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Billet de blog 25 juin 2023

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Le Misérable*

Hugo complète ainsi le portrait de Javert : « Les paysans asturiens sont convaincus que dans toute portée de louve il y a un chien, lequel est tué par la mère, sans quoi en grandissant il dévorerait les autres petits. Donnez une face humaine à ce chien fils d'une louve, et ce sera Javert ».

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les Misérables est un roman de Victor Hugo publié en 1862, l'un des plus vastes et des plus notables de la littérature du XIX e siècle. 

Javert est l'un des personnages du roman. Cet inspecteur de police est l'ennemi juré de l’ex-forçat Jean Valjean en rupture de ban, qu'il pourchasse sans trêve. Il se suicide quand il comprend que Jean Valjean est un homme bon qui a tout fait pour se racheter, regrettant de l’avoir traqué.

Hugo aurait-il sans le savoir écrit la biographie de DARMANIN Gérald?

La tête me tourne.

Les parallèles sont troublants :

Fils d’une tireuse de cartes, dont le mari est aux galères, Javert est né dans une prison.

« Le ministre de l’Intérieur parle souvent de sa mère Annie, femme de ménage, ou encore de son grand-père, Moussa , tirailleur algérien, engagé dans l’armée française. Il est moins dissert sur son père Gérard. Le livre de Laurent Valdiguié et François Vignolle «Gérald Darmanin , le baron noir du Président»* revient sur la relation père-fils, marquée par un terrible drame. Gérard Darmanin est décrit ainsi par les auteurs : «Voix rauque, gros fumeur, buveur invétéré, marié à quatre reprises, d’origine maltaise, il a des faux airs de Richard Bohringer». Les relations entre Gérard et Gérald ont longtemps été «tumultueuses, voire explosives». » (Paris Match)

En grandissant, Javert pensa qu'il était en dehors de la société et désespéra d'y rentrer jamais. Il remarqua que la société maintient irrémissiblement en dehors d'elle deux classes d'hommes, ceux qui l'attaquent et ceux qui la gardent ; il n'avait le choix qu'entre ces deux classes ; en même temps il se sentait je ne sais quel fond de rigidité, de régularité et de probité, compliqué d'une inexprimable haine pour cette race de bohèmes dont il était. Il entra dans la police.
Il y réussit. À quarante ans il était inspecteur.

Gérald Darmanin est né le 11 octobre 1982, à Valenciennes (Nord). Après un diplôme d'études universitaires générales (DEUG) d'histoire décroché à l’Institut catholique de Paris en 2002, il continue sa formation à Sciences po Lille.

"J'en ai tiré sans doute une volonté de protéger les autres. C'est pour ça que je fais de la politique d'ailleurs (…) 

Il entra dans la politique de métier.
Il y réussit. À 23 ans il était collaborateur.

Il enchaîne les postes : collaborateur de Jacques Toubon entre 2005 et 2007 (quand il est député au Parlement européen) puis responsable des relations publiques d'Entreprises et Cités (2007-2008). Il devient responsable des affaires juridiques de Xavier Bertrand à l'UMP (2009), directeur de campagne, puis collaborateur, puis chef de cabinet de David Douillet (2009-2012), député du Nord (2012-2017), maire de Tourcoing (de 2014 à 2017), et enfin ministre de l'Action et des Comptes publics avec l'arrivée d'Emmanuel Macron à la présidence.

"Avant d'aller plus loin, entendons-nous sur ce mot face humaine que nous appliquions tout à l'heure à Javert.
La face humaine de Javert consistait en un nez camard, avec deux profondes narines vers lesquelles montaient sur ses deux joues d'énormes favoris. On se sentait mal à l'aise la première fois qu'on voyait ces deux forêts et ces deux cavernes. Quand Javert riait, ce qui était rare et terrible, ses lèvres minces s'écartaient, et laissaient voir, non seulement ses dents, mais ses gencives, et il se faisait autour de son nez un plissement épaté et sauvage comme sur un mufle de bête fauve. Javert sérieux était un dogue ; lorsqu'il riait, c'était un tigre. Du reste, peu de crâne, beaucoup de mâchoire, les cheveux cachant le front et tombant sur les sourcils, entre les deux yeux un froncement central permanent comme une étoile de colère, le regard obscur, la bouche pincée et redoutable, l'air du commandement féroce."

