention ne soit portée que lorsqu'il y aura un dérapage ou un incident violent, éclipsant alors leurs revendications légitimes​.

Une leçon à tirer de 2009 : l’inaction coûte cher

La crise de 2009 a montré que, malgré des mobilisations massives et des revendications légitimes, il est possible de faire peu ou rien face à des problèmes récurrents. Aujourd'hui, la Martinique se retrouve dans une situation similaire, avec des manifestations pacifiques ignorées, des solutions de surface, et une inaction qui mine la confiance de la population. Si rien n'est fait cette fois-ci, les inégalités économiques entre la métropole et l'outre-mer continueront de se creuser, et le mécontentement risque de dégénérer. Les Martiniquais ne demandent pas l'impossible, ils réclament des réformes structurelles qui permettront enfin de répondre aux problèmes de vie chère et de rétablir une justice économique. Il est temps que l'État et les acteurs économiques agissent, avant que la situation n'atteigne un point de non-retour.

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