
dessin de Sonia Mitralia
Trump, le Caligula fasciste du bain de sang et de la guerre civile!
par Yorgos Mitralias
Trump fasciste ? Évidemment, répondent désormais la moitie (49%) des américains, plusieurs de ses ex-collaborateurs, et l’écrasante majorité de ses adversaires, des experts en fascisme, et des médias états-uniens et internationaux. En somme, les mêmes qui trouvaient, hier encore, cette question choquante ou inopportune et taxaient de simplistes ceux qui osaient y répondre par l’affirmative.
On pourrait donc s’écrier avec soulagement mieux vaut tard que jamais,,,,si cette question n’apparaissait désormais plutôt dérisoire et dépassée par les événements. Car une autre question, également tabou jusqu’il y a peu, vient aussi d’être désacralisée : celle du déclenchement d’une guerre civile dans les États-Unis d’aujourd’hui. La preuve? Tout le monde en parle actuellement outre atlantique ! Et ce qui est réconfortant, on ne se contente plus de parler seulement de l’éventualité de cette guerre civile, mais on commence à centrer le débat sur les « modalités », les conséquences pratiques et les rapports de force de cette deuxième guerre civile nord-américaine. En somme, aux États-Unis on prend très, très, très au sérieux cette éventualité et on essaie de s’en préparer en conséquence…
Alors, faisons de même car la clepsydre se vide et ça urge désespérément. Ayant toujours en tète une première et incontournable vérité que nous rappelions déjà avec force il y a plus de cinq ans, dans un article au titre bien éloquent « Le spectre de la guerre civile hante déjà les États-Unis d’Amérique ! »: « on doit admettre que s’il y a une chose pour laquelle on ne peut pas accuser Trump, c’est pour son inconséquence, car il a toujours refusé de se « calmer », et il applique méthodiquement ses politiques barbares, tandis qu’il n’a jamais oublié de donner suite à ses menaces... ». (1) Et puisque Trump fait ce qu’il promet de faire, il ne reste qu’a rappeler ce qu’il dit jour après jour depuis belle lurette, pour prendre conscience de l’énormité de la menace qu’il représente, et cela indépendamment du résultat des prochaines élections présidentielles. Car il a déjà promis «un bain de sang pour tout le pays» s’il n‘est pas elu (if I don’t get elected, it’s going to be a bloodbath, for the whole country) ! Donc, on est averti. Comme on est averti qu’une fois à la Maison Blanche, il va dissoudre les syndicats ouvriers et mettre hors la loi les grèves, les manifestations de rue, les opposants et l’opposition Démocrate, tandis qu’il va déporter des millions de migrants (même « légaux ») et utilisera les forces armées pour « résoudre » une fois pour toutes la question de ce qu’il appelle «l’ennemi de l’intérieur » ! Et dire qu’il y a encore en Europe des gens (même de gauche !) qui continuent de perdre leur temps en s’interrogeant si Trump est vraiment fasciste…
Et pourtant,, même au cas où Trump changerait comme par miracle d’avis et opterait pour une approche plus pacifique des choses, il y a désormais des centaines des milliers de ses supporters armés jusqu’aux dents, chauffés à blanc et tout à fait décidés, comme d’ailleurs ils le proclament, d’en découdre même sans lui. Cependant, Il va de soi qu’une chose est promettre le bain de sang et la guerre, et une autre est pouvoir la faire effectivement. Arrivés donc à ce point, et étant donné que selon un sondage d’il y a quelques jours, « 73 % des électeurs américains se disent inquiets d’une flambée de violence politique après les élections du 5 novembre », on doit s’interroger comment se présenterait concrètement cette « flambée de violence » au lendemain des élections.
D’abord, il ne faut pas croire qu’on assistera à une répétition de l’affrontement de deux armées régulières, comme a été le cas durant la première guerre civile américaine en 1861. Le plus probable, tout au moins pendant une première phase de cette « flambée de violence », serait d’avoir une multiplication d’actes « terroristes » plus ou moins isolés, surtout à l’initiative des « milices » fascistes pro-Trump et vu que 32 % des Républicains déclaraient récemment être prêts «à recourir à la violence pour sauver le pays». Cependant ces actes, qui pourraient être bien meurtrières, suffiraient pour créer un climat de fin de monde, ce qui pousserait les divers centres de pouvoir à chercher d’urgence des moyens pour prévenir l’irréparable, c’est a dire une guerre civile qui ferait exploser la fédération.
