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Billet de blog 20 février 2014

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Le racisme : tonner contre !

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Ce blog est personnel, la rédaction n’est pas à l’origine de ses contenus.

Flaubert dans le dictionnaire des idées reçues a une extraordinaire façon de fustiger la paresse intellectuelle de ses bourgeois de contemporains, quand ils s'opposent sans savoir vraiment pourquoi : la définition est, par exemple, « Baccalauréat : tonner contre ! ». Si la montée d'un racisme déboutonné inquiète, la plupart des commentaires sont de cet ordre : tonner contre sans analyser, ou y trouver des justification sociologiques plus ou moins convaincantes.

Or, quoique puisse penser les thuriféraire de l'interprétation consistant à dire que le racisme est une conséquence de la crise systémique du capitalisme ou de la montée des inégalités, celui-ci relève d'une solide construction idéologique commencée au 19ème siècle et confirmé dans les fait par le cancer colonial et impérialiste. Croire qu'il suffira au cœur de la métropole impériale (L'Europe en bref) d'agiter quelques bon sentiments généraux pour extirper le mal relève d'une douce illusion.

Le racisme a structuré l'expansion de l'occident

Les civilisations anciennes ont eu la prétention de conquérir le monde ou de penser en être le centre. L'Occident a réellement conquis le monde dans son ensemble. L'apogée impériale de la fin du 19ème siècle est encore le monde où nous croyons vivre. Cela s'est fait en niant l'humanité des autres et leur simple droit à exister sur leurs terres avec l'expropriation quasi totale des indiens dAmérique du Nord et des génocides parfaits et définitifs comme ceux des indiens des îles de la Caraïbe et des aborigènes de Tasmanie.

Aimée Césaire, qui me semble un des rare à avoir pris la mesure de l'horreur à l'oeuvre résume parfaitement en quelques phrases cet avilissement moral : « de la colonisation à la civilisation la distance est infinie ; de toutes les expéditions coloniales accumulées on ne saurait retenir une seule valeur humaine ».

Contrairement aux idée reçues cette sanglante conquête a eu des soutiens à droite comme à gauche. Il suffit de relire les romans de Jack London qui de passent dans les îles du Pacifique le voir vanter la droiture et les capacités intellectuelles d'un chien Irlandais comparé aux autochtones (Jack dans l'île, qui a longtemps été dans la bibliothèque verte …). Son quasi contemporain Joseph Conrad, peu suspect de gauchisme, ayant montré par contre une vision assez digne dans "Au cœur des ténèbres" de l'horreur de l'exploitation du Congo Belge.

Ce point de vue colonial est structuré idéologiquement par un mélange de sciences naturelles et de déterminisme culturel. Ce n'est pas le lieu de ce billet de blog de résumer ce corpus. Mais qu'il soit permis d'insister sur  le fait que penser que ce dernier peut être combattu sans se confronter à sa cohérence et à ses schéma, est une illusion intellectuelle. En effet, cet imaginaire est ancré dans notre vision du monde, dans nos évidences de tous les jours.

Le bref traumatisme de la seconde guerre mondiale

Pour faire court,  l'expérience concrète de l'expropriation des « races inférieures » était encore présente dans les esprits de façon à la fois parfaitement clair et audible à la fin de la deuxième guerre mondiale. En effet, l'entreprise Nazi, menée en Russie notamment correspondait très exactement à une entreprise coloniale assez classique pour donner au Reich et à son peuple l'espace vital, le « lebensraum » et la population de serviteurs qui va avec, il suffit de lire « Mein Kampf », les choses sont assez claires sur la hiérarchie entre slaves et allemand.

La sidération des autres nations occidentale a été de voir qu'un peuple européen pouvait en traiter un autre comme les européens dans leur ensemble ont traité leurs possessions coloniale.

De là le sursaut à la fin de la guerre, où l'idéologie d'extrême droite a été discréditée, on pouvait certes être réactionnaire, de droite, mais reprendre des stéréotypes culturel et raciaux de supériorité intrinsèque de l'occident, c'était bien plus compliqué.

La victoire d'un lent travail idéologique

Depuis plus de vingt ans, on ré-entends doucement la même musique de darwinisme social (nos néolibéraux ont une part de culpabilité là-dedans), de culte du chef et du sauveur (à quoi bon la démocratie), de destin occidental (pas encore assumé comme racial, seulement culturel et performatif, mais cela arrive doucement).

Cependant, pour pouvoir le combattre il faudrait en parler, enseigner les méandres de l'aventure coloniale, montrer comment cette façon de penser a ses complexités et sa force. Faute de cela, la marée va continuer à monter et les multiples débats organisées tourneront systématiquement à l'avantage de ceux qui savent parfaitement d'où ils parlent et où ils ont envie d'aller.

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