Je ne vais pas bien. J’ai peur. Peur que l’histoire terrible se répète. Je tremble du danger qui guette.
Car un drôle d’animal a cogné à la porte. On lui a ouvert. On l’écoute vanter sa marchandise. Beurk, font les uns, c’est tentant, disent les autres, j’achète ! s’enthousiasment certains. Il a sonné et on ne lui a pas fermé la porte au nez.
Je me dis que cette abomination avance sous trois déguisements : la pureté égoïste, la rancune économique et l’intérêt partisan.
La pureté égoïste : « mon idéal, mon utopie ne sont pas représentées ? Ah je ne vais pas quand même pas me salir les mains ! Donc je m’abstiens ou je vote blanc ».
La rancune économique : « mes impôts ont augmenté, mon pouvoir d’achat stagne, j’ai peur de perdre mon boulot, je vote pour la dame, ils l’ont bien mérité, bien fait pour eux ».
L’intérêt partisan : « mes amis, ne nous divisons pas, faites ce que vous voulez, l’important c’est qu’on se retrouvera après bien serrés les uns contre les autres pour mener la bataille, et là, croyez-moi, on va gagner ! »
Vous en êtes bien certains ? Vous êtes sûrs de vous ?
Vous êtes sûrs qu’un Macron sera pareil ou pire qu’une Le Pen ? Vous avez tout bien vérifié ? Les individus, les partis, les programmes ? L’usage qu’ils comptent faire du pouvoir ? Tout est bien clair pour vous ? Pas de danger ?
Vous êtes sûrs que la mondialisation, ça peut se balayer d’un revers de main ou d’un haussement d’épaules ? Qu’on fermera les frontières tranquillement ? Vous avez vérifié ? Ça a des chances de marcher ?
Vous êtes sûrs qu’une France hors de l’Europe ou qu’une France dans une Europe brisée sera une France moins malheureuse qu’une France dans une Union européenne ? Vous avez vérifié ? Pas de soucis ?
Vous êtes sûrs que vous pourrez encore aller voter ? Que vous aurez le choix ? Vous avez vérifié ?
Vous avez vérifié ? Plusieurs fois vérifié ? Pas seulement auprès de ceux qui pensent comme vous ?
Vous avez bien fait le distinguo entre ce que vous n’aimez pas et ce que vous n’aimeriez vraiment pas ?
Il ne vous est jamais arrivé dans votre vie d’avoir à choisir entre le mauvais et le pire ? Et d’avoir choisi le mauvais pour éviter le pire ?
Je vous envie. Moi j’ai des doutes, de très gros, de considérables doutes. Je vais donc voter pour le moindre mal.
Je n’ai pas le choix.