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Billet de blog 15 mars 2020

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Lavons nous les mains ?

Les *th*ons ça ose tout, c'est même à ça qu'on les reconnaît. Et il y a bagarre pour le titre de chef d'escadrille. On aura un tweet ; "Aux soignants morts au front, la patrie reconnaissante. mdr." ? Le covid sera reconnu maladie professionnelle dans les secteurs essentiels ?Nan hein, vu qu'on peut le chopper n'importe où.

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Je suis un soignant, j’accompagne dans leur vie quotidienne des jeunes adultes handicapés.

Le secteur médico-social est un petit milieu, qui repose sur le tissu associatif. Optimiser, faire mieux avec moins, ces concepts n’ont pas épargné ce secteur d’activité. Il fallait rogner sur les avantages indécents dont jouissaient les professionnels du secteur. Des avantages venant compenser la pénibilité et la faiblesse des salaires (mot tabou chez les groupies de la secte ultra-libérale).

Nos conditions de travail ce sont donc dégradées. Comme partout, c’est le jeu de l’ultra-libéralisme ma chère Lucette.

Notre cœur de métier, c’est l’humain. Il faut faire preuve d’empathie, de bienveillance. Puis réaliser notre boulot d’aide-soignant, d’éducateur, d’ergothérapeute, d’infirmier… Certains collègues, devenus chefs l’oublient parfois.

Il faut donc être bienveillant, dans un contexte qui ne l’est pas du tout. Y compris envers le public auprès duquel on travaille (il s’agit d’assurer le SAV des politiques subies ?).

Nos conditions de travail se sont dégradées. C’est un petit milieu. Avec le temps, on a des contacts avec d’autres établissements gérés par d’autres associations.

La gestion du covid 19 a été, dans le secteur médico-social, anticipée de manière différente selon les associations. L’ARS n’y étant pas totalement étrangère. Et c’est pas brillant, pour le dire vite.

La seule mesure concrète est de placarder des affiches partout nous rappelant l’importance de nous laver les mains.

Merci les gars. Je connais mon taf en fait. Tu croyais que j’étais comme Lucky Luke, je me lave les mains seulement à la fin de l’histoire ?

Pour autant, les mains ça fait pas tout. Parce que dans nos métiers, nous sommes en contact rapproché avec les résidents. Le nursing (habiller, laver…), l’alimentation, les soins médicaux, les soins para-médicaux, le sport adapté…

Si un virus est introduit, il ne lui faudra pas longtemps pour toucher toute la structure : résidents (et leurs familles) et professionnels (et leurs familles).

Pour autant, lavons-nous les mains et tout ira bien.

Bien comment, au juste ?

Jeudi dernier, le tyran a dit que les écoles fermaient pour une durée indéterminée, mais que rassurez-vous, un parent pourrait rester garder les enfants avec maintien de ressources. Bon. Pas tout à fait rassuré, on se dit qu’il y a un truc qui bouge, et que si un parent garde les enfants, en fait, c’est bien.

Vendredi on explique à nos enfants qu’ils vont rester à la maison, afin de les protéger, de protéger tout le monde. Les parents ont une idée de la bonne partie de rigolade que ça a été.

Samedi, on apprend que les enfants de soignants vont aller à l’école. Mais l’école c’était danger non ? Leur école au début, une autre ensuite en fonction de ce qui se passe.  Maman et Papa vont aller au taf parce que les autres passent avant nos enfants. Et puis d’ailleurs, nos enfants ils vont aller à l’école.

Et on est quelques uns, à être en couple dans le même secteur. Donc mobilisés tous les deux. Pendant que nos gamins partent on ne sait où. Quitte à devoir prendre les transports.

Alors que les yeux n’étaient pas encore secs, il aurait fallu adopter un discours inverse à celui que l’on tenait avant ? On est censés convaincre nos enfants. Mais qui nous convainc, nous ?

Placebo - Where Is My Mind Live (HD) © FaceTubeTr

Nos enfants ne sont pas électeurs que l’on balade de bobards en bobards. Nos enfants ne sont pas des citoyens que l’on « pacifie » à coup de grenades et de LBD.

La maltraitance a ses limites.

Nous n’exposerons pas nos enfants plus que ceux des autres. Nous ne sacrifierons pas nos enfants sur l’hôtel du covid-ultra libéral.

Sur quelle base devons-nous faire confiance ? Le 49.3 des retraites ? Le traitement des violences policières ? Le Médiator ? Fukushima ? Tchernobyl ? Le sang contaminé ?

Nous n’exerçons pas nos métiers pour l’argent, ni pour la gloire, ni même pour la reconnaissance sociale (très forte auprès du public avec lequel nous sommes en contact, très faible auprès de la société).

Le mépris n’est plus acceptable.

Il n’est pas tolérable de jouer ainsi avec nos enfants.

Il n’est pas tolérable que l’éducation nationale soit elle aussi ainsi malmenée, puisque de fait elle restera en contact des enfants présentant le plus de risque d’infection, qui seront en petit groupes en vont sans doute se le transmettre, et donc toucher les parents, et donc les publics fragiles des établissements du médico-social (EMS).

Le degré de réflexion est proche du néant.

L’humain n’est clairement pas la priorité du gouvernement, sauf à lui prêter le goût de faire souffrir.

Et ça fait quand même du monde, si on additionne les résidents des EMS, les professionnels, les familles des résidents et des professionnels. Plus le fait que l’on va augmenter la probabilité de croiser des porteurs du virus dans les transports (offre réduite, moins d’usagers globalement mais concentrés du fait de l’offre réduite et tous sur des métiers dits essentiels).

Combien de jours va-t-il falloir pour mettre ko les professionnels essentiels ? Et il se passe quoi ensuite ? C’est castaner qui viendra changer les couches ? buzin va changer les stomies ? macron va faire le ménage (et c’est pas juste passer le balai).

En fait les gars, je vous le dis avec une colère tendance glaciale. Je crois que ça va pas être possible. Pas dans ces conditions. Pas avec ce qui se passe depuis des semaines, des mois, des années. Pas avec ce qui nous attend ensuite.

Va falloir changer les choses si vous voulez que ça tourne.

En attendant, au final, à nous refuser de « protéger » un peu notre famille, en imposant le sacrifice du couple et des enfants, vous perdez tout ! Ma femme n’ira pas travailler. Je n’irais pas travailler. Si nos enfants doivent être confinés, ce sera à la maison, tant que nous en aurons la santé.

Nous refusons ce transfert d’autorité. Prenez garde, la tentation de reprendre d’autres délégations est bien présente.

RATM - Killing In The Name © JustRATM

Pour finir, un rappel…de part nos professions, nous sommes exposés à un risque sanitaire réel, diffus mais multiple. Au quotidien le risque est maîtrisé. Le désordre autour du covid est simplement criminel.

S'en laver les mains ne va pas suffire !

Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.