https://www.mediapart.fr/journal/france/020925/harcelee-parce-que-lesbienne-une-enseignante-se-donne-la-mort-le-jour-de-la-rentree-scolaire
Ce n'est pas le harcèlement lesbophobe qui l'a tuée, c'est le soutien tacite (par l'absence de réaction et la silenciation) au harceleur du maire, des collègues, de sa remplaçante, des parents d'élèves, du Rectorat, de la justice (non lieu pour les inscriptions lesbophobes), le retournement de culpabilité (l'histoire de la BD numérique qui raconte son histoire, lire Remedium https://blogs.mediapart.fr/158568/blog/280125/cas-decole-lhistoire-de-caroline ).
Elle avait voulu retourner à l'école en septembre 2024, elle avait refusé de fuir, les mobbeurs ont gagné.
Le mobbing, c'est l'extermination concertée d'une cible au travail. Le suicide est la réussite ultime du mobbing = auto-extermination.
Le crime parfait.
Un crime commis à plusieurs mais sans assassin.
L'auto-élimination est un crime sans auteur où la victime, sous emprise, s'assassine.
Le nombre des criminels est pourtant si énorme qu'on n'arrive plus à les nommer sauf par des "ils", "eux".
Visiblement, elle avait compris parfaitement ce qui se passait : « Eux là-bas [à Moussages – ndlr], ils ont gagné. Ils ont une remplaçante, elle s’engage à fond, ils ont gagné. Ils ont tout gagné. Je crois aussi que la hiérarchie a gagné puisqu’il n’y a plus de problème. » (article Mediapart )
On s'y met à beaucoup d'hommes et de femmes pour éliminer une femme qui dérange, surtout si elle fait très bien son travail.
Et si elle veut reprendre sa place, nouvelles attaques violentes, nouveaux silences : "la directrice pensait retourner dans son école, jusqu’à ce qu’un nouveau tag homophobe ne la fasse renoncer, à la veille de la rentrée 2024."
Cela faisait un an qu'elle tenait debout, mal, très mal.
C'est très long un an quand on vit une accumulation de violences qui se sont succédées jusqu'à son effacement, sa disparition avant sa propre mort : la rentrée sans elle à son poste.
Avant sa mort, déjà, elle n'existait plus.
Je le sais. Elle l'a écrit à ses collègues :
"« Je ne peux pas changer la situation, mais ça ne passe pas. » Le 28 août 2025, lors de la dernière semaine des vacances scolaires, Caroline Grandjean postait ce message dans un groupe Facebook dédié aux directeurs et directrices d’école. Elle ajoutait : « La journée de lundi, je vous l’assure, sera bien plus difficile pour moi que pour vous dans vos écoles. » Lundi 1er septembre, alors que ses collègues retournaient en classe, l’enseignante s’est donné la mort."
N'allez pas croire que Caroline manquait d'intelligence, bien au contraire. Elle était normalement sensible. Elle a fini par penser sa mort comme inéluctable - puisqu'elle était déjà morte - pour ne plus revivre encore et encore l'année scolaire 2024-2025.
Je sais de quoi elle parle. J'ai pleuré une partie de la matinée de vendredi et j'ai failli remettre ça lundi : il y a quand même des personnes qui sont jalouses de ma situation (mi-temps thérapeutique après un congé longue maladie), qui me reprochent de ne pas avoir été là l'an dernier (cancer du sein), de vouloir reprendre ma place, d'avoir écrit et d'avoir été publiée, d'avoir obtenu le poste de coordo (lettre de motivation, entretien), d'avoir reçu le soutien des élèves et des parents...
Bref, c'est chiant, je ne suis pas morte.
Je vais raconter tout ça dans un livre, c'est la seule manière que je connaisse pour moi de m'en sortir vivante et joyeuse. Mais c'est très fragile, je le sais.
Caroline Grandjean, je ne t'oublierai pas.
Tu manques déjà à l'humanité.
J'espère que NOUS ne t'oublierons pas.