Yannick Chevalier

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Billet de blog 6 mars 2015

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Introduction à une réflexion sur les organisations politiques

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Les corps (Commission, Conseil, Parlement,. . .) de l’Union Européenne sont souvent accusée d’être libéraux. Je pense que c’est pire que cela : ils sont composés, presque en dépit du bon sens, pour ne pas fonctionner. La situation actuelle est donc celle d’États qui délèguent une partie de leur souveraineté à une Europe qui ne peut rien en faire. Les seules institutions fonctionnant encore sont celles placées en dehors de tout contrôle démocratique : la BCE et la Commission, lorsqu’il s’agit de négocier des accords de libre-échange ou de fournir des liquidités aux banques. En dehors d’ultra-libéraux voulant réduire en miette le rôle des États, ou de pays étrangers ayant intérêt à l’inexistence politique de l’Union Européenne, cette situation ne peut plaire à personne, et l’Union Européenne ne peut qu’être rejetée par les peuples car contraire à leur intérêt : elle prive les nations d’une partie de leurs pouvoirs pour ne rien en faire.

La crise grecque, mais aussi plus généralement la gestion de la crise de l’Euro montre que les institutions européennes, dans leur forme actuelle, tendent plus à diviser les peuples et à les jeter les uns contre les autres qu’à assurer l’accord et la compréhension entre eux. Là encore, il faut analyser le fonctionnement de l’Union Européenne telle qu’elle existe, et se demander si ce n’est pas la forme même de ses institutions qui crée la discorde, plus que les politiciens de tel ou tel pays. De même pour la gestion de la crise ukrainiennne, où les institutions européennes regardent les britanniques envoyer des troupes (pour la formation) dans ce pays en guerre, en soulevant la colère de la Russie, tandis que la France et l’Allemagne tentent de concilier les intérêts russes et ukrainiens. Là encore, la question pertinente est de savoir si ce n’est pas la constitution actuelle de l’Europe qui la rend incapable d’une volonté propre, et donc impotente.

Plus près de nous, l’utilisation de l’article 49-3 soulève elle aussi des questions sur les rapports de pouvoir entre le parlement, institution législative, et l’exécutif, entre le gouvernement qui imposer une loi au parlement et la menace d’une dissolution de ce parlement par le Président si les parlementaires devenaient trop récalcitrants. De même, il n’a échappé à personne que l’instruction de certaines affaires judiciaires semble parfois se faire sous pressions politiques, alors même que les magistrats français sont nominalement indépendants de l’exécutif. Ce problème d’organisation des pouvoirs pour permettre une action efficace autant que démocratique se retrouve même dans l’organisation de certains partis, comme Nouvelle Donne, ayant adopté une “constitution” extrèmement démocratique sur le papier, mais qui provoque des mécontentements peu de temps après son adoption. Il ne s’agit pas d’épargner les autres partis en faisant cela, la volonté des adhérents de Nouvelle Donne étant justement de réintroduire de la démocratie là où elle a trop souvent disparue, au cœur même du fonctionnement des partis politiques démocratiques. Cette volonté et ce résultat interroge aussi sur la possibilité pratique de mêler la capacité d’action d’un parti, sans laquelle il ne peut rien, et sa capacité d’écoute démocratique, sans laquelle il ne veut rien.

Et je ne parle même pas des constitutions de 6ème République, pour lesquelles il existe presque autant de versions que d’hommes politiques, mais qui ont presque toutes comme premier but de limiter le pouvoir de l’exécutif, car en France c’est ce pouvoir qui usurpe tous les autres. Même si on peut argumenter que le degré d’usurpation varie suivant les Présidents, et que François Hollande est beaucoup plus respectueux de son gouvernement, de ses ministres, du parlement, et de la justice que ne l’était Nicolas Sarkozy, une constitution ne devrait pas dépendre de la compétence ou de la bonne volonté des élus, elle doit au contraire les rendre vertueux.

C’est pour toutes ces raisons qu’il me semble judicieux de commencer une réflexion théorique sur l’organisation d’un gouvernement, mais aussi plus généralement sur le principe démocratique au sein d’une organisation, en particulier sur les principes d’organisation à respecter pour concilier la prise en compte des avis des citoyens et la capacité d’action qui justifie l’existence de cette organisation.

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