Illustration 1

Cet homme était composé de deux sentiments très simples, et relativement très bons, mais qu'il faisait presque mauvais à force de les exagérer : le respect de l'autorité, la haine de la rébellion ; et à ses yeux le vol, le meurtre, tous les crimes, n'étaient que des formes de la rébellion. Il enveloppait dans une sorte de foi aveugle et profonde tout ce qui a une fonction dans l'État, depuis le premier ministre jusqu'au garde champêtre. Il couvrait de mépris, d'aversion et de dégoût tout ce qui avait franchi une fois le seuil légal du mal. 

« Il faut savoir qu’être dans une manifestation non déclarée est un délit, mérite une interpellation », avait déclaré la semaine dernière le ministre de l’Intérieur,

Bon Javert était absolu et n'admettait pas d'exceptions. L'ami des Mulliez l'est un peu moins le concernant et s'autorise quelques libertés, quelques écarts: A propos d'une relation tarifée avec Fantine. «Tu as raison, je suis sans doute un sale con. Comment me faire pardonner?» Saluons ce moment rare de lucidité.

«Nous assistons à une crise de l'autorité. Il faut stopper l'ensauvagement d'une certaine partie de la société et réaffirmer l'autorité de l'État. Ne rien laisser passer.»

La citation pourrait presque passer inaperçue au milieu de tous ses discours pro-autorité, sauf que le terme «ensauvagement» n'est pas anodin. Gérald Darmanin est allé le chercher chez Laurent Obertone et dans la mouvance d'extrême droite. Et il sait très bien qu'il fera tendre l'oreille à ceux-là. Cela repose la question de sa proximité intellectuelle avec l'extrême droite –même s'il répète vouloir combattre Marine Le Pen.

«Si je suis Maire de #Tourcoing, je ne célébrerai pas personnellement de mariages entre deux hommes et deux femmes.»

"Il partageait pleinement l'opinion de ces esprits extrêmes qui attribuent à la loi humaine je ne sais quel pouvoir de faire ou, si l'on veut, de constater des damnés, et qui mettent un Styx au bas de la société. Il était stoïque, sérieux, austère ; rêveur triste ; humble et hautain comme les fanatiques. Son regard était une vrille. Cela était froid et cela perçait. Toute sa vie tenait dans ces deux mots : veiller et surveiller. Il avait introduit la ligne droite dans ce qu'il y a de plus tortueux au monde ; il avait la conscience de son utilité, la religion de ses fonctions, et il était espion comme on est prêtre. Malheur à qui tombait sous sa main ! Il eût arrêté son père s'évadant du bagne et dénoncé sa mère en rupture de ban."

"À ses moments de loisir, qui étaient peu fréquents, tout en haïssant les livres, il lisait ; ce qui fait qu'il n'était pas complètement illettré. Cela se reconnaissait à quelque emphase dans la parole."

“Que sont devenues les grandes âmes ?”

Sur son bureau tourquennois, dossiers et livres s'entassent. Lecteur compulsif, il a la citation facile. “Que sont devenues les grandes âmes ?”, s'interrogeait-il ainsi récemment sur Twitter avec lucidité à propos de Friedrich Nietzsche. “On m'a dit que j'en faisais trop, j'essaie de me calmer un peu”, confesse l'édile. A Bercy, parmi ses livres qu’on trouve dans son bureau : un recueil du cardinal de Retz et... Dans l'ombre, du Premier ministre Edouard Philippe. Ne le surnomme-t-on pas “Darmalin” chez ses amis Les Républicains ? (Capital.fr)

Un grand merci à Victor Hugo : Extrait des Misérables (Première partie, Livre cinquième, chapitre V) de Victor Hugo

L'avenir nous dira si la ressemblance ira jusqu'au dernier geste de Javert, qui a conféré une certaine humanité au personnage.

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