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Billet de blog 1 juillet 2024

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L'extrême droite n'a jamais été déradicalisée

Aujourd'hui, la honte. Nous avons perdu. Il y a longtemps que nous avons perdu. L'extrême droite française n'a jamais été déradicalisée. Jamais.

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Demain.
"Apparemment, le très sérieux sondages disent qu'on a perdu...
Non attendez, il y a peut-être un truc qu'on a gagné, c'est qu'avec cet 🖕 de Macron, qu'a miné le langage, qu'a tout faussé, on savait plus comment se parler, on savait plus comment penser, on savait plus, on savait plus se tenir en face de cette mollesse et de cette fourberie... Peut-être que maintenant, on aura une vraie place de résistant, peut-être...
Faut pas être assommés, quoi !
Non, on va pas gagner, mais il y a un truc qu'on va retrouver après des années où ça avait disparu, où ça s'était dissolu, abîmé, altéré...
Il y a peut-être quelque chose qu'on va retrouver, c'est vraiment quelque chose qui a à voir avec la résistance, dont on ne sait même plus ce que ça veut dire...
Alors, ensembles, quoi..." C'est Anouk Grinberg, mon actrice tant aimée de Merci la vie.
Oui, il est probable que nous ayons perdu, nous les humanistes, les pédagogues pour tou.s.tes, celleux qui croyons à l'égalité et à la coopération.
Le patriarcat et le système de domination et de prédation vont gagner demain.
Nous avons préféré diffuser la pensée des philosophes de la prédation plutôt que celle de la coopération, celle de Simone Weil, pourtant au programme, mais dont, à l'évidence, les bacheliers n'avaient pas entendu parlé.
Il ne faut pas nous étonner alors d'un monde qui continue sans vergogne de dévorer ses enfants. C'est nous qui l'avons construit.

Aujourd'hui, la honte.
Nous avons perdu. Il y a longtemps que nous avons perdu.
L'extrême droite française n'a jamais été déradicalisée. Jamais.
Exemple très connu et public : après Vichy, il y a des lynchages honteux mais Papon est devenu préfet de police à Paris. En octobre 1961, il fait jeter des manifestant.e.s dans la Seine.
Exemple inconnu et effacé : à La Flèche, une famille Lévy est spoliée et échappe à la déportation. Ils possédaient deux magasins, dont un au 5 grande rue. Il n'y a plus de traces d'eux dans la ville. Pas de juifs à La Flèche me dit-on quand j'arrive de Paris en 2002. Et pourquoi est-ce que vous revenez ? Je réponds, je ne reviens pas, j'arrive. De la transparence de l'antisémitisme. Je ne sais même pas ce que c'est que d'être juive, je ne suis qu'une juive de nom.
Mon père est accusé d'être un faussaire, un faux déporté, il n'est pas réhabilité publiquement. C'est nous qui le faisons en le poussant à demander la légion d'honneur.
Nous ne sommes pas débarrassés du respect servile de l'ordre et de la hiérarchie.
Nous ne sommes pas débarrassés du patriarcat et de son fils, le capitalisme.
Nos voix pour l'égalité et la coopération n'ont jamais porté et n'ont jamais été entendues.
À chaque fois que j'ai crié, on m'a dit que j'étais impolie ou idiote ou pressée.
Comme toutes les femmes qui tentent de prendre la parole, j'ai été effacée de mon vivant. Il n'y plus de traces au lycée du magnifique projet européen Erasmus +.
J'ai beaucoup pleuré seule sur mon oreiller. Le ridicule ne tue pas.
J'ai été harcelée par des collègues qui croient à la violence éducative et au tri.
J'ai été diffamée sans vergogne sur mon travail.
J'ai voulu défendre et sauver les enfants abandonnés de notre zone périphérique, j'en ai sauvé beaucoup. Pas assez. Mais je suis en paix avec moi-même. J'ai fait tout ce que j'ai pu.
J'ai rejoint il y a deux ans les collègues de la Nouvelle Chance et nous avons été harcelés et méprisés. Nous sommes deux femmes à quitter le navire, malades. L'une avec une maladie mentale, l'autre avec un cancer (c'est moi).
Ce n'est pas nous qui sommes malades, mais le système éducatif de prédation.
Depuis combien de temps avons-nous abandonné nos enfants ?
Depuis combien de temps laissons-nous le racisme s'exprimer comme une parole banale ?
Depuis combien de temps acceptons-nous d'obéir servilement ?
Depuis combien de temps nos “amis” s'attaquent à notre parole jugée trop crue, ou la silencie ?
Depuis combien de temps ?
C'est bien joli de parler de résistance, d'en appeler à la résistance, encore faut-il être debout.
Ce n'est plus mon cas.

Et le texte de Dalie Farah, écrit visiblement, cette nuit :

https://www.daliefarah.com/cest-pas-la-peur-cest-la-vengeance-cest-la-joie-et-le-desir-dordre-arme/

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