Etonnant ce peuple de droite... Il est venu, il a vu, et il a voté pour l'Europe. Une nette majorité, indiscutable, même si certain(e)s déjà relativisent le succès en essayant de dissimuler leurs défaites sous les plis osés d'une rhétorique à laquelle on ne croit plus.
Etonnant peuple de droite, qui a voté pour l'Europe. Car le peuple de droite n'aime pas l'Europe. L'Europe pue, il faut bien bien l'écrire pour l'homme et la femme de droite.
Déjà, l'Europe est un de ces "machins" fustigés naguère par le grand homme de droite que fut Charles de Gaulle. Une sorte de technostructure apatride, transcendant la nation pour mieux l'ignorer et la dissoudre. L'homme de droite n'aime pas les machins. A la rigueur, les hochets ou les "bidules", comme à la Baule, pour celles et ceux qui connaissent ce tords-boyaux provincial et rustique. Et puis, l'Europe, cela sent un peu ce "parti de l'étranger", ces forces suspectes et invisibles qui dans l'ombre agissent contre la patrie sacrée et indivisible (à l'exportation)...
Ensuite, l'Europe, par des lois tatillonnes et mesquines, détruit inlassablement ce mode de vie à la française, sui generis, qui fleure bon le terroir et les traditions. L'Europe qui change le nom de la confiture, qui n'en est plus, et qui devient de la marmelade voire de la gelée, mais qui s'appellera toujours confiture... Par l'Eternel, quelle compote... Si la confiture n'en est plus, à quel sein se vouer... Et tout autant l'homme et la femme de droite fustigent les lois sur l'attelage de caravane, pièce métallique calibrée qui défigure, par ses dimensions imposées, son Audi. L'homme de droite achète allemand, en Belgique, certes, mû par un vieux réflexe antifiscal. Et puis tous ces députés, parfois (une fois ou deux) à Strasbourg et souvent à Bruxelles, ces gyrovagues parlementaires, cela sent la chienlie. Mot néfaste. Bref, l'Europe agace comme une rage de dents un dimanche...
Il ne faut pas oublier que l'Europe, en outre, n'est que le succédané de la puissance d'antan, de la puissance passée, de la puissance qui se déclinait, en tâches roses sur les dictionnaires Larousse naguère, hier, avant 1962. L'homme et la femme de gauche étaient déjà fashion... dans leur amour de l'Empire. A Vincennes, naguère, ils se pressaient et communiaient, pour cette très grande France. Cette France, qui comme l'Empire des cousins Anglois (ces fourbes de Crécy, ces traîtres d'Azincourt, ces insolents de Waterloo, ces m'as-tu-vu de Fachoda... liste non exhaustive et que Pompidou, par folie, par mégarde, par distraction... a laissés entrer comme un provincial dans une fête parisienne), qui, donc écrivais-je avant de me laisser aller à un couplet anglophobe, fruit de mon passage dans la Royale... ne voyait jamais se coucher sur lui le soleil... Le monde, oui, l'Europe non...
Et pourtant...
Et pourtant, aujourd'hui, le peuple de droite est venu voter. Il a voté. Et tous les Cassandre, qui ont vaticiné les pires déculottées pour la majorité, les défaites retentissantes, les surprises insensées se révèlent avoir été des prophètes de comptoir. Le peuple de droite est venu, le peuple de droite a vu, et le peuple de droite a vaincu... Il n'a pas écouté celles et ceux qui prétendent savoir ce qu'il pense et ce qu'il va faire. De vote sanction, point. De vote tribunicien, point non plus.
Et dans l'isoloir, il a côtoyé, et sans doute même salué le peuple écologiste et citoyen... Le peuple est donc devenu sensible à ce qui reste de la nature et est devenu politiquement mature. Et cela c'est tout de même deux bonnes nouvelles.