C’est peut être pour avoir été élève de Sainte Pulchérie à Istambul, au seuil de l’enfance, il y a cinquante ans, que je me sens concerné par ce débat ouvert une fois encore à l’Assemblée par des apôtres de la pensée morale sans rapport avec la raison d’être du droit. Mais quand on voit l’Assemblée Nationale n’avoir d’autres préoccupations plus urgentes que le vote d’une loi « sur la résur la lutte contre le racisme et sur la repression de la contestation de l’existence des génocides reconnus par la loi », on se dit qu’il faut absolument défendre la liberté de penser l’histoire qui n’est qu’une des facettes de la liberté tout court.
Qu’on ne se méprenne pas : les génocides sont des épisodes ignobles de l’histoire des peuples. La France n’a aucune leçon à donner au monde, ne serait-ce qu’à cause de la Vendée ou de l’Algérie.
Mais si le génocide arménien, dont il est ici question, est insupportable, il relève désormais de la condamnation de l’histoire, d’un coté, et de l’autre, du travail conjoint de mémoire entre la Turquie et l’Arménie pour que ces pays parviennent à une coexistence pacifiée et envisagent un avenir plus serein. Les leçons de la France sont inutiles et hors de propos. Quatre cent mille voix d’Arméniens en France, à supposer que cette loi les satisfasse, ne valent pas de rompre avec ce principe fondamental de la liberté de penser et de s’exprimer. Car c’est de cela qu’il s’agit : interdire l’expression d’une autre opinion que celle de l’Etat, d’une pensée officielle et ayant force de loi avec sanctions lourdes à la clef . Plus généralement, les lois mémorielles sont le reflet d’une évolution du politique vers une uniformisation de la culture au service des gouvernants. Désormais, le petit père du peuple pense pour vous. Les Français savent bien, d’ailleurs que s’il y avait quatre cent mille Turcs en France, la brosse démagogique fonctionnerait autrement.
Les politiques font l’histoire, ils ne l’écrivent pas. Peut être qu’aujourd’hui, ne supportant plus leur propre impuissance, ils se valorisent en emmerdant leurs citoyens par les oukases de la pensée obligatoire. Les lois mémorielles sont une insulte à l’intelligence des peuples. Ceux ci savent parfaitement l’ignominie des certains faits historiques, comme les génocides ou les massacres d’innocents au nom d’idéologies plus ou moins folles. Mais l’histoire appartient aux historiens qui doivent débattre et éventuellement juger dans des procédures contradictoires.
Qu’adviendra-t-il si ne peut s’exprimer que la voix officielle parce que l’autre serait bâillonnée par la menace d’amendes ou de prison?. Un seul mot à dire à ces députés : laissez la vertu aux religions et l’histoire aux historiens. Faites votre travail pour sortir au plus tôt la France de l’ornière. Et foutez nous la paix !
Billet de blog 21 décembre 2011
Turquie-Arménie: le retour de l'Inquisition
C’est peut être pour avoir été élève de Sainte Pulchérie à Istambul, au seuil de l’enfance, il y a cinquante ans, que je me sens concerné par ce débat ouvert une fois encore à l’Assemblée par des apôtres de la pensée morale sans rapport avec la raison d’être du droit.
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