GAZA : Bilan de la première semaine de guerre
3 janvier 2009. Alors que l’offensive israélienne sur Gaza entre dans sa deuxième semaine, on peut d’autant moins deviner son issue que ses objectifs étaient des plus difficiles à cerner. 8 jours de guerre, 700 raids des forces israéliennes, 435 Palestiniens tués, 500 roquettes palestiniennes tirées, 4 morts israéliens,… les chiffres sont parlants mais ne disent pas ce que l’opération « Plomb durci » a révélé et déjà réalisé politiquement. Un premier bilan peut en effet être dressé, en termes de dégâts immédiats pour la plupart des acteurs sur la scène du Proche Orient mais aussi de dangers plus durables pour l’avenir des pays et des populations de la région.Une confrontation voulue par Barak et le HamasEn agissant si vite et si fort, Israël pensait-il vraiment parvenir à stopper les tirs de roquettes sur ses villes du Sud ? Ses objectifs de guerre déclarés sont loin de convaincre. Détruire le Hamas militairement et surtout politiquement est certes une ambition qui rallie bien au-delà de l’opinion israélienne mais c’est aussi une illusion quels que soient les moyens armés mis en œuvre, parce que cela revient à dévaster tout Gaza avec ses 1,5 million d’habitants compte tenu de la configuration du territoire. Au bout d’une semaine, on l’a vu, les roquettes du Hamas n’ont pas faibli. Mais le général Barak, ministre de la Défense d’un gouvernement dans lequel son parti travailliste est minoritaire dans une coalition donnée perdante à quelques semaines des élections face aux faucons de Netanyahu mène une double campagne militaire et électorale. Les électeurs israéliens lui seront-ils reconnaissants ? Les résultats des deux campagnes sont de plus en plus liés.En face, le Hamas l’a pratiquement invité à lancer son offensive. Marquant la fin d’une trêve de six mois le 19 décembre par des tirs intensifs de roquettes sur le territoire Israélien, le mouvement qui règne sur Gaza signifiait son rejet d’un nouvel arrangement qui ne brise pas un blocus jamais assoupli pendant la trêve. Sans sous-estimer la puissance de la réaction israélienne, le Hamas cherchait aussi à détruire le consensus régional et international pour l’ostraciser en ignorant son existence et son pouvoir et lui préférant son rival palestinien modéré du Fatah, Mahmoud Abbas. L’affirmation de sa place comme représentant des victimes palestiniennes pourrait se révéler payante.Tous les modérés ridiculisésLes plus grands perdants de la guerre qui se poursuit sont avant tout et bien évidemment les Palestiniens de Gaza sous les bombes depuis une semaine et sous blocus depuis des mois, pour ne parler que des vivants. Mais outre le drame humain, on peut déjà mesurer l’ampleur des dégâts politiques pour tous ceux qui prônent le dialogue et croient à la négociation dans la région et au-delà. Le Président palestinien Mahmoud Abbas se retrouve ridiculisé, surtout auprès de sa population quand il appelle les Israéliens au calme ou les Egyptiens à la médiation ou la communauté internationale à l’intervention. Les gouvernements arabes, Egypte en tête, qui continuent de blâmer le Hamas pour ses « tirs de roquettes provocateurs » alors que des centaines de Palestiniens tombent sous les bombes israéliennes provoquent la colère des populations arabes. L’absence des Etats Unis en pleine transition à la Maison Blanche et l’impuissance de la communauté internationale incapable de faire entendre raison aux Israéliens qui doivent gagner leur bataille comme aux dirigeants du Hamas auxquels ils ont toujours refusé de parler font qu’aucune initiative diplomatique ou médiation sérieuse n’a de chance d’aboutir. Les plus durs peut-être les moins perdants Comme pour le Hezbollah pendant la guerre de l’été 2006, le mouvement de solidarité et de sympathie pour les victimes des frappes israéliennes disproportionnées bénéficie au Hamas. Les formations islamistes à travers le monde arabe, Frères musulmans égyptiens en tête qui mènent la protestation et les manifestations s’imposent aux yeux d’une opinion chauffée aussi par Al-Jazira, avec sa couverture exceptionnelle des événements qui ne censure aucun cadavre ni aucune vocifération contre la lâcheté des dirigeants arabes. L’opération « Plomb durci » a encore durci les positions et.accentué la lutte entre deux conceptions du conflit israélo-palestinien qui s’affrontent dans le monde arabo-musulman entre les partisans de la négociation et ceux de la confrontation. Ceux qui soutiennent le Fatah et reprochent au Hamas d’avoir provoqué la guerre et ceux qui, avec le Hamas considèrent les modérés comme des complices d’Israël. Ces derniers, comme le Hezbollah et l’Iran rejettent toute solution négociée et prônent la lutte armée, quels que soient les sacrifices et surtout le temps qu’il faut pour la victoire. Un temps que les islamistes mesurent à l’éternité.