Je ne me sens pas concerné par le « printemps berbère » du 20 avril 1980. C’est un mouvement qui milite pour l’identité ethnique Amazighe, par opposition à tout ce qui n’est pas Amazighe et en premier l’identité Arabe et toute autre forme de métissage. De ce fait, son combat est ethniciste avec toutes les connotations discriminatoires qui caractérisent cette forme d’expression identitaire. L’idéologie ethniciste étant une forme de ghettoïsation ethnique qui exclue toute possibilité de métissage, alors que la population Algérienne est majoritairement métissée et ne peut dans ce cas être concernée par la quette de cette identité ethnique. Le « printemps berbère », qui revendique ouvertement la pureté ethnique Amazighe comme référent identitaire, s’inscrit idéologiquement dans le nationalisme ethnique. Cela rappel fâcheusement l’idéologie Nazie qui militait elle aussi pour la pureté ethnique Aryenne.
L’idéologie propre au mouvement Berbériste, telle qu’elle s’est exprimée dans la plateforme du « printemps Berbère » et articulée autour du nationalisme ethnique, même si démagogiquement elle prétend inclure dans sa plateforme la promotion des langues populaires, ne peut prétendre s’inscrire dans les valeurs politiques universelles de démocratie, de citoyenneté, de liberté de conscience, d’un état de droit, car elle sera en contradiction avec son caractère discriminatoire identitaire.
Par ailleurs, la revendication identitaire en Algérie n’est pas le monopole des Berbéristes. Généralement, celle-ci s’inscrit dans le rejet du référent identitaire Arabe exclusif, imposé par le régime politique autoritaire hérité de la guerre de libération nationale. Ce référent identitaire Arabe avait été imposé par nécessité en tant que vecteur d’adhésion de la population à la révolution anticoloniale. Il s’est ainsi constitué arbitrairement en tant qu’idéologie de combat, sans tenir compte de la complexité identitaire de la population qui était fortement métissée. Au tournant de l’indépendance, l’absence de débat démocratique sur la question identitaire, hypothéqué par un régime totalitaire et autoritaire, n’a pas permis l’émergence d’un consensus national autour de la question identitaire.
A ce jour, il est à déplorer l’absence totale de débat sur la question identitaire, qui aurait pu trancher sur une identité nationale consensuelle, où chaque Algérien et chaque Algérienne se sentiraient représentés et respectés avec leurs particularités individuelles. A cet effet, tout débat focalisé sur la dualité des identités Arabe et Amazighe conduirait inévitablement vers une impasse. Hormis l’opposition des Berbéristes aux tenants de l’identité arabe, un troisième courant est possible, qui consacrerait une identité métissée et transculturelle et dont la langue d’expression commune serait la Derja que parlent les Algériens sur tout le territoire national. Ce débat est plus aisé d’un point de vue politique, car il privilégiera la question de la citoyenneté avec toutes les valeurs politiques de contemporanéité du monde dans une identité métissée et transculturelle.
Youcef Benzatat