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Billet de blog 18 décembre 2012

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Savita et la loi irlandaise sur l'avortement

   Il aura fallu la mort d'une jeune femme pour que l'Irlande bouge enfin sur le problème du droit à l'avortement.

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Il aura fallu la mort d'une jeune femme pour que l'Irlande bouge enfin sur le problème du droit à l'avortement.

Savita Halappanavar, jeune dentiste indienne venue s'installer en Irlande avec son mari en 2008, est devenue l'emblème de toute une génération de jeunes femmes (et hommes) qui ne se reconnaissent plus dans la Constitution irlandaise de 1937, qui interdit l'avortement en Irlande.

Octobre : enceinte de 17 semaines, Savita est prise de vives douleurs dans le dos. A l'hôpital de Galway, on la renvoie d'abord chez elle. Les douleurs reprennent. Le mari de Savita décide de retourner à l'hôpital où, cette fois, on la garde.

Les médecins annoncent au couple que Savita est en train de faire une fausse-couche et que le bébé ne serait pas viable, de toute façon. Savita demande alors aux médecins présent une interruption médicale de grossesse. Refus des médecins. Pendant trois jours et trois nuits, Savita ne cessera de demander au personnel médical de mettre médicalement un terme à sa grossesse. Des témoins sont présents : son mari, un ami de la famille et des médecins stagiaires.

On refuse toujours de lui pratiquer un avortement thérapeutique. Les médecins se contentent de lui répéter que "c'est un pays catholique, ici" et que le "coeur du foetus bat toujours.". Elle leur répond : "Je ne suis ni Irlandaise, ni catholique". Rien n'y fait.

Au troisième jour,  le coeur du foetus s'arrête. On décide alors de lui pratiquer un curetage. Trop tard. La septicémie s'est installée. Savita meurt dans la nuit du samedi au dimanche 28 octobre 2012.

Aussitôt la nouvelle connue, des manifestations spontanées sont organisées dans tout le pays.

Le Premier ministre irlandais promet une enquête sur la mort de Savita. Il affirme que la législation irlandaise sera modifiée. Les parents de Savita, en Inde, décident de porter plainte contre l'hôpital irlandais. L'enquête est toujours en cours.

 L'avortement est interdit en Irlande. Depuis 1992, la Cour suprême a décidé d'amender la loi en précisant "sauf si la vie de la mère est en danger" - et en autorisant les femmes à voyager à l'étranger pour se faire avorter (suite au Cas X : une jeune fille de 14 ans enceinte à la suite d'un viol et qui menaçait de se suicider). Il faut noter que "la vie de la mère en danger" ne veut pas dire "la santé de la mère en danger", selon la législation irlandaise. D'où le flou dans lequel se trouvent les médecins pour décider ou non de pratiquer un avortement médical.

En 2012, la Cour européenne des Droits de l'Homme avait condamné l'Irlande à la suite de la plainte d'une jeune femme contrainte de voyager à l'étranger pour avorter alors qu'elle suivait un traitement contre son cancer.

Hier, on a appris que le rapporteur des Nations Unies pour la Santé a affirmé, lors d'une conférence en Irlande, que l'Etat irlandais devait "rendre l'avortement possible en toute sécurité, selon la loi, pour les femmes dont la vie était en danger", ajoutant que lorsque l'avortement est interdit, il s'agit d'une discrimination contre les femmes.

Par ailleurs, le Premier ministre a annoncé, aujourd'hui, qu'une série de décisions seraient dévoilées dès la semaine prochaine.

En Irlande, l'avortement est toujours soumis à la loi de 1861 qui punit la femme avortée de plusieurs années de prison. On estime actuellement à 4.200 le nombre de femmes se rendant chaque année en Grande-Bretagne ou sur le Continent pour se faire avorter.

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