En effet, une telle perspective ne pourrait que semer la panique car elle créerait des problèmes insolubles et très dangereux non seulement pour les États-Unis, mais aussi pour le monde entier. Par exemple, en mettant à l’ordre du jour non seulement la protection des intérêts immédiats du capitalisme et des capitalistes américains, mais aussi des questions du genre que faire des finances, des forces armées ou -surtout- de l’arsenal nucléaire d’un pays divisé en deux camps qui se font la guerre. Alors, il n’est pas exclu que, voulant éviter le pire et l’irréparable, des centres du pouvoir (économique, politique, militaire…) se mettent d’accord pour «geler» la situation afin de séparer les camps ennemis en attendant des jours meilleurs. Il s’agirait d’une sorte de « trêve » provisoire qui aboutirait à reproduire grosso modo la carte du pays au temps de sa première guerre civile : les états sudistes prop-Trump contre ceux du nord anti-Trump!
Dans ce cas-là, il n‘est pas du tout exclu qu’on assiste aussi à un phénomène qu’on a déjà vu se produire par le passé dans des situations analogues par exemple en Allemagne dans les années ‘20 ou en Russie juste après la fin de l’Union Soviétique : un processus de désintégration de l’État fédéral, qui commence avec le rétablissement des...douanes et des « frontières » des chacune de ses composantes (États, provinces et même villes) qui cherchent le salut en s’isolant des autres et en se repliant sur elles-mêmes pour se protéger. Une telle dynamique aboutirait vite aux États-Unis à des situations de sécession surtout de la part des États fédéraux où existent déjà des ambitions et des traditions indépendantistes.
Ce n’est pas un hasard que la menace de la guerre civile ravive aujourd’hui ces ambitions indépendantistes et fait que les grands médias américains en parlent beaucoup. Et cela d’autant plus que même des ténors des Républicains vont actuellement jusqu’à se déclarer favorables à la « séparation des États rouges (républicains) des États bleus (démocrates) », que selon un dernier sondage « 23 % des américains soutiennent la sécession », et que les deux principaux candidats à la sécession et l’indépendance sont les poids lourds des deux camps, ...la Californie et le Texas !
Les cas de la Californie et du Texas méritent attention non seulement parce que 29 % et 31 % respectivement de leurs citoyens se déclarent en faveur de leur indépendance, mais aussi en raison des dimensions de leurs économies : la Californie est -pour la huitième année successive- la cinquième économie du monde, derrière l’Allemagne mais devant la France, tandis que le Texas est la huitième ! Comme on l’écrivait déjà en avril 2020, «La perspective de voir par exemple la cinquième économie mondiale, la Californie, scissionner des États-Unis pour devenir un État indépendant pourrait se réaliser si la crise, l’autoritarisme de Trump ou la menace d’une guerre civile généralisée rendaient intenable le maintien dans la Fédération de cet État fédéral, qui vote d’ailleurs très majoritairement contre Trump. Et ceci d’autant plus que la vieille tentation indépendantiste californienne se renforce dernièrement en même temps que des milliers de californiens républicains et conservateurs choisissent de vendre leurs maisons et d’aller habiter ailleurs (p.ex. au Texas) dans les États-Unis...»(2)
Quoi qu’il en soit, il y a actuellement aux États-Unis tellement de haine abyssale et tellement de volonté d’en découdre de la part surtout du noyau dur des trumpistes (30 %-35% des Républicains), qu’on ne voit pas comment les États-Unis pourraient éviter un déchaînement de violence qui ressemblerait comme deux goûtes d’eau à une guerre civile. Le moment est grave non seulement pour la super-puissance mondiale, mais aussi pour tout le monde, étant donné le contexte internationale marqué par la montée en flèche des amis et autres clones du Caligula fasciste nord-américain. Sans aucun doute, les prochaines semaines s’annoncent plus que critiques…
Notes
1. Le spectre de la guerre civile hante déjà les États-Unis d’Amérique! : https://www.cadtm.org/Le-spectre-de-la-guerre-civile-hante-deja-les-Etats-Unis-d-Amerique
2. Trump le pyromane déjà à l’œuvre incendiant le peu qui reste de la démocratie américaine! : https://www.cadtm.org/spip.php?page=imprimer&id_article=